9 juin : Pour mieux comprendre Elie … Sel et Lumière…

Cette semaine, c’est en compagnie du prophète Elie que nous cheminons. La lecture des hauts faits de son ministère sera juste interrompue jeudi par la fête de St Barnabé qui a des lectures propres. Puisque c’est toute la semaine que nous allons entendre parler de ce prophète, ça vaut le coup d’investir un peu pour mieux le comprendre, je vous propose donc que nous fassions un peu d’histoire.

Elie a vécu son ministère de prophète au temps du roi Achab dont le nom revient tellement souvent dans ces chapitres du 1° livre des rois. Nous sommes en 874 quand il arrive sur le trône, mais attention, depuis 932 ou 931, le royaume a été partagé en deux. Salomon n’a pas su ou n’a pas pu conserver l’unité du pays hérité de son père David qui, lui, avait réussi à faire des fameuses 12 tribus d’Israël, un seul Royaume. En 932, il y a eu ce qu’on appelle le schisme qui a séparé le Royaume en deux parties très inégales : 

  • Le Royaume du Nord avec 10 tribus qui aura Samarie comme capitale ; c’est ce Royaume que la Bible appelle Israël. 
  • Le Royaume du Sud avec deux tribus qui aura Jérusalem comme capitale ; ce Royaume la Bible l’appelle généralement Juda

A l’époque du roi Achab, puisqu’il a commencé son règne en 874, la partition du pays est donc un fait entendu. Mais vous imaginez bien que, si la partition a voulu régler les problèmes internes, ce qu’elle n’est pas toujours arrivée à faire d’ailleurs puisque l’unité du Royaume du Nord a été souvent problématique, cette partition a été loin de régler les problèmes extérieurs. Quand il n’y avait qu’un seul Royaume, le pays était déjà tout petit, donc faible par rapport aux grandes puissances environnantes, alors c’est assez facile de comprendre qu’après la division, il deviendra encore plus faible. Les rois, pour se protéger, vont donc s’évertuer à chercher des alliances avec les grandes puissances les plus menaçantes. Mais quand on est un petit poucet, c’est une folie de rechercher la protection d’un ogre ! C’est le début d’une histoire extrêmement compliquée sur laquelle je ne peux pas m’arrêter plus longtemps.

C’est ainsi que le père d’Achab, le roi Omri, avait décidé de faire une Alliance avec les phéniciens. A l’époque, l’un des moyens de sceller une alliance était de provoquer le mariage des enfants des contractants de l’Alliance. Omri va donc donner son fils Achab en mariage à la princesse Jézabel de Tyr qui va venir s’installer en Israël, mais elle ne viendra pas seule, elle prendra avec elle plusieurs centaines de prêtres de sa religion, la religion de Baal. Et c’est contre cet état de fait qu’Elie va lutter si âprement dans son ministère. Le combat sera dur, mais l’enjeu est important parce que figurez-vous que le nom de Baal signifie « propriétaire. » L’enjeu, c’est donc de savoir à qui appartient ce peuple. Est-ce qu’il appartient au Dieu des pères qui l’a libéré d’Egypte et lui a donné cette terre ? Ou est-ce qu’il appartient à Baal que la reine Jézabel voudrait introniser comme le nouveau propriétaire ?

Le peuple, lui, il servait le Dieu qui l’arrangeait selon les circonstances, un coup c’était le Seigneur, un coup c’était Baal. C’est pour cela que demain, nous entendrons la colère d’Elie s’exprimer en disant : « Quand est-ce que vous arrêterez de clocher d’un pied sur l’autre ? » Un coup, le Seigneur, un coup Baal, ce n’est plus possible ! Baal était présenté comme le dieu de la fertilité, alors le Seigneur lance un défi : on verra bien qui fait pleuvoir sur ce pays ! Elie doit aller dire à Achab qu’il n’y aurait plus la moindre goutte de pluie et ce, tant que le Seigneur n’aura pas changé d’avis. C’était la lecture d’hier qui nous racontait cette décision du Seigneur et la mission d’Elie auprès d’Achab.

On peut imaginer qu’avec une telle annonce surtout qu’elle s’est assez vite vérifiée comme étant vraie, Elie n’était pas le grand ami d’Achab, le Seigneur lui a donc conseillé de se mettre au vert, de s’éloigner au bord d’un torrent. Ce qu’il a fait et il a mesuré la douce providence du Seigneur à son égard puisqu’il lui envoyait des corbeaux qui le ravitaillaient. Oui, mais voilà, le torrent s’est asséché et Elie, lui-même s’est retrouvé en difficulté. Alors le Seigneur l’envoie dans le Nord, dans le Liban actuel, à Sarepta, auprès d’une veuve qui sera comme une préfiguration de la veuve dont Jésus faisait l’éloge dans l’évangile samedi dernier. De manière douce, le Seigneur va donner à cette femme d’expérimenter qu’il est le Seigneur en permettant à sa jarre de farine et à son vase d’huile de ne plus jamais se vider. Demain, la méthode qu’Elie choisira pour le montrer à la face du peuple sera nettement moins douce, mais ça c’est pour demain, alors revenez si vous voulez la suite de l’histoire !

Ce que nous pouvons retenir de cette histoire, c’est qu’il nous arrive à nous aussi de clocher d’un pied sur l’autre, de ne pas toujours vivre comme si nous appartenions au Seigneur. Il nous arrive nous aussi de nous vendre à des Baals, des propriétaires qui font miroiter de belles promesses sans jamais pouvoir les tenir. Nous le savons, à chaque fois que nous leur cédons, nous sommes déçus et pourtant nous recommençons toujours ! 

Rassurez-vous, je ne dirai que quelques mots sur l’Evangile. Hier, avec le texte des Béatitudes, nous avons commencé la lecture du sermon sur la montagne qui va nous occuper 15 jours. Aujourd’hui, nous avons ces deux paroles de Jésus concernant le sel et la lumière. Je voudrais juste attirer notre attention sur deux points.

1° point. Contrairement à ce qu’une 1° lecture pourrait laisser croire, ces deux images ne sont pas contradictoires. C’est vrai que le sel dès qu’on l’a mis dans un plat disparait, alors que la lumière doit rester bien visible. Dans l’Eglise, on s’est battu pendant des années, les partisans de l’enfouissement qui voulaient être comme le sel, disparaitre dans le monde pour mieux témoigner et les partisans de la visibilité des chrétiens qui voulaient bien se montrer pour être comme la lumière. Dommage qu’on est perdu pas mal de forces dans ces luttes inutiles car Jésus ne laisse pas le choix, il ne dit pas : selon votre sensibilité, soyez sel ou soyez lumière ! Et puis ces deux images sont profondément unifiées, le sel n’est intéressant que là où il y a de la fadeur et la lumière là où il y a des ténèbres. Jésus donne donc la mission aux chrétiens d’aller là où on a besoin d’eux et d’arrêter d’arroser là où la terre est déjà bien mouillée !

2° point. Jésus ne dit pas, je vous demande devenir sel et lumière. Il ne dit pas : efforcez-vous d’être sel et lumière. Non, il dit : vous êtes. Moi, quand j’entends ça, ça me fait toujours penser aux bougies d’anniversaire, vous savez les bougies magiques, vous soufflez dessus, elles finissent toujours par se rallumer ! Voilà ce qu’est un chrétien pour Jésus, c’est pourquoi il dit : vous êtes et non pas efforcez-vous de devenir. Quand on est chrétien, il n’y a pas d’efforts à faire pour que la lumière que nous portons éclaire, pour que le sel dont nous sommes dépositaires donne du goût.  Mais alors, pourquoi ça ne se voit pas plus ? Eh bien, parce que les efforts, nous les faisons à sens inverse, nous courons après tout ce qui risque de ternir notre éclat de chrétien, de nous faire perdre notre saveur. C’est la médiocrité qui résulte de notre compromission avec le péché qui nous dénature, mais notre nature de chrétien, c’est d’être lumière, sel. A notre Baptême Jésus s’est uni à nous d’une manière indéfectible, c’est pourquoi nous sommes, par nature, lumière et sel. Et quand nous perdons cet éclat et cette saveur, nous savons ce qu’il faut faire : il suffit, pour les retrouver, de nous jeter dans ses bras miséricordieux.

Cette publication a un commentaire

  1. Willem richard

    La cloche d’un pied sur l’autre veut dire que nous ne résonnons pas assez ?
    Par ailleurs, cette activité de cloche risque de nous donner des ampoules et de se prendre pour des lumières. Attention l’orgueil.
    Grace a vos explications, Se reposer sur l’histoire d’Elie nous éclaire et permet de mettre de la lumière dans notre vie, nous accorde de dormir sur nos deux oreilles et sans marcher sur la tête.
    Quant à votre conclusion remplie de saveur, il suffit de se jeter dans la misericorde, sel de Dieu.

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