Cet Evangile, je l’aime particulièrement puisqu’il révèle la malicieuse sagesse de Jésus. Hier, c’était la Visitation, nous n’avons donc pas entendu le passage de l’Evangile qui précède celui que nous venons d’entendre. C’était l’épisode dans lequel Jésus faisait le ménage dans le Temple. Quand Jésus fait ce ménage, les responsables religieux ne sont pas contents du tout, nous le voyons bien dans l’épisode d’aujourd’hui. Et pourquoi ne sont-ils pas contents ?
Eh bien, d’une part parce que Jésus leur change la religion et d’autre part parce qu’en s’attaquant au système des sacrifices, les responsables religieux voient bien qu’ils vont perdre une bonne partie des bénéfices qu’ils réalisaient au Temple. Alors, pas contents du tout, les grands prêtres, les scribes et les anciens vont trouver Jésus et le somment de s’expliquer. On entend bien derrière la question qu’ils lui posent leur détermination pour ne pas le laisser continuer, on comprend que ça risque de chauffer pour Jésus s’il n’arrive pas à donner une bonne justification à son comportement.
Par quelle autorité fais-tu cela ? Ou alors qui t’a donné cette autorité pour le faire ? » J’admire l’attitude de Jésus. Il n’entre pas dans la polémique, il ne cherche pas à se justifier, il fait preuve d’une malicieuse sagesse : vous m’avez posé une question, à mon tour, je vais vous poser une seule question et si vous me répondez, je vous dirai par quelle autorité je fais cela ! Evidemment, Jésus ne pose pas n’importe quelle question, il en pose une qui met ses détracteurs dans un terrible embarras les empêchant de répondre. Ils disent à Jésus : « Nous ne pouvons pas te répondre ! » Alors Jésus leur dit : « Eh bien, moi, je ne vous répondrai pas ! » Oui, Jésus est vraiment la sagesse incarnée !
De cette sagesse, nous en avons aussi bien besoin pour affronter tant de situations compliquées dans nos vies. Alors, bonne nouvelle pour nous : l’Esprit-Saint, que nous avons reçu, ne demande pas mieux que de pouvoir déployer ses dons en nous et parmi tous ces dons, il y a celui de la sagesse. N’hésitons donc pas à solliciter, à invoquer le Saint-Esprit, présent en nous. Je sais que, personnellement, quand je me retrouve dans une situation difficile, particulièrement quand on me pose une question difficile, j’essaie de faire très vite appel à l’Esprit-Saint, dans une courte prière intérieure. Et, l’ayant appelé, je lui fais confiance, c’est-à-dire que je commence à répondre même si je ne sais pas encore tout à fait comment répondre, dans ces moments-là, je crois que l’Esprit-Saint m’éclairera et, de fait, je me rends compte qu’au fur et à mesure que je parle, je fais l’étonnante expérience de trouver les mots justes pour répondre.
Une fois, j’en parlais avec un prêtre, grand ami du Saint-Esprit et je lui disais que je regrettais de ne pas avoir de stylo pour noter ce que je disais parce que ça me paraissait tellement bien ! Attention, je ne dis pas que j’étais content de moi, mais j’étais content du Saint-Esprit, des mots lumineux qu’il m’avait inspirés ! Et ce prêtre m’a répondu : ne cherche surtout pas à redonner cette réponse une autre fois, à une autre personne, c’est la réponse que le Saint-Esprit t’a soufflée pour cette personne devant toi, à ce moment précis. Et il te soufflera d’autres paroles lumineuses quand tu seras, plus tard, devant d’autres personnes. Vivons dans la confiance, la sagesse ne nous manquera jamais puisque l’Esprit-Saint ne nous manquera jamais. Il suffit de l’invoquer pour qu’il puisse déployer ses dons.
Evidemment, ce que je suis en train de dire ne signifie pas que l’Esprit-Saint fera les choses à notre place, qu’il n’est plus nécessaire de se former, de travailler puisqu’il nous donnera les bonnes réponses au bon moment. Non, l’Esprit-Saint ne fera jamais rein à notre place ! Mais, comme le dit St Paul, l’Esprit-Saint se joint à notre esprit, c’est-à-dire qu’il va l’illuminer, le bonifier pour que nous puissions donner la bonne parole au bon moment pour la bonne personne.
C’est finalement le très beau témoignage que nous laisse St Justin que nous fêtons aujourd’hui. Dans sa vie, nous voyons de manière lumineuse, comment l’Esprit-Saint s’est joint à son esprit, pour le conduire à la vérité et pour qu’il puisse, à son tour, conduire à la vérité tous ceux qui étaient en quête de Sagesse. Il est mort martyr au milieu du 2° siècle. Ses parents étaient des païens très aisés qui lui firent faire des études très poussées. Justin, à la recherche de la sagesse, va assez naturellement se passionner pour la philosophie.
Mais, dans ses dialogues avec les philosophes de son temps, il va rester sur sa faim car la plupart ne lui parlent pas de Dieu. En fréquentant les platoniciens, il pensait avoir trouvé la doctrine solide et exaltante qu’il cherchait. Mais une rencontre avec un chrétien va l’obliger à aller plus loin, à réorienter sa recherche. Il comprend peu à peu que la vérité, la sagesse qu’il cherchait depuis toujours, seul le Christ pouvait les lui donner. A trente ans, il devient donc chrétien sans rien renier de sa passion pour la philosophie, mais conscient que l’esprit humain ne pourra pas atteindre la sagesse s’il n’est pas illuminé par l’Esprit-Saint. Il va donc commencer une belle carrière d’enseignant, fondant des écoles de philosophie à Ephèse puis à Rome.
Mais sa mission va être brutalement stoppée puisque l’empereur Marc-Aurèle commence une grande persécution. Justin va être arrêté, avec d’autres chrétiens, parce qu’il refusait de sacrifier aux dieux païens. Ce matin, à l’office des Lectures, nous lisions une partie du compte-rendu de son interrogatoire par un préfet romain. Voiclà ce qu’il disait :
« Écoute, toi que l’on dit savant et qui t’imagines posséder les doctrines véritables : Si tu es fouetté puis décapité, crois-tu que tu vas monter au ciel ?
Justin lui répond : J’espère que j’y aurai ma demeure, si je supporte tout cela. Je sais que, pour tous ceux qui auront bien vécu, la récompense de Dieu est réservée jusqu’à la destruction de l’univers. Le préfet reprend : Tu supposes donc que tu monteras au ciel pour recevoir de belles récompenses ? Et la réponse de Justin est magnifique : Je ne le suppose pas, mais je le sais avec certitude et j’en suis convaincu.
Nous admirons le très beau travail de l’Esprit-Saint dans son cœur et dans son intelligence ! Et nous demandons, par l’intercession de Notre Dame de Laghet, la grâce de nous livrer, nous aussi, à ce travail puisque l’Esprit-Saint veut se joindre à notre esprit pour nous donner, en toute circonstance, la Sagesse.