14 août 2022 : 20° dimanche ordinaire. Jésus ne se serait-il pas trompé de papier en prononçant ce discours ?

Quand on est un homme public et que l’on se prépare à prononcer un important discours, il est habituellement plus prudent de demander à quelqu’un de relire ce que l’on pense dire, ça évite d’utiliser des mots qui pourraient être mal compris. Dans le même étant d’esprit, on m’avait raconté qu’un grand prof de la faculté catholique de Lyon faisait toujours relire ses cours à sa mère en lui demandant de souligner ce qui lui paraissait trop compliqué. Ainsi, il était sûr que ses élèves pourraient facilement comprendre ce qu’il cherchait à expliquer.

Si Jésus avait procédé de cette manière, je pense que celui ou celle qui aurait relu les paroles que nous venons d’entendre, les aurait soulignées en rouge en mettant en marge : es-tu sûr que c’est bien ce que tu voulais dire ? Elles sont surprenantes, en effet ces paroles : « Croyez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division ! » Nous penserions assez spontanément l’inverse : Jésus est venu apporter la paix et non la division. C’est pour cela que je signalais qu’un correcteur de son discours aurait souligné ces paroles en rouge.

Pour comprendre ce que Jésus veut nous dire, il nous faut remonter un peu plus loin dans le discours et réentendre le début de cet évangile. Jésus nous parle de feu et de Baptême, il dit qu’il est venu apporter un feu et qu’il lui tarde de voir ce feu enfin allumé, mais on comprend que ce feu ne pourra pas être allumé tant qu’il n’aura pas reçu un baptême. Que signifient ces paroles quand même un peu énigmatiques ? Le feu, qu’il est venu apporter, c’est bien sûr le feu de l’Esprit. Et si Jésus est impatient de voir ce feu brûler dans tous les cœurs, c’est parce qu’il sait que le feu de l’Esprit est puissant. 

Quand on voit du bois mort, on peut penser que ce bois n’a plus d’avenir, qu’il ne servira à rien. Mais, ce bois, si vous le mettez au contact du feu, il va être capable de réchauffer, d’éclairer. Quand nous nous regardons, à certains moments de notre vie, nous pouvons penser que nous ressemblons à du bois mort, nous avons l’impression de ne plus valoir grand chose, de ne plus avoir beaucoup d’avenir. C’est vrai qu’il y a des moments où lucidement, nous pouvons reconnaître que notre vie n’est plus brillante. Cette impression d’être comme du bois mort qui encombre le terrain nous démoralise. Nous essayons bien de nous secouer de temps en temps, mais ça ne dure pas, nous retombons toujours. Dans ces moments-là, seul le feu de l’Esprit peut nous transformer. Par nous-mêmes, nous n’arriverons jamais à nous en sortir. Mais si nous acceptons de nous livrer à la puissance de l’Esprit, alors nous devenons capables de réchauffer les autres en leur apportant de l’amour, alors que nous nous pensions complètement à sec ; voilà que nous devenons capables d’éclairer les autres alors que nous étions, nous-mêmes, complètement dans la nuit. Voilà le miracle que produit l’Esprit-Saint dans le cœur de ceux qui acceptent de le laisser agir. Dans ces conditions, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi Jésus est si impatient de voir le feu de l’Esprit brûler dans tous les cœurs. Lui qui s’est fait si proche des gens les plus abattus, les plus en difficulté, il sait bien qu’avec le feu de l’Esprit, ils pourraient repartir. Oh, l’Esprit-Saint ne vient pas tout régler de manière magique dans nos vies, mais il nous donne l’énergie de nous relever, de repartir. C’est pour cela que Jésus est si impatient de voir l’Esprit-Saint répandu dans le monde.

Mais, dit Jésus, pour que l’Esprit-Saint soit répandu, il faut, au préalable, que, Lui, il reçoive un baptême, c’est à dire, il faut qu’il accepte de donner sa vie. St Jean le montrera bien dans son évangile, quand Jésus meurt sur la croix, il écrit que Jésus rend l’esprit. On peut l’écrire de deux façons différentes, il rend l’esprit avec un petit « e », c’est à dire qu’il rend son dernier souffle ou bien il rend l’Esprit avec un « e » majuscule, c’est à dire qu’il envoie le souffle de l’Esprit-Saint. C’est en donnant sa vie que Jésus peut donner l’Esprit qui est le don suprême. Voilà pourquoi, même si la perspective de la mort peut l’effrayer, comme elle peut effrayer tout être humain, Jésus attend ce moment pour que l’Esprit-Saint puisse être répandu et accomplir ce miracle étonnant : transformer le bois mort des vies apparemment vouées à l’échec, au non-sens en feu capable de réchauffer et d’éclairer.

Avec ces quelques explications, voilà une partie de l’évangile, je l’espère, qui devient plus clair et aussi plus parlant pour nos vies. Mais ça n’explique encore pas cette parole mystérieuse que je citais au début : « Croyez-vous que je sois venu mettre la paix sur la terre ? Non, je vous le dis, mais plutôt la division ! » Mettons cette parole en lien avec ce que nous venons de découvrir. En nous donnant l’Esprit-Saint, Jésus nous dit qu’il ne nous apportera pas la tranquillité. Ceux qui veulent avoir la paix, au sens de pouvoir rester tranquilles, ne doivent surtout pas se livrer à l’Esprit-Saint ! Comme le feu transforme le bois mort, l’Esprit-Saint va forcément nous transformer. Il va faire de nous des témoins de l’Evangile et quand on devient témoin de l’Evangile, l’objectif dans la vie, ça ne peut plus être le farniente au bord d’une piscine avec un pastis bien frais ! Une fois de temps en temps, surtout pendant les vacances, ça ne fait pas de mal, mais ça ne peut pas être l’objectif d’une vie. Nous avons entendu dans la 1° lecture que le prophète Jérémie a connu pas mal d’ennuis, tous ceux qui répondent à l’appel de Dieu connaissent un jour des difficultés. C’est ce que Jésus veut dire en annonçant les divisions dans les familles. Ça ne signifie surtout pas que Jésus veut apporter la zizanie, la zizanie, c’est l’œuvre du diable ! Non, mais Jésus prévient que quand on choisit de vivre en témoin de l’Evangile, ça risque de ne pas plaire à tout le monde et que certains, même dans nos familles, nous le feront remarquer et parfois même nous ferons payer nos choix par une dérision permanente, une critique blessante tout cela pouvant aller jusqu’à un éloignement.

Mais alors me direz-vous, si telle est la condition des témoins de l’Evangile, mieux vaut appliquer le célèbre adage : pour vivre heureux, vivons cachés ! Un certain nombre le pensent, mais quand on est habité par le Feu de l’Esprit, ce n’est pas possible de vivre ainsi. Et, quand on ose, quand on vit en véritable témoin de l’Evangile, le feu de l’Esprit qui brûle dans notre cœur finit toujours par gagner les cœurs de ceux qui nous entourent. Seigneur, mets en nos cœurs le désir de nous livrer au feu puissant de ton Esprit pour que nous puissions devenir de vrais disciples-missionnaires, capables de tenir malgré les oppositions en croyant qu’ultimement nos vies finiront par faire signe. 

Cette publication a un commentaire

  1. Adéline

    Amen !
    Très bon dimanche P. Hébert… Et bonne fête de St Maximilien Kolbe, qui a vécu concrètement cette « division » pour l’Amour.

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