15 mai : lundi 6° semaine de Pâques Lydie, Ste patronne de tous ceux qui ne veulent pas tomber dans la procrastination

Très bonne 1° lecture pour commencer cette retraite ! Vous savez que nous allons monter sur les épaules des géants de l’Evangélisation, j’en dirai un peu plus dans l’introduction en soirée, mais je peux déjà vous dire que nous allons évoquer un certain nombre de figures des Actes des Apôtres. Je n’avais pas prévu de vous parler de Lydie et, de fait, je me rends compte que ça manquait de femmes dans ma galerie de portraits ! Eh bien, la liturgie me permet de réparer cet oubli et de m’arrêter sur cette belle figure.

D’abord il faut souligner un événement extrêmement marquant, à côté duquel, une lecture pas assez documentée du livre des Actes risquerait de nous faire passer. Quand je parle de la rencontre entre Pierre et Corneille qui a eu lieu à Césarée, j’aime bien dire : c’est ici que nous sommes nés parce que c’est là que les portes de la foi se sont ouvertes pour nous, les païens. Eh bien, nous pourrions reprendre cette même expression en évoquant le baptême de Lydie dans cette ville de Philippe. Tous les chrétiens du monde ne pourraient pas en dire autant, mais, nous, les européens, nous pouvons le dire. Le premier chrétien d’Europe est une chrétienne et c’est Lydie ! En effet, dans son 1° voyage missionnaire, Paul avait sillonné l’Asie Mineure, mais, là, au début de ce 2° voyage, il pousse plus loin et se retrouve dans les territoires qui appartiennent, aujourd’hui, à l’Europe. Paul n’a sûrement pas eu conscience de franchir les limites d’un continent, mais nous, quand nous relisons ces textes, nous constatons que tel a été le cas. En nous rapportant le baptême de Lydie, cette 1° lecture nous a donc permis d’assister en direct à la naissance de l’Europe chrétienne.

Revenons à Lydie, c’est donc à Philippe qu’elle va rencontrer Paul et se convertir au christianisme. Lydie n’est pas originaire de Philippes, elle est sûrement venue pour vendre ses tissus puisque, nous dit-on, elle est marchande de pourpre, originaire de Thyatire qui était la capitale du beau tissu de l’époque, c’est l’une des villes destinataire d’une lettre de l’Apocalypse. Lydie est donc une petite chef d’entreprise, ce n’est pas courant à l’époque et on va voir qu’elle a vraiment l’esprit de décision caractéristique des chefs d’entreprise ! Si elle est venue à Philippes, c’est que, dans cette ville, il y a pas mal de débouchés pour écouler sa marchandise. La lecture des Actes mentionnait que c’était une colonie romaine et comme c’est une ville agréable, les militaires qui arrivaient à la retraite s’y installaient volontiers. Avec leur solde assez confortable, ils pouvaient acheter de beaux tissus … enfin ce sont surtout les épouses qui le faisaient en pratiquant le lèche-vitrine de l’époque !

Dans cette ville, il y a tellement peu de juifs qu’il n’a pas été possible d’ériger une synagogue. En effet, il faut au moins 10 hommes pour qu’une synagogue soit construite. Et là, il n’y a pas de synagogue, signe qu’il n’y a même pas 10 juifs croyants. Cela, on peut le comprendre en lisant de près ce récit des Actes. Quand Paul arrive dans la ville, comme il a encore l’habitude de le faire, il veut commencer par parler aux juifs, il cherche donc le lieu où ils se réunissent, habituellement, il allait à la synagogue, mais là, on nous dit qu’il va au bord de la rivière. C’est ce lieu qui lui a été indiqué réunissant quelques femmes qui se retrouvaient pour prier. Dans cette ville, il n’y a donc même pas 10 hommes juifs, ce qui aurait permis d’ouvrir une synagogue, il y a juste quelques femmes et encore, elles ne sont pas toutes juives, puisque Lydie est désignée comme « adorant le Dieu unique » c’est à dire qu’elle appartenait à cette catégorie qu’on appelait les « craignants Dieu » ou les « prosélytes » qui partageaient la foi en un Dieu unique mais qui n’avait pas totalement embrassé la religion juive et toutes ses prescriptions.

Lydie est attentive aux paroles de Paul nous dit le texte, en précisant que Dieu avait « ouvert son cœur », la traduction liturgique parle d’ouverture de son esprit, c’est dommage parce que le texte grec parle de l’ouverture de son cœur. Pourquoi c’est important ? Tout simplement parce que dans la Bible, le cœur, c’est le lieu dans lequel se prennent toutes les décisions importantes. Pour que Lydie décide de se convertir, ce n’est donc pas d’abord son intelligence qui avait besoin d’être touchée mais son cœur. Il en va encore ainsi aujourd’hui, la conversion commence toujours par une ouverture du cœur, l’intelligence viendra après.

Lydie se convertira ce jour-là parce que Dieu avait déjà commencé un travail en elle depuis bien longtemps. Elle s’était déjà éloignée des superstitions païennes pour embrasser la foi au Dieu unique, son cœur était mûr pour accueillir la prédication de Paul. Elle est tellement bien préparée qu’après les paroles de Paul, elle veut tout de suite recevoir le Baptême … c’est une chef d’entreprise, une femme de décision, quand c’est le moment, c’est le moment ! Et elle va montrer encore son tempérament de feu par un autre détail que nous révèle le livre des Actes : Il nous est dit que toute sa maison va être baptisée aussi. Elle a tout de suite été voir les siens, familles et serviteurs pour leur annoncer la Bonne Nouvelle et elle a dû y mettre tellement de conviction que tous vont se faire baptiser. Pas plutôt baptisée, elle évangélise, quelle énergie ! 

Et ce n’est pas fini, elle va arriver à convaincre Paul de venir chez elle, ce qui est un exploit. On sait, en effet, que, habituellement, Paul préférait subvenir à ses besoins. Il acceptera de loger par exemple chez Priscille et Aquilas parce qu’il sait qu’il peut payer sa pension par son travail. Mais là, Paul va déroger à la règle qu’il s’est fixé, pouvait-il faire autrement ? Lydie ne lui laisse pas tellement le choix : puisque vous estimez que je crois au Seigneur, venez loger chez moi ! Ce que femme veut, Dieu le veut !

Avec Lydie, comme vous le constatez, ce n’est pas une évangélisation mollassonne que nous découvrons ! Je ne sais pas si Sainte Lydie est patronne de quelque chose, ce qui est sûr, c’est qu’elle n’est pas la patronne de la procrastination ! S’il y en a une qui ne remet pas au lendemain ce qu’elle peut faire le jour-même, c’est bien elle ! Avant sa conversion, elle avait déjà du tempérament, le fait d’être femme et chef d’entreprise, le prouve, on imagine ce qu’elle a pu devenir après sa conversion en étant habitée par l’énergie de l’Esprit-Saint ! Cette femme d’énergie devait plaire à Paul. D’ailleurs Paul retournera la voir. Demain, nous verrons que, une nouvelle fois, son séjour va tourner au vinaigre, il va être emprisonné à Philippe, libéré miraculeusement de manière rocambolesque puis libéré pour de bon par les autorités à qui il tient tête, à la sortie qui va-t-il voir pour raconter tout ça ? Lydie, bien sûr ! Hélas, la lecture s’arrêtera avant de nous montrer Paul se jouant des autorités et retournant chez Lydie.

Dès le début de cette retraite, nous pouvons donc demander l’intercession de Lydie pour qu’elle nous obtienne de devenir, comme elle, disciple-missionnaire. Oui, que par son intercession, nous soyons revêtus de l’Esprit-Saint, cet Esprit sans lequel, comme le dit Jésus dans le texte d’Evangile, nous ne pourrons pas devenir de vrais témoins. Témoin, vous le savez, en grec, ça se dit martyr, le vrai témoin, c’est donc celui qui va jusqu’au bout. Nous n’aurons sans doute pas à donner notre vie dans le martyr du sang, comme tant de chrétiens le font dans le monde, mais nous avons à être des témoins-martyrs, c’est-à-dire des chrétiens qui vont jusqu’au bout. Que par l’intercession de Sainte Lydie, l’Esprit-Saint fasse de nous des témoins désireux d’aller jusqu’au bout fuyant toute attitude qui ressemblerait à de la procrastination.

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