2′ février : discussions stérile et démons jumeaux

Je vous propose que nous nous arrêtions sur deux points qui ont retenu mon attention dans l’Evangile que nous venons d’entendre.

Le premier point, c’est de repérer que lorsque Jésus descend de la montagne où il vient de vivre la Transfiguration, il voit un attroupement et, chose peu habituelle, il constate que les apôtres qui n’étaient pas avec lui sur la montagne discutent avec les scribes. Et il semble bien que ce ne soit pas l’une de ces discussions houleuses dont Jésus a tant l’habitude puisque, dans l’évangile de Marc, ce sont les scribes qui viennent le plus souvent l’attaquer. Le calme de cette discussion entre les apôtres et les scribes étonne Jésus et je pense que c’est pour cela qu’il les interroge : « De quoi discutez-vous avec eux ? » Il est curieux de savoir ce qui se passe, parce que, d’habitude, entre lui et les scribes, c’est plutôt houleux.

Il ne va pas obtenir de réponse à sa question ou du moins pas une réponse directe. C’est le père de l’enfant qui va répondre en expliquant : « Maître, je t’ai amené mon fils, il est possédé par un esprit qui le rend muet. » Nous reviendrons sur ce démon qui rend muet. Mais pour l’instant restons encore sur cette discussion entre les scribes et les apôtres. La suite du texte va nous apprendre que ce père qui est tellement désemparé devant la souffrance de son fils avait amené ce fils vers les apôtres pour qu’ils le guérissent. Il avait sûrement cherché Jésus, mais Jésus était sur la montagne avec Pierre, Jacques et Jean, donc il s’était rabattu sur les apôtres. Peut-être avait-il entendu dire que les apôtres, eux aussi, expulsaient les démons. Nous en avons une mention, dans ce même évangile de Marc, l’évangile dit que, après avoir été envoyés en mission par Jésus : « Ils partirent, et proclamèrent qu’il fallait se convertir. Ils expulsaient beaucoup de démons, faisaient des onctions d’huile à de nombreux malades, et les guérissaient. »

J’oserais donc dire que guérir, expulser les démons, ils savaient faire. Mais là, ça n’a pas marché. Et, ce qui est assez étonnant, c’est que tout cela, l’échec de la guérison-exorcisme, la discussion entre scribes et apôtres va exaspérer Jésus qui dira : « Génération incroyante, combien de temps resterai-je auprès de vous ? Combien de temps devrai-je vous supporter ? » Et, à la fin de l’évangile, il révèle pourquoi ça n’a pas marché : les apôtres n’ont pas assez prié, cette espèce de démon, seule la prière peut en venir à bout.

Ce que Jésus reproche à ses apôtres, c’est d’avoir pris confiance en eux. Ils sont déjà parvenus à guérir et expulser des démons, quand on leur a amené cet enfant, ils n’ont pas hésité un seul instant et ça c’est bien, mais ce qui n’est pas bien, c’est que, pour accomplir le miracle demandé, ils se sont appuyés non pas sur la puissance de Dieu mais sur leur réussite précédente pensant qu’elle leur avait donné un savoir-faire. En descendant de la montagne, Jésus remet les pendules à l’heure et leur dit : ce n’est pas par des discussions stériles avec les scribes que vous allez régler ce problème, mais par la prière.

Il peut être bon de retenir cette leçon pour nous aujourd’hui. Quand nous sommes confrontés à des problèmes qui nous dépassent, ce ne sont pas d’interminables discussions qui vont nous aider à en sortir mais un surcroit de prière. Ce qui ne veut pas dire qu’il ne faudra pas discuter, mais cet évangile nous rappelle, de manière salutaire, que la discussion ne pourra apporter un bienfait que si elle est accompagnée d’une vraie prière et que, dans ces cas-là, il faut bien choisir ses interlocuteurs !

Venons-en maintenant au 2° point que je veux retenir, c’est la qualification de ce démon, il nous est dit que cet enfant était possédé par un démon qui rend muet. C’est vraiment une bénédiction d’entendre ce texte à l’avant-veille de notre entrée en carême. Parce que ce démon qui rend muet, puisque Jésus l’a expulsé de cet enfant, désormais, il cherche d’autres personnes chez qui il pourrait accomplir son œuvre de mort … et c’est bien souvent chez nous qu’il trouve refuge avec son frère jumeau, le démon qui rend bavard !

C’est vrai que, lorsque nous sommes entre nous, c’est souvent un autre démon qui fait ses ravages, un démon qui rend bavard et médisant ! A cause de la fête de la chair de St Pierre, nous n’avons pas lu, samedi, le passage de la lettre de St Jacques qui nous interroge tellement : comment un tout petit organe comme la langue peut-il nous faire faire de si gros péchés ? Oui, entre nous, il y a un démon redoutable, c’est le démon qui rend bavard. Mais, au confessionnal, ce démon passe le flambeau à son frère jumeau, un démon tout aussi redoutable puisqu’il rend muet ! A chaque fois que nous nous confessons mal en utilisant des périphrases pour adoucir ces péchés qui nous font honte, à chaque fois que nous ne disons pas tout par lassitude de devoir confesser toujours les mêmes écarts qui nous humilient et pire encore, à chaque fois que nous ne nous confessons pas ou que nous remettons à plus tard notre confession, nous nous laissons dominer par cet esprit qui rend muet.

Et nous devrions particulièrement nous méfier de la puissance de ce démon parce que l’évangile ne cache rien de sa puissance de nuisance. Ecoutons encore ce dont il est capable : « il jette par terre, celui qu’il possède se met alors à écumer, grincer des dents et devenir tout raide. Il jette dans le feu ou dans l’eau pour faire périr. » Voilà ce qui nous arrive, au bout d’un moment, à ceux qui se confessent mal, pas assez souvent voire plus du tout. Tous ces signes qui parlent de l’épilepsie peuvent aussi être lus de manière symbolique et parler de nos colères, de nos emportements, de nos conduites désordonnées, tout cela nous conduisant à une mort à petit feu et à un éloignement progressif de notre entourage.

Retenons bien les méfaits de ces 2 démons jumeaux : celui qui rend trop bavard et celui rend muet et rappelons-nous que seule la prière en vient à bout puisqu’elle nous conduira à une confession en vérité qui, seule, pourra être libératrice.

Cette publication a un commentaire

  1. wilhelm richard

    comme les deux démons jumeaux sont vulgaires, ils se répondent en disant : « vos gueules, les muettes ! »

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