Hier, en raison de la fête de la Présentation, nous n’avons pas lu la lecture de l’Apocalypse qui nous parlait d’un rouleau scellé, le livre de vie qui contenait l’explicitation du dessein bienveillant de Dieu. Dans la lecture d’aujourd’hui, il est toujours question d’un livre, mais, comme nous sommes 5 chapitres plus loin, c’est donc d’un autre livre dont il s’agit qui, bien évidemment, n’est pas sans rapport avec ce premier livre. Le texte nous parle, cette fois-ci, d’un petit livre qui n’est plus entre les mains de Dieu, lui-même, mais d’un ange. Il est présenté́ à Jean avec cette invitation : Va prendre le livre ouvert dans la main de l’ange … Prends, et dévore-le.Ceux qui sont familiers des Ecritures reconnaissent tout de suite dans cette invitation l’invitation qui était faite, naguère, au prophète Ezéchiel au chapitre 3 : Fils d’homme, mange ce qui est devant toi, mange ce rouleau, et va parler à la maison d’Israël. Ce livre, bien sûr c’est le livre de la Parole de Dieu et, d’ailleurs, on se rend compte qu’il a la même saveur pour Jean que pour Ezéchiel : dans la bouche, il est doux comme du miel. Mais l’Apocalypse précise tout de suite que, si dans la bouche, il est doux comme du miel, dans les entrailles, il a goût d’amertume. Le chapitre 3 d’Ezéchiel ne le disait pas aussi explicitement, pourtant, très vite, le prophète allait découvrir que cette Parole n’est pas qu’une sucrerie agréable, elle l’obligeait aussi à prophétiser, au nom de Dieu, en annonçant des événements douloureux et ces annonces ne plaisaient pas à tout le monde ce qui a rendu la vie du prophète plus difficile que celle d’un vendeur de sucreries !
Comme le texte d’aujourd’hui ne comporte aucun symbole compliqué à décrypter, nous pouvons rester sur cette invitation que nous adresse la lecture à nous nourrir de la Parole car, au-delà des siècles, c’est bien à nous que s’adresse l’invitation de l’ange.
Le père Yves Saoût, celui a écrit le livre intitulé : Je n’ai pas écrit l’Apocalypse pour vous faire peur et qui a été missionnaire en Amérique latine, raconte cette anecdote terrible. Un jour, une mère de famille, d’un pays très pauvre, est venue le voir pour lui demander conseil. Elle lui raconte que son fils est rentré de l’école en étant terrorisé ; des camarades voulaient le forcer à entrer dans leur groupe religieux qui avait toutes les allures d’une secte. Pour lui mettre la pression, ils lui ont dit : Si tu ne viens pas chez nous, tu recevras sur ton front la marque de la bête » le fameux 666. On imagine la terreur de ce jeune : se réveiller un matin, avec cette marque indélébile sur son front, quelle horreur ! Eh bien, voilà ce qui arrive quand on quitte les Evangiles et aussi l’Eglise et qu’on se met à la remorque de pseudo-prophètes qui semblent citer les Ecritures mais qui, en fait les utilisent sans les connaître vraiment. Ce que je dis maintenant n’est plus dans le livre du père Saoût, mais moi, j’aurais proposé cette réponse pour cette maman et son fils. Il n’a qu’à leur répondre : même pas peur ! J’ai déjà une marque indélébile sur mon front, c’est celle qui m’a été donnée le jour de mon Baptême avec l’onction du Saint-Chrême ! La Bête ne pourra donc rien écrire car la place est prise et cette onction est indélébile !
Cette histoire nous montre l’importance de nous nourrir de la Parole de Dieu, une Parole lue en Eglise, qui est là pour nous livrer le dessein bienveillant de Dieu. S’éloigner de la Parole c’est prendre un grand risque que Paul décrit très bien dans la lettre aux Ephésiens : nous risquons de devenir comme des petits enfants, nous laissant secouer et mener à la dérive par tous les courants d’idées, au gré des hommes qui emploient la ruse pour nous entraîner dans l’erreur. Eph4,14 Continuons ! Vous aurez remarqué que l’ange donne un ordre très particulier à Jean, il ne lui dit pas comme à Ezéchiel : mange la Parole, il lui dit : dévore cette Parole ! Quand la Parole ne nous dit rien, ne nous nourrit pas, demandons-nous si nous la mangeons avec suffisamment d’appétit !
Alors peut-être que certains diront : oui, mais moi, je n’ai pas vraiment de goût à lire la Parole, je n’ai pas beaucoup d’appétit pour me laisser nourrir par la Parole. Vous savez ce qu’on dit : l’appétit vient en mangeant ! Au début, peut-être faudra-t-il se forcer un peu et ensuite, on y prend vite goût !
Le problème, c’est qu’avec ce que nous dit l’Apocalypse, on pourrait redouter les effets que produit la Parole puisque l’Ange prévient qu’elle laissera dans nos entrailles un goût d’amertume.
D’où vient cette amertume dans les entrailles ? Je vois deux raisons essentielles :
- La 1°, c’est qu’en méditant sérieusement la Parole, je mesure de plus en plus l’écart qu’il y a entre ce que je vis réellement et ce que la Parole me propose de vivre. Et ce qui me désole, c’est de constater que ma conversion se vit au rythme de la comptine des enfants : trois pas en avant, trois pas en arrière, trois pas sur l’côté, 3 pas d’l’autre côté !
- La 2° raison, c’est qu’en méditant sérieusement la Parole, je mesure de plus en plus l’écart qu’il y a entre ce que le monde vit et ce que la Parole l’invite à vivre pour parvenir au Bonheur … cet écart est encore plus grand que celui que je constatais dans ma vie ! Et ce qui me désole, c’est de voir qu’il y a tant de gens qui semblent ne pas avoir d’appétit pour se nourrir de la Parole alors qu’ils se fatiguent et s’appauvrissent à courir après ce qui, non seulement les nourrit pas, mais, plus grave, les détruit, les dessèche.
Si nous refusons de nous installer dans la moyenneté selon le conseil entendu mardi, l’amertume disparaitra peu à peu et la Parole deviendra de plus en plus savoureuse, elle fera son œuvre en nous et nous conduira, à l’image de Ste Cécile à pouvoir chanter l’amour du Seigneur, même dans les situations les plus extrêmes de nos vies.
Par l’intercession de Notre Dame de Laghet demandons au Seigneur de venir purifier notre cœur, comme il a purifié le Temple pour que sa Parole puisse devenir savoureuse et porter du fruit dans nos vies.