Un mot sur la 1° lecture qui nous a fait entendre la fin du livre d’Amos. Hier, ceux qui ont pu participer à la messe, hier, ont pu entendre les versets qui précédaient le texte d’aujourd’hui et qui permettent de comprendre à quoi fait allusion le prophète quand il dit : « Ce jour-là. » Hier, donc, le prophète annonçait un grand ménage que le Seigneur, allait entreprendre, un ménage assez terrifiant d’ailleurs : Dieu a décidé de ne plus laisser subsister ceux qui sont à l’origine des problèmes que rencontrent le peuple, c’est-à-dire, le roi et sa cour, ainsi que tous ceux qui ne sont pas ancrés dans la fidélité à la Loi. Tout cela était, bien sûr, annoncé dans le style prophétique de l’époque. Aujourd’hui, quand nous lisons ces textes, nous comprenons que Dieu, parce qu’il veut le bonheur de son peuple va devoir agir comme un bon médecin. Quand le malade souffre d’une infection due à une vilaine plaie, le médecin doit commencer par nettoyer cette plaie et c’est souvent très douloureux, mais sans cette désinfection en profondeur, il ne peut y avoir d’espoir de guérir. C’est ce que Dieu va faire et il prévient donc que ça ne sera pas agréable. Mais quand, enfin, tout sera bien nettoyé, alors, comme le dit le texte d’aujourd’hui : « Ce jour-là » commencera une ère nouvelle que les belles promesses entendues laisse entrevoir.
Dans notre vie, nous avons régulièrement à nous laisser nettoyer, désinfecter du péché qui risque de provoquer une infection généralisée et de tout gâter dans notre vie. Ce moment de la désinfection n’est jamais franchement agréable, nous nous en rendons bien compte parce que, dans ces moments-là, il faut se faire un peu violence pour aller se confesser. Mais, quand nous avons accepté l’opération désinfection, alors, toutes les promesses annoncées par Amos dans la lecture d’aujourd’hui sont aussi pour nous. Je vous inviterai donc à les relire tranquillement, dans cette perspective, pour mieux les savourer.
Passons à l’Evangile, i faudrait beaucoup de temps pour commenter cette controverse sur le jeûne. Je ne veux retenir que quelques points pour nourrir notre méditation.
1° point : La question des disciples de Jean-Baptiste, telle qu’elle est formulée est quand même étonnante. Ces disciples ne commencent pas par dire : pourquoi tes disciples ne jeûnent-ils pas alors que nous, nous jeûnons ? Mais ils disent : Pourquoi nous jeûnons, alors que tes disciples ne jeûnent pas ? J’espère que vous avez entendu la différence ! C’est un peu comme s’ils venaient voir Jésus pour lui dire : nous ne comprenons pas bien ce que vous refusez de faire mais nous ne comprenons pas plus ce que, nous, nous faisons ! Je ne veux pas trop durcir ce point parce qu’il peut y avoir par derrière une tournure sémite que le grec a eu du mal à transcrire. Mais quand même, la manière dont la question est formulée m’intéresse parce qu’elle doit nous aider à nous poser une bonne question : et nous, est-ce que nous comprenons toujours le sens de ce que nous faisons ? Est-ce que nous donnons toujours assez de sens aux gestes et attitudes de la foi, aux paroles que nous prononçons dans la prière et la liturgie ? Régulièrement, nous avons besoin de nous arrêter pour nous interroger, pour redonner du sens afin que nos gestes et paroles ne deviennent pas purement et simplement des actes ritualistes qui n’ont plus d’effets sur nous.
2° point : Je trouve très intéressant la manière dont Jésus répond à la question des disciples de Jean. Il ne se lance pas dans un grand développement sur le sens du jeûne et sur la liberté qu’il pourrait avoir pour ne pas appliquer la Loi. Il part d’une exception prévue par la Loi elle-même : on ne jeûne pas dans le temps d’une fête et particulièrement le temps d’un mariage. Et vous savez sans doute qu’un mariage chez les juifs, à l’époque, ça pouvait durer 7 jours avant et 15 jours après ! C’est ce qui explique qu’on ait pu manquer de vin à Cana, il fallait prévoir pour 3 semaines et pas seulement pour une soirée ! Mais revenons à l’argumentation de Jésus que je traduis ainsi : en ne jeûnant pas, nous n’enfreignons pas la loi puisque la loi, elle-même, prévoit l’exemption du jeûne pour ceux qui participent à un mariage et de manière toute particulière pour l’époux et ses amis qui étaient chargés d’animer ces 3 semaines de fête.
C’est très intéressant parce que ça signifie que Jésus interprète sa présence au milieu des hommes, comme une fête de mariage. Il est l’époux et ses apôtres sont les amis de l’époux, des amis très importants pour la réussite de la fête, un peu comme les témoins, aujourd’hui !
C’est déjà une belle manière pour Jésus de parler de ses disciples, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui : nous sommes les amis de l’époux chargés d’animer la fête ! En effet, vivre en présence du Christ, ça devrait être une fête pleine de joie. C’est la joie qu’annonçaient les prophètes et qu’ils n’ont pas pu voir.
Et, si Jésus est l’époux, l’épouse, bien sûr, c’est l’Eglise 8 Et on peut même dire que l’épouse c’est plus largement l’humanité, puisque l’Eglise est appelée à rassembler tous les hommes. Qui dit mariage dit alliance, et nous savons que, dans presque toutes les cultures, il y a ce moment si important de la remise des alliances. Jésus est donc venu renouveler l’Alliance, c’est ce que nous disons à la messe : ceci est le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle. Ce n’est donc pas étonnant que, dans l’évangile de St Jean, le 1° signe accompli par Jésus, ait eu lieu au cours d’un mariage !
Jésus renouvelle l’Alliance, terminons en voyant ce que ça veut dire ! L’ancienne Alliance avait été scellée avec le code de l’Alliance, la Loi. Mais cette Loi a souvent été vécue comme une contrainte imposée de l’extérieur, dictant des comportements difficiles à observer. Les prophètes ont annoncé qu’un jour, la loi ne serait plus une contrainte extérieure gravée sur des tables de pierre mais qu’elle jaillirait comme un désir spontané de faire du bien, la Loi sera écrite dans les cœurs. Eh bien, voilà ce qu’accomplit Jésus, les temps nouveaux sont inaugurés !
Mais Jésus prévient que, seuls ceux qui veulent vraiment entrer dans cette nouveauté, pourront partager la joie de ces noces. Tous ceux qui ne veulent que raccommoder leurs vieux manteaux et garder leurs vieilles outres, ceux-là n’auront pas accès à la joie des noces, ils resteront empêtrés dans ces vieilles pratiques dont ils ne comprendront même plus le sens !
Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons la grâce de vouloir entrer dans cette nouveauté en acceptant d’abandonner tout ce qui doit l’être et en acceptant aussi de nous remettre entre les mains du Seigneur pour nous laisser purifier par son amour.