21 janvier : samedi 2° semaine ordinaire. On comprend mieux une expression de la messe : le sang de l’Alliance.

Hier, en commentant la citation de Jérémie que faisait l’auteur de la lettre aux Hébreux, j’ai beaucoup parlé de cette Alliance nouvelle dont le code ne serait plus une loi extérieure, mais une loi intérieure, gravée sur les cœurs. Et nous avions accueilli, avec les hébreux destinataires de cette prédication que la Bonne Nouvelle, c’était que Jésus avait scellé cette nouvelle Alliance. Et je terminais en disant que toute Alliance devait être scellée dans un sacrifice.

La première Alliance a été scellée dans un sacrifice dont la liturgie était splendide. Ensuite, quand le Temple a été construit, un nouveau rituel a été établi pour que le Grand-Prêtre puisse offrir le grand sacrifice, le jour du Yom Kippour, jour du grand pardon et pour que, ensuite les prêtres puissent offrir les sacrifices quotidiens. C’est ce grand sacrifice du Yom Kippour qui était évoqué dans l’extrait de la lettre aux Hébreux que nous avons entendu aujourd’hui. Vous savez que c’était le seul jour où le Grand-Prêtre pouvait entrer dans le Saint des Saints, c’est-à-dire la partie la plus sainte du Temple. Et c’est donc là, qu’une fois par an, en ce jour du Yom Kippour, jour du Grand Pardon, le Grand-Prêtre osait murmurer le nom de Dieu, ce nom qu’habituellement, on ne prononçait jamais. En murmurant ce nom, il implorait le pardon pour le peuple et procédait ensuite au rite du « bouc émissaire. » C’est-à-dire qu’il chargeait symboliquement un bouc de tous les péchés du peuple un bouc. Et, tout aussi symboliquement, il chassait ce bouc au désert pour attester que le peuple était délivré de ses péchés, c’est alors qu’il aspergeait le peuple du sang d’animaux offerts en sacrifice pour leur signifier le pardon accordé par Dieu. 

Ce jour du Yom Kippour, les sacrifices effectués étaient donc très importants puisqu’ils permettaient le renouvellement annuel de l’Alliance. C’était comme si on mettait les compteurs à zéro pour mieux repartir. Et, de fait, le peuple repartait joyeusement pour un compagnonnage renouvelé avec Dieu. Mais ça ne durait que ce que durent les bonnes intentions ! C’est-à-dire que, très vite, les mauvaises habitudes revenaient et ça finissait par décourager tout le monde. C’est pour cela que tous rêvaient d’une Alliance nouvelle dans laquelle la loi serait gravée dans les cœurs, le désir du bien serait inscrit au plus profond du cœur des hommes. Et c’est justement ce que va permettre Jésus en scellant la nouvelle Alliance, mais avant de voir comment il va le permettre, posons-nous une autre question fondamentale : quel sacrifice, Jésus, puisqu’il est le Grand-Prêtre, va-t-il offrir pour sceller cette Alliance si nouvelle et si porteuse de promesses ?

Ce sacrifice, je l’ai déjà évoqué en parlant de l’offrande que Jésus allait faire de sa propre vie. Et il nous faut mesurer la puissance de ce sacrifice. C’est ce que nous invite à faire l’auteur de la lettre aux Hébreux en écrivant ces versets : « S’il est vrai qu’une simple aspersion avec le sang de boucs et de taureaux, et de la cendre de génisse, sanctifie ceux qui sont souillés, leur rendant la pureté de la chair, le sang du Christ fait bien davantage, car le Christ, poussé par l’Esprit éternel, s’est offert lui-même à Dieu comme une victime sans défaut ; son sang purifiera donc notre conscience des actes qui mènent à la mort, pour que nous puissions rendre un culte au Dieu vivant. » Voilà le sacrifice qui scelle cette nouvelle Alliance, voilà la puissance de ce sacrifice qui scelle cette nouvelle alliance. Le sacrifice de l’ancienne alliance, il était renouvelé une fois par an dans la célébration du Yom Kippour, mais le sacrifice qui scelle cette nouvelle alliance, le sacrifice du Christ, il n’a pas besoin d’être renouvelé, c’est une fois pour toutes qu’il s’est donné. Faisons bien attention, quand nous célébrons l’Eucharistie, nous ne renouvelons pas le sacrifice du Christ, nous le rendons présent, efficace et fécond. Pour le dire autrement, en reprenant la réflexion de Jean-Paul II dans son encyclique sur l’Eucharistie, la célébration de l’Eucharistie nous rend contemporains de ce sacrifice que Jésus a fait une fois pour toutes.

C’est bien ce que disent les paroles de la consécration à la messe qui reprennent les paroles prononcées par Jésus dans l’institution de l’Eucharistie. « Prenez et buvez-en tous car ceci est mon sang, le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle qui sera versé pour vous et pour la multitude en rémission des péchés. » Ce n’est plus le rite du bouc-émissaire et le sang des sacrifices qui nous obtiennent le pardon, mais le sang versé de Jésus pour sceller la nouvelle alliance : « le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle versé pour vous et pour la multitude en rémission des péchés. »

 Ce qui veut dire qu’à chaque fois que nous participons à la messe se réactualise pour nous le sacrifice du Christ et nous en recevons les bienfaits de manière renouvelée. Cela signifie qu’à chaque Eucharistie, nous sommes réintroduits dans l’Alliance. Alors, on peut vraiment le dire, Jésus est bien le Grand-Prêtre qu’il nous fallait parce qu’il est le médiateur d’une alliance meilleure, reposant sur de meilleures promesses.

Reste à savoir comment Jésus va s’y prendre pour écrire cette Loi nouvelle dans les cœurs, pour que le bien devienne un désir inscrit dans nos cœurs. Eh bien, pour écrire cette loi dans les cœurs, j’ose dire que Jésus passe la main. Il va confier ce travail au Saint Esprit. Et voilà pourquoi je peux dire cela. En Ex 31,18 il nous est dit que la Loi a été écrite par Dieu lui-même et la manière dont ça nous est rapportée est assez étonnante. Il est dit que Dieu a écrit la Loi avec son doigt sur les tables de pierre. Dieu est tellement puissant que lorsque son doigt touche la pierre, il laisse une empreinte ! Dieu peut donc écrire avec son doigt sur de la pierre et c’est comme ça que l’ancienne loi a été écrite. La nouvelle Loi, celle qui doit être écrite dans les cœurs, je vous le dis tout de suite, elle va encore être écrite par le doigt de Dieu, mais de manière totalement différente.

Le doigt de Dieu, cette expression nous fait immédiatement penser au Veni Creator et nous nous rappelons que c’est l’Esprit-Saint qui est désigné par cette image étonnante du doigt de Dieu. Le doigt de Dieu, dans la Bible, c’est donc lui qui écrit la loi sur les tables de pierre. Eh bien, désigner l’Esprit-Saint comme le doigt de Dieu, c’est une manière de nous dire que c’est lui qui va désormais écrire la Loi nouvelle, mais cette fois, il va l’écrira non plus sur des tables de pierre mais dans les cœurs des hommes. Et c’est vraiment formidable parce que ça veut dire que, même si nous cœurs sont durs comme de la pierre, ça n’empêchera pas l’Esprit-Saint de pouvoir écrire ! Jésus le Grand-Prêtre a fait beaucoup pour être le médiateur de cette Alliance nouvelle, mais il a aussi laissé une partie du travail au Saint-Esprit. Et du coup, nous comprenons pourquoi Jésus dit à ses apôtres : « il vaut mieux pour vous que je m’en aille, car, si je ne m’en vais pas, le Défenseur ne viendra pas à vous ; mais si je pars, je vous l’enverrai. » Jn 16,7 Il fallait que Jésus parte pour que l’Esprit-Saint puisse être répandu sur toute chair et qu’ainsi il puisse écrire cette loi nouvelle dans les cœurs. Et si c’est Lui qui l’a écrite, ça signifie que c’est Lui qui nous aidera à la vivre. N’oublions jamais cette si belle parole de St Augustin : Dieu donne ce qu’il ordonne. Puisqu’il nous demande de vivre dans la fidélité à cette Alliance, par l’Esprit-Saint, il nous donne la force de vivre cette fidélité.

Quelques mots sur l’Evangile d’aujourd’hui, un texte très court, mais si dramatique. Nous voyons Jésus incompris. Même si on n’est encore qu’au tout début de l’Evangile de Marc, j’ai envie de dire que Jésus y était déjà habitué. Depuis le début de son ministère, il a été confronté aux critiques de ceux qui, très vite, se sont posés en face de lui comme des adversaires. Oui, il était habitué à ne pas être compris par les scribes, les pharisiens, les docteurs de la Loi. Mais là ce ne sont plus ses adversaires qui témoignent leur incapacité à le comprendre et même à accepter ce qu’il dit ou ce qu’il fait, là ce sont les siens, ceux de sa famille. De qui s’agit-il précisément ? Marc ne le dit pas, il parle juste des « gens de chez lui. » 

La précision suffisamment floue suffit pour que nous puissions nous reconnaître dans ces quelques versets. En effet, Jésus a voulu connaître cette souffrance pour que, nous-mêmes, nous ne nous sentions pas seuls, abandonnés quand nous sommes confrontés à cette même grande souffrance d’être incompris par des gens de chez nous. Et tous, à un moment ou à un autre, nous avons été ou nous serons confrontés à cette immense souffrance. Dans cette situation pensons à Jésus qui a voulu vivre cette situation avant nous pour que nous ne nous sentions pas seuls. Prions aussi le merveilleux psaume 54 qui est la prière de quelqu’un confronté à cette situation, j’en cite quelques versets : « Si l’insulte me venait d’un ennemi, je pourrais l’endurer ; si mon rival s’élevait contre moi, je pourrais me dérober. Mais toi, un homme de mon rang, mon familier, mon intime ! Que notre entente était bonne, quand nous allions d’un même pas dans la maison de Dieu ! Pour moi, je crie vers Dieu ; le Seigneur me sauvera. Le soir et le matin et à midi, je me plains, je suis inquiet. Et Dieu a entendu ma voix, il m’apporte la paix. Il me délivre dans le combat que je menais. »

Cette publication a un commentaire

  1. Franchellin Jean Marc

    Faisons bien attention, quand nous célébrons l’Eucharistie, nous ne renouvelons pas le sacrifice du Christ, nous le rendons présent, efficace et fécond.
    C’est justement ce que j’ai réalisé il y a quelques semaines. Dans l’offertoire le prêtre dit :faites ceci en mémoire de moi. Ce sacrifice a été fait une fois pour toute par Jésus sur la croix.
    N’est-il pas rendu présent à la messe ce sacrifice de jésus sur la croix, du fait que Dieu ne peut diviniser que ce que nous avons humanisé? Si je n’ai rien humanisé dans ma semaine le sens de « ma » messe est du ressort de la « magie ».

    Je veux bien entendre des réactions pour finir de m’éclairer..

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