Nous sommes entrés dans le chapitre 8 de la lettre aux Romains. Si vous vous rappelez ce que je vous ai expliqués la semaine dernière, ce chapitre est le chapitre charnière qui va nous faire passer de la partie kérygmatique à la partie parénétique. C’est-à-dire que, après avoir entendu tout ce que Dieu a fait pour nous dans la 1° partie, nous allons forcément nous poser la question : et nous que devons-nous faire ? Ou plutôt que pouvons-nous faire pour mener une vie qui se montre digne d’un tel don ? C’est donc à partir du chapitre 12 que Paul répondra à cette question. Mais avant de répondre, il commence par faire ce magnifique développement sur la vie dans l’Esprit. Si nous ne voulons pas retomber dans la religion de la transpiration, cette religion dans laquelle il faut toujours faire plus et mieux pour plaire à Dieu, nous avons besoin d’accueillir l’Esprit-Saint.
Entre parenthèse, ce n’est pas un hasard si, au jour de notre confirmation, ce sacrement qui nous a envoyé pour devenir des disciples-missionnaires, nous avons reçu une onction avec le Saint-Chrême, cette huile parfumée. C’est comme si nous étions mis en garde : vous devrez témoigner et ça exigera donc que vous fassiez un certain nombre de choses, mais attention de ne pas retomber dans la religion de la transpiration. Le Saint-Chrême parfumé, que nous recevons en onction, nous invite à compter sur le Saint-Esprit, à lui demander que ce soit lui qui gouverne notre vie et qui agisse en nous. Eh bien, c’est exactement le mouvement de l’épître aux Romains, avant d’entrer dans cette partie parénétique ou plus simplement cette exhortation à mener une vie digne du don que Dieu nous a fait et ne cesse de nous faire, il y a ce développement sur la vie dans l’Esprit. Oublier de vivre et de travailler en s’appuyant sur l’Esprit-Saint, perdre l’Esprit, c’est se condamner à la transpiration. Bonjour le témoignage, parce que ceux qui sentent la transpiration, on n’a qu’une envie, c’est de s’éloigner le plus possible d’eux !
Ce chapitre 8, il est si décisif dans la réflexion de Paul que la liturgie a choisi de nous le faire lire pratiquement en entier. S’il n’y avait pas eu la fête de Simon et Jude jeudi prochain, nous l’aurions lu en entier. Nous n’entendrons donc pas l’hymne à l’amour qui conclut ce chapitre sur la vie dans l’Esprit. Car il y a deux hymnes à l’amour chez Paul, l’hymne de la première épitre aux Corinthiens est plus connu mais cette hymne de l’épitre aux Romains est aussi très belle avec ces paroles si fortes : « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » Ou encore : « Rien ne nous séparera de l’amour de Dieu. » Cette hymne à l’amour en conclusion de la réflexion de Paul sur le rôle de l’Esprit-Saint dans la vie chrétienne n’est évidemment pas une digression car l’Esprit-Saint, c’est l’amour. St Augustin avait donné cette belle définition de la Trinité : le Père, c’est celui qui aime, le Fils c’est celui qui est aimé et qui rend tout l’amour reçu au Père et à ses frères et l’Esprit-Saint, c’est l’Amour. Donc avant de commencer sa réflexion sur ce qu’il faudra faire pour mener une vie chrétienne digne de ce nom, Paul nous invite à faire le plein d’amour. Ainsi, vivre en chrétien, c’est donner largement de l’amour sans le puiser dans nos pauvres réserves et sans avoir peur d’être un jour à sec puisque la source de l’amour coule à jet continu dans le cœur de ceux qui accueillent le Saint-Esprit, qui vivent du Saint-Esprit. Plus de transpiration, donc, il s’agit de laisser passer ce que nous recevons … pour que ça marche, il y a une condition, il faut que nous restions branchés en permanence sur la source, c’est le seul effort qui nous est demandé mais il ne sera jamais fini !
Sur le texte d’aujourd’hui, je ne veux m’arrêter que sur un point car je veux garder un peu de temps pour l’Evangile, il s’agit de cette expression étonnante qu’on a entendue au début de la lecture : la loi de l’Esprit. Je relis le verset dans lequel on trouve l’expression : « Car la loi de l’Esprit qui donne la vie dans le Christ Jésus t’a libéré de la loi du péché et de la mort. » Paul réfléchit donc à ce combat intérieur auquel nous sommes tous confrontés, à cette division intérieure qui était si bien exprimée dans la formule entendue hier : « Le bien que je voudrais faire, je ne le fais pas assez souvent et le mal que je ne voudrais pas faire, je le fais trop souvent. » Et hélas, nous en faisons tous l’expérience ce n’est pas toujours, pas assez souvent que, dans ce combat intérieur, le bien l’emporte. C’est tellement douloureux que parfois nous serions tentés de dire : j’y peux rien, c’est comme ça, je suis comme ça ! Et le plus terrible, c’est que le péché est comme un engrenage qui finit par nous happer tout entier : on commence par y mettre le petit doigt et tout le corps est happé.
Eh bien, les versets d’aujourd’hui, je les entends comme une bonne nouvelle. Paul nous dit que, de même qu’il y a un cercle vicieux du péché et, pour le coup, il porte bien son nom de cercle vicieux, il y a de la même manière, mais avec encore plus d’intensité, un cercle vertueux de l’Esprit. De même que l’engrenage du péché finit par te happer tout entier, il existe un engrenage vertueux qui est encore plus capable de happer tout entier, c’est la loi de l’Esprit. Il me semble que c’est ce que Paul veut nous dire à travers cette expression étonnante de Loi de l’Esprit. Je dis que l’expression est étonnante car il montre justement, dans la lettre aux Romains, comment l’Esprit nous libère de tout carcan. Alors pourquoi, dans ces conditions parler de loi de l’Esprit ? Eh bien justement parce qu’elle vient s’opposer à la loi du péché, à l’engrenage du péché. Et cette loi de l’Esprit est bien plus puissante que la loi du péché puisqu’il disait à la fin de la lecture que c’est par la force de l’Esprit-Saint que Dieu a pu ressusciter Jésus. Vous vous rendez compte de la puissance de l’Esprit ? Il a la puissance de ressusciter un mort ! Alors, ce n’est pas un problème pour l’Esprit-Saint de nous faire sortir de chaque petite mort dans laquelle nous plonge le péché, ce n’est pas un problème pour l’Esprit-Saint de nous tenir sur le chemin de la vie, de l’amour … ce n’est pas un problème pour lui, mais encore faut-il que nous soyons branchés sur lui et le laissions travailler !
Venons-en à l’Evangile, ce texte que j’ai évoqué avec les participants de la Journée pour Dieu. On rapporte à Jésus deux faits divers dramatiques : un massacre commis par la garde de Pilate et l’effondrement d’une tour sur de pauvres passants. Comme à l’époque on pensait que tout arrivait venant de Dieu, le bien comme une bénédiction et le mal comme une punition, on interroger Jésus : ceux qui sont morts aussi effroyablement étaient-ils plus coupables que les autres ? Jésus tord le cou à cette idée si répandue du mal, de la maladie qui arrive comme punition de Dieu. Aux enfants qu’il aimait recevoir, Jésus n’aurait jamais dit : si tu fais des bêtises, le Bon Dieu te voit et il va te punir ! La réponse de Jésus est claire et elle tient en 3 mots : pas du tout ! Ceux qui sont morts dans ces deux drames ne sont PAS DU TOUT plus pécheurs que les autres. Mais là où ça se complique, c’est la suite : « Mais si vous ne vous convertissez pas, vous périrez tous de même. » Le PAS DU TOUT nous convenait bien, mais la suite nous gratouille un peu parce qu’elle laisserait presque entendre que Jésus se contredit en envisageant la mort comme une punition sanctionnant une conduite déviante.
Je vous partage comment, moi, je comprends cette parole, mais je ne vous oblige pas à partager ce que je pense ! Il me semble que c’est un peu comme si Jésus disait : ces pauvres personnes qui sont mortes victimes de la garde de Pilate ou en passant sous la tour de Siloé, elles sont mortes bêtement. Oui, c’est vraiment bête, elles étaient au mauvais moment, au mauvais endroit. Elles n’y sont pour rien. Alors, dans son invitation à la conversion, il me semble que c’est comme si Jésus nous disait : vous non plus, vous ne choisirez pas comment vous allez mourir, peut-être que vous aussi, il vous arrivera d’être au mauvais moment, au mauvais endroit, oui, peut-être que vous allez mourir bêtement. Alors, de grâce, convertissez-vous pour ne pas vivre bêtement. Mourir bêtement, ça peut nous arriver à tous sans que nous ne le choisissions évidemment. Mais ne pas vivre bêtement, c’est à nous qu’il revient de le choisir. Et pour ne pas vivre bêtement, il est nécessaire d’entrer dans un chemin de conversion permanente. Et pour nous tenir sur ce chemin de conversion permanente, nous qui connaissons notre faiblesse, c’est bien trop clair, nous avons besoin du Saint-Esprit. « l’Esprit-Saint vient là où il est aimé, là où il est invité, là où il est attendu. » Alors, si nous ne voulons pas vivre bêtement, nous savons ce qu’il nous reste à faire !
Très bien exprimé cette homélie qui rejoint bien ma pensée.
Peut-etre pouvons nous nous poser cette question :qu’est ce qui me nourrit pour permettre à ma vie de porter des fruits d’amour et de justice.