En écoutant la parabole du semeur ou son explication comme aujourd’hui, notre attention est souvent retenue par la description des zones d’échec et leur explication : le bord du chemin, le sol pierreux, les ronces. Oui, c’est vrai, il y ces zones d’échec et chacun d’entre nous pourrait confirmer, par son expérience, l’explication que donne Jésus. Mais si nous voulons recueillir la bonne nouvelle de ce texte, il ne faut pas nous arrêter à ces zones d’échec, il faut écouter jusqu’au bout et entendre la promesse inouïe de Jésus : quand la semence trouve de la bonne terre, il y aura une fécondité difficile à imaginer : 30, 60 voire 100 pour un. Pour l’époque c’étaient des taux de rendement jamais atteints qui faisaient rêver n’importe quel paysan.
Méfions-nous car le Malin prend, c’est le cas de le dire, un malin plaisir à détourner le sens de cette parabole. Nous n’arrêtons pas de nous focaliser sur les zones d’échec, nous essayons de voir quand notre cœur ressemble au bord du chemin, ou au sol pierreux ou encore aux ronces. Une telle introspection permanente est proprement diabolique. Alors que Jésus nous fait une promesse extraordinaire, nous, nous n’arrivons pas à nous réjouir en restant focalisés sur les risques qui empêcheront cette promesse de s’accomplir. Que le St Esprit nous fasse désirer que nos cœurs deviennent cette bonne terre, qu’il nous le fasse plus désirer que redouter de végéter dans les zones d’échec. Jésus n’a pas raconté cette parabole pour nous culpabiliser, pour que nous restions repliés sur nos difficultés, il a raconté cette parabole pour parler de la puissance de fécondité qui est contenue dans sa Parole que n’attend que des cœurs bien travaillés pour libérer sa puissance. Ne nous laissons pas voler la promesse de Jésus par Celui que l’Evangile présente souvent comme un Voleur.
Je reviens maintenant sur la 1° lecture qui contient elle aussi une promesse extraordinaire : « Je vous donnerai des pasteurs selon mon cœur : ils vous conduiront avec savoir et intelligence. » Evidemment, nous, nous entendons cette promesse en y mettant en certain contenu, espérant que le Seigneur donne à son Eglise des prêtres et des évêques selon son cœur, c’est-à-dire qu’ils soient à la hauteur des défis à relever animés par une charité pastorale à toute épreuve puisée dans le cœur de Dieu. Oui, c’est bien, mais avant de lire comme ça et je vais développer cette lecture, il faut entendre ce que pouvait représenter cette promesse pour les auditeurs de Jérémie. Vous le savez, il prophétisait à un moment difficile, le Royaume du Nord a déjà été rayé de la carte et Jérémie annonce que le malheur va maintenant s’abattre sur Judas, le Royaume du Sud dont la capitale est Jérusalem.
Cette catastrophe, comme je le répète si souvent, ne sera pas une punition de Dieu mais la conséquence des péchés du peuple qui n’ont pas été encouragés par leurs dirigeants qui ont rarement donné le bon exemple. « Je vous donnerai des pasteurs selon mon cœur : ils vous conduiront avec savoir et intelligence. » Cette promesse, elle devait susciter une immense espérance : enfin le peuple sera conduit par des hommes qui lui montreront le bon chemin, qui ne l’entraineront plus dans des situations plus galères les unes que les autres. Oui, il y aura un moment difficile à passer, mais Dieu n’abandonnera pas son peuple et suscitera des gouvernants, des prêtres, des prophètes qui exerceront leur mission en s’accordant au cœur de Dieu, en se mettant au diapason du cœur de Dieu. Quelle belle promesse !
Bien sûr, cette promesse, nous pouvons l’entendre pour nous aujourd’hui et renforcer notre prière en demandant que tous ceux qui exercent un ministère pastoral qui ont reçu la mission de devenir pasteurs au nom du Seigneur soient des pasteurs selon son cœur. Jésus a souvent repris cette image du bon berger en se l’appliquant pour expliquer que, comme les bons bergers de l’époque, il est prêt à donner sa vie pour que le troupeau qui lui a été confié puisse vivre en paix, trouver les pâturages qui lui permettront de refaire ses forces … C’est aussi une image que le pape François affectionne particulièrement. Je me rappelle ces paroles qu’il avait adressées aux évêques italiens les invitant à devenir ces pasteurs selon le cœur du Seigneur et pour cela, il les invitait à marcher à la tête du troupeau quand c’était nécessaire ou au milieu quand les circonstances l’exigeaient et même derrière quand la situation l’exigerait. Permettez-moi de reprendre ces trois positions pour les développer un peu.
– Le pasteur devant le peuple. Les brebis, dans un troupeau font naturellement confiance au pasteur, elles le suivent sans crainte. Voilà pourquoi il doit marcher devant, c’est pour les rassurer et les guider là où elles trouveront de bons pâturages sécurisés. Mais on peut aussi développer cette posture du pasteur devant le troupeau, à la tête du troupeau en soulignant que, jamais le pasteur ne doit demander au troupeau de faire ce que lui-même ne serait pas prêt à faire.
– Le pasteur au milieu de son peuple. Le pasteur n’est pas au-dessus de son peuple, mais il doit souvent être au milieu, vivre dans une grande proximité. Le pape François aime utiliser une image très suggestive en disant que les pasteurs doivent garder sur eux l’odeur des brebis qui leur sont confiés. Le vrai pasteur, le pasteur selon le cœur du Seigneur, ce n’est pas celui qui rêve de tranquillité et qui n’est heureux que lorsqu’il est seul ou loin de son troupeau.
– Enfin, le pasteur, à certains autres moments, il devra savoir se tenir derrière son peuple, pour le pousser quand c’est nécessaire parce qu’un troupeau risque toujours de s’endormir. Derrière, c’est là que se trouvent aussi les brebis les plus fragiles qui n’arrivent pas à suivre le rythme. Le pasteur selon le cœur de Dieu ne doit jamais les négliger ne s’occupant que de celles qui sont toutes fraiches et fringantes ! Se trouver derrière, c’est aussi savoir prendre du recul à certains moments pour lieux voir, pour mieux discerner ce qui n’est pas possible quand on a toujours le nez dans le guidon.
Prions pour tous ceux qui ont reçu la charge de ce ministère dans l’Eglise et dans les Foyers afin qu’ils soient toujours plus, à l’image du seul et vrai pasteur, pasteurs selon le cœur de Dieu.
Amen !