26 novembre : samedi 34° semaine ordinaire. Apocalypse, suite et fin! En Technicolor et en Dolby-stéréo, le paradis comme si vous y étiez !

Vous qui participez à ce week-end spirituel d’entrée en Avent, je ne sais pas si vous avez beaucoup entendu parler de l’Apocalypse ces 15 derniers jours. Ici, je peux vous dire que la communauté en a beaucoup entendu parler et nous voilà parvenus au terme de cette lecture.

Je fais une très rapide mise à niveau pour ceux qui nous rejoignent. Le livre de l’Apocalypse ne prédit pas une série de catastrophes comme on le pense assez spontanément, il contient le compte-rendu de la vision que le Seigneur a donné à Jean. C’était une grande vision, une vision à 360°, pleines de détails, c’est ce qui explique qu’il aura fallu 22 chapitres pour que Jean revisite ce qu’il lui a été donné de voir en un instant et qu’il puisse en rendre compte, mais on sent bien qu’il le fait, limité par la pauvreté des mots et des comparaisons, tant ce qu’il a vu était étonnant. Alors, oui, le livre parle de catastrophes, mais ce ne sont pas des prédictions, c’est ce qui est en train de se passer, en cette fin de 1° siècle, où les chrétiens subissent une série de persécutions dramatiques. Mais le livre n’a pas été écrit pour décrire ce que tout le monde voit, il a surtout été écrit pour annoncer ce qu’on ne peut pas voir et que, seule la foi, nous permet d’espérer : la victoire de Dieu. Et cette victoire est assez étonnante car c’est la victoire d’un Agneau, symbole de l’amour désarmé qui, contre toute attente, est victorieux de 2 Bêtes monstrueuses et d’un dragon terrifiant.

Aujourd’hui, en technicolor et dolby-stéréo, la première lecture nous mettait au cœur de la dernière partie de cette grande vision et vous avez bien fait de venir aujourd’hui parce que là, c’est vraiment bon ce qu’on voit et ce qu’on entend ! Pour entrer encore mieux dans l’esprit de ce livre de l’Apocalypse et goûter comme il se doit cette dernière révélation, je voudrais prendre une comparaison. Je ne sais pas si vous avez déjà eu la chance et le bonheur de visiter la merveilleuse église abbatiale de Conques, ce petit village de l’Aveyron qui se trouve sur le chemin de Compostelle et qu’on atteint au bout d’une petite dizaine de jours après le départ du Puy. L’église abbatiale de Conques est célèbre pour avoir l’un des plus beaux tympans qui puisse exister. Vous le savez sans doute, sur ces tympans, les artistes ont sculpté, de manière très habituelle, des scènes du jugement dernier. A l’époque où les gens ne savaient pas lire, il fallait faire une catéchèse en images et suffisamment suggestive pour qu’elle invite les chrétiens à se convertir. En entrant dans l’église, il suffisait de lever les yeux sur le tympan pour avoir suffisamment de sujets de méditation pour tout le temps de l’office qui allait s’y dérouler. Et comme à l’époque les fidèles ne comprenaient pas grand-chose à ce qui se passait dans la liturgie, ils avaient plutôt intérêt à avoir des sujets de méditation s’ils ne voulaient pas perdre leur temps à l’église. 

Ceux qui entraient dans l’église de Conques étaient particulièrement gâtés, parce que, avant d’entrer, ils avaient eu sous leurs yeux une œuvre d’une richesse étonnante avec 142 personnages mis en situation dans le jugement dernier, on voit ce qui arrive au bon et ce qui arrive aux méchants, avec ce tableau en noir et blanc sans nuances, il y a de quoi faire réfléchir ! Mais ce que j’ai trouvé le plus étonnant et le plus délicieux, ce sont les personnages que l’on voit juste au-dessus du tympan et qu’on appelle « les curieux. »  Le tympan représente donc ce qui se passe au moment de l’entrée dans l’au-delà, et l’artiste a eu cette idée géniale de sculpter des personnages qui sont encore sur terre mais qui ont eu envie de voir ce qui se passe dans ce moment. On ne leur voit que le nez, les yeux et les cheveux parce qu’on sent bien qu’ils se hissent sur la pointe des pieds pour voir ce qui se passe derrière le rideau. Allez voir sur internet des photos de ces « curieux » ils sont délicieux ! Eh bien, le livre de l’Apocalypse s’adresse aux curieux que nous sommes, mais ce n’est pas nous qui nous hissons sur la pointe des pieds pour voler quelques informations, c’est Jean qui dévoile, c’est la traduction du mot Apocalypse, dévoilement. La plus grande partie du livre nous fait voir les événements dramatiques de cette fin du 1° siècle du point de vue de Dieu ; nous voyons, si j’ose dire, avec les lunettes de Dieu. Le problème, c’est que Jean écrit avec un langage codé, il faut donc un décodeur, on en trouve de très bons dans les commentaires d’exégètes, à condition de bien les choisir et de ne pas jouer à se faire peur avec les commentaires de certains farfelus. La plus grande partie du livre nous fait donc tout voir du point de vue de Dieu. Et la fin, dont nous avons lu un extrait aujourd’hui, nous montre ce qui nous attend quand nous serons pour toujours avec Dieu.

Je relève juste quelques éléments pour attiser en nous, s’il en est besoin, le désir de la vie éternelle.

– D’abord ce qui saute aux yeux et aux oreilles, c’est un éclatement de vie. Le texte nous parle d’un livre de vie, d’un fleuve de vie qui reprend la grande vision d’Ezéchiel au chapitre 47. Il nous parle encore d’un arbre de vie, allusion, bien sûr, au jardin d’Eden et vous remarquez qu’il n’est plus question d’arbre de la connaissance du bien et du mal, l’arbre interdit. Il n’existe plus, on n’a plus besoin de cette connaissance que Dieu seul peut donner puisque, chez Dieu, il n’y a que du bien, du bon, du beau. Evidemment, ça fait très envie. Ça faisait envie aux chrétiens de cette fin du 1° siècle qui traversaient des moments si difficiles et ça nous fait envie, à nous aussi parce que tout n’est pas rose dans notre monde surtout quand on habite en Ukraine, au Soudan, au Nigeria et encore dans tant d’autres coins du monde.

– Nous avons aussi l’évocation d’une ville avec un jardin extraordinaire, traversé par ce fameux fleuve de vie, qui donne la vie, la nourriture, la guérison. C’est Laudato Si ! L’harmonie de la nature réconciliée, les villes ne mangent plus la nature mais sont comme un écrin pour qu’elle puisse s’y épanouir et profiter à tous ceux qui les habitent. En fait, c’est plus que Laudato Si, puisque c’est le rêve de Dieu qui est enfin réalisé, ce rêve qu’il avait quand il a tout créé, quand il voulait que tout soit bon pour l’homme, cet homme qu’il voulait, lui, très bon. Cette révélation de l’Apocalypse vient confirmer qu’avec Dieu, le meilleur reste toujours à venir, le meilleur est devant nous.

– Je retiens encore que toute malédiction a disparu. La grande malédiction, elle était énoncée, après le péché, au chapitre 3 du livre de la Genèse. Elle a été souce de grands malentendus. Les hommes ont cru que c’était Dieu qui les punissait. Mais, non ! Dieu qui est miséricorde infinie, il peut donc tout pardonner, d’ailleurs il pardonnera le péché, la preuve, c’est qu’il offre deux tuniques. Oui, mais si Dieu peut tout pardonner, il ne peut pas empêcher que nos péchés aient des conséquences. Ce que l’on trouve en Gn 3, c’est donc l’énoncé des conséquences du péché qui apporte une grande perturbation dans les relations de l’homme avec Dieu, avec la nature, avec la femme et ses semblables et même à l’intérieur de lui-même. Du coup, au lieu de parler de malédiction, on ferait mieux de parler de Dieu qui pleure sur notre malheur, sur le mal que nous lui infligeons, que nous nous infligeons et que nous infligeons aux autres à cause du péché. Eh bien, quand Jean tire le voile en écrivant l’Apocalypse, nous le voyons tout cela est terminé, Dieu n’a plus à pleurer, nous n’aurons plus à souffrir car de péché, il n’y en aura plus. L’harmonie est enfin au rendez-vous.

– Enfin, le dernier point que je veux souligner, c’est cette mention : Le trône de Dieu et de l’Agneau sera dans la ville. C’est merveilleux, il n’y a plus de séparation entre Dieu et les hommes puisque Dieu et l’Agneau habitent au centre-ville et rassurez-vous, ils n’ont pas oublié de faire de la place au Saint-Esprit puisque ce fleuve de vie, symbolise l’Esprit-Saint et tous ses bienfaits. C’est le grand désir de Paul qui est enfin exaucé : plus rien ne nous séparera de l’amour de Dieu. Rm 8,39.  Dieu est avec nous, Il est tout en tous, comme le dira encore Paul 1Co 15,28. C’est tellement vrai qu’on n’a plus besoin de lumière car sa présence nous illumine. Et puis, tous rendront un culte à Dieu, c’est-à-dire que l’idolâtrie est terminée. Or l’idolâtrie, c’est elle qui est à l’origine des persécutions. L’Empereur se prenait pour dieu et voulait être honoré comme dieu. Quand, Dieu, le Dieu d’amour, n’a plus la 1° place, tout se dérègle dans la vie des hommes et dans le monde. 

Ça parait trop beau pour être vrai, c’est pour cela que Jean tient à préciser : Ces paroles sont dignes de foi et vraies : le Seigneur, le Dieu qui inspire les prophètes, a envoyé son ange pour montrer à ses serviteurs ce qui doit bientôt advenir. Je m’excuse pour cette traduction un peu triviale, mais c’est comme si Jean disait : non, je n’ai pas fumé des produits particuliers, j’ai vu et je vous partage ce que le Seigneur m’a donné de voir pour soutenir votre espérance. Tout cela arrivera quand nous serons chez Dieu, quand Christ aura tout récapitulé. Dans l’Evangile, nous l’avons entendu dire : voici que je viens sans tarder ! Il annonce sa 3° venue. Elle viendra sans tarder, c’est-à-dire quand ça sera le moment ! En attendant veillons, pour profiter à fond du temps de sa 2° venue, c’est justement le sens de l’Avent. Mais je ne développe pas ce point pour ne pas couper l’herbe sous les pieds du prédicateur de ce week-end !

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