Ne nous y trompons pas, il n’y avait pas besoin que cet officier soit bon pour que Jésus se laisse toucher par sa demande. D’ailleurs on peut dire qu’il fera encore plus pour cette crapule de Zachée puisqu’il entrera sous son toit et prendra un repas avec lui. Il n’y avait pas besoin que cet officier soit bon pour que Jésus se laisse toucher, mais, de fait, il était bon et animé d’une humilité et d’une foi étonnante et cela, Jésus aura plaisir à le souligner.
Oui cet homme était vraiment bon. Dans le passage parallèle en St Luc, on apprend que c’est lui, le romain, qui a fait construire la synagogue de Capharnaum pour les juifs. Et puis, il y a le fait qu’il vienne pour demander la guérison d’un de ses serrviteurs. Ce serviteur était-il l’un des soldats de sa centurie détaché pour le servir ? C’est possible, dans ce cas, sa demande est extraordinaire.
En effet, un centurion, comme son nom l’indique, commande 100 soldats. S’il y en a un qui est défaillant, il lui en reste encore 99. Si celui qui avait été détaché à son service était malade, ce n’était pas un drame, il pouvait choisir de détacher un autre soldat pour son service parmi les 99 autres. Mais pour cet officier, un homme c’est un homme et chaque homme a sa valeur. Le fait de savoir qu’il en reste 99 parmi lesquels il pourra trouver un nouveau serviteur ne lui suffit pas. J’insiste parce que, évidemment, vous avez reconnu la parabole du bon berger qui, lorsqu’il perd une brebis, laisse les 99 autres pour partir à la recherche de celle qui est blessée et s’en occupe jusqu’à ce qu’elle puisse retrouver sa place dans le troupeau. Peut-être que c’est en repensant à la demande de cet officier que Jésus a eu, plus tard, l’idée de cette parabole de la brebis perdue.
Oui, cet homme était vraiment bon ! Et Jésus est tellement touché qu’il le lui montre en disant : Je vais aller moi-même le guérir ! Cette parole de Jésus aurait dû remplir de joie le cœur de cet homme. Mais il ne s’emballe pas parce que, même s’il est officier, il est habité d’une grande humilité. Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit. Il sait bien qu’il fait partie de l’armée occupante qui n’est pas aimée. Oui, bien sûr, à cause de la synagogue qu’il a fait construire, il est sans doute moins détesté que les autres, mais il sait qu’il appartient à cette armée dont aucun juif n’apprécie la présence. Alors, avec humilité, il dit à Jésus qui lui a proposé d’aller chez lui : Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit.
Mais comme cette humilité est habitée par une grande foi, il explique à Jésus que ne pas aller jusque chez lui, ce n’est pas un problème, il peut guérir à distance. Comme officier, il connait la puissance de la parole. Il sait, au moins chez les militaires, qu’une parole ne se discute pas. Quand il dit, quand il demande, immédiatement les ordres contenus dans sa parole sont exécutés. Alors, avec foi, il vient dire à Jésus : si moi qui ne suis qu’un officier de 100 personnes j’ai une parole efficace, à combien plus forte raison ta parole sera-t-elle encore plus efficace …donc, tu n’as qu’à dire une parole et mon serviteur sera guéri, ça ne fait aucun doute pour moi !
Cet homme était vraiment bon, totalement humble et animé d’une si grande foi. Jésus aura plaisir à souligner ces belles qualités en disant même qu’en Israël, parmi le peuple élu, il n’a encore trouvé personne qui soit animé d’une telle foi. Jésus ne dit pas cette parole pour humilier les juifs mais pour les encourager. Si un païen est capable d’une telle foi, vous qui appartenez au peuple élu, vous devriez parvenir à vivre et professer une foi de cette profondeur.
En ayant pris conscience de tout cela, on aurait presque envie de dire que cet homme méritait le miracle qu’il était venu demander. Mais Jésus n’agit pas en fonction de nos mérites, c’est me semble-t-il ce que signifie le fait que le récit de la guérison de la belle-mère de Pierre ait été accolé au précédent. Il s’agit justement de montrer que si Jésus accomplit un miracle pour cet homme d’une si belle stature et occupant des fonctions importantes, il est capable de faire la même chose pour une vieille femme toute simple, une sans-grade.
Nous le savons, cette parole de l’officier est reprise dans la liturgie et nous la disons chaque jour avant de communier. « Je ne suis pas digne que tu entres sous mon toit, mais si tu dis une parole, ton serviteur sera guéri ! » Cette parole de l’officier, nous la disons alors que nous ne sommes pas aussi bon, pas aussi humble et pas aussi croyant que lui, mais nous la disons justement pour devenir meilleur, pour devenir plus humble et plus croyant. Oui, Seigneur, réponds à notre supplication quand nous te dirons : Seigneur, je ne suis pas digne de te recevoir mais dis seulement une parole et je serai guéri. Par ta présence, rends-nous meilleur, plus humble et plus croyant.
Merci pour cette homélie bien éclairante et bien lumineuse!!!