Avec cet Evangile de l’Annonciation, nous comprenons que nous entrons dans une étape décisive de l’Histoire du Salut. C’est un peu comme pour le lancement d’une fusée, il y a des ingénieurs qui travaillent pendant des années et des mois et vient un moment où, ce qu’on appelle le compte à rebours, peut commencer. A partir de ce moment, on ne compte plus en année ou en mois mais en jours, en heure, puis minutes et secondes.

Eh bien, avec l’Annonciation, le compte à rebours a commencé ! Ce que le peuple de Dieu attendait depuis des siècles et qui avait été annoncé par les prophètes est sur le point de se produire. On va pouvoir désormais compter en mois et semaines ! Dieu est tout prêt d’accomplir sa promesse, c’est pour cela que nous lisons cet Evangile le dernier dimanche de l’Avent. L’Annonciation marque donc une étape décisive dans l’histoire du Salut.

Mais l’Annonciation marque aussi une étape décisive dans l’histoire de Marie. Bien sûr parce qu’elle va devenir la Mère du Sauveur, mais aussi parce que, à compter de ce jour, elle vivra, elle travaillera, elle marchera en compagnie du Saint-Esprit. C’est ce que lui dit l’Ange : « l’Esprit-Saint te prendra sous son ombre. » Moi, j’aime bien traduire : l’Esprit-Saint te suivra comme ton ombre. Vous savez, quand il fait soleil, notre ombre nous suit continuellement. Eh bien, c’est ce que va vivre Marie désormais : l’Esprit-Saint la suivra comme son ombre. A partir de ce jour de l’Annonciation, l’Esprit-Saint ne lâchera plus jamais Marie et elle, elle ne lâchera plus jamais le Saint-Esprit. Ainsi la vie de Marie devient la parfaite illustration de ce que peut devenir la vie de quelqu’un qui veut vivre en permanence du Saint-Esprit. Certes, il y aura forcément des différences avec nous car nous, nous sommes marqués par le péché. Mais la vie de Marie va être comme un stimulant qui nous montrera ce vers quoi nous pourrons tendre si nous vivons le plus possible sous l’onction du Saint-Esprit.

C’est cet aspect que j’aimerais développer dans mon homélie car, hier, avec la communauté, nous avons terminé la retraite que je prêchais sur le thème : avec l’Esprit-Saint, tout devient possible ! Cette méditation terminera heureusement la retraite pour les membres de la communauté du Foyer et à vous qui n’y participiez pas, mais qui étiez très présents dans notre prière, ça vous permettra de partager un peu ce que nous avons voulu vivre. 

Cet événement de l’Annonciation va être pour Marie comme une effusion du Saint Esprit. Comme je le disais, à partir de ce moment, elle vivra en permanence dans l’onction du Saint Esprit. Et c’est dans l’onction du Saint-Esprit qu’elle peut dire un « oui » sans retenue et sans calcul. Bien sûr, elle avait déjà été préparée à pouvoir dire ce oui sans retenue et sans calcul par son Immaculée Conception dont nous avons fait mémoire le 8 décembre. Mais avec la grâce du Saint-Esprit, elle pourra répondre joyeusement à l’appel du Seigneur et comprendre que cet appel ne vient pas contrarier sa vie mais lui donner une véritable plénitude. 

Ainsi en va-t-il pour ceux qui veulent vivre du Saint-Esprit, il leur donnera la force de dire un « oui » généreux, joyeux et sans calcul à l’appel du Seigneur en comprenant que cet appel, le Seigneur ne le leur adresse pas pour contrarier leur vie et leurs projets, mais il le leur adresse pour qu’ils puissent vivre une vie remplie, pleinement épanouie. Et il n’y a pas qu’aux consacrés que le Seigneur adresse un appel, il le fait à chacun de nous en nous demandant de vivre en disciples dans la situation qui est la nôtre. Il attend de nous un « oui » généreux, mais seuls ceux qui se laisseront envahir par le Saint-Esprit seront capables de le lui donner sans jamais le reprendre. Et, seuls ceux qui vivent de l’Esprit feront l’expérience que plus ils sont fidèles, plus leur vie devient belle et féconde.

Après l’Annonciation, il y a la visitation. Je suis toujours émerveillé de voir Marie se mettre en route « bien volontiers » c’est une meilleure traduction que « en hâte » ou « rapidement ». Les femmes enceintes ont besoin de moments d’intériorité pour laisser s’épanouir cette vie qui se développe en elles et puis elles sont souvent fatiguées dans ces premières semaines. Marie accepte de partir pour visiter sa cousine Elisabeth et elle le fait « bien volontiers » donc sans rouspéter, sans regretter de ne pas garder ce temps pour elle. Elle part parce qu’elle est poussée à partir pour annoncer la Bonne Nouvelle à sa cousine et sans doute se mettre à son service. Et voilà comment l’Esprit-Saint fera de Marie la première missionnaire de l’Evangile, la première évangélisatrice.

Ainsi en va-t-il pour tous ceux qui se laissent habiter par l’Esprit-Saint, ils ressentent comme une nécessité d’évangéliser qui s’impose à eux. St Paul disait : « Malheur à moi si je n’évangélise pas ! » J’aime mieux le dire en positif : Bonheur pour moi quand j’évangélise ! Oui, ceux qui sont habités par l’Esprit-Saint, leur plus grand bonheur, c’est de partager la Foi qui les fait vivre !

Pour Marie, ensuite, viendra le moment de mettre au monde Jésus, je n’en parle pas trop puisque nous aurons l’occasion de le célébrer dans quelques jours. Mais quand même, la manière dont ça s’est passé n’a pas été simple. Devoir se mettre en route alors que le moment d’accoucher approchait, ça n’a pas dû être simple. Et ensuite, accoucher dans une étable, ça n’a pas dû être simple non plus. Et ensuite, Marie et Joseph, savaient que c’était le Fils de Dieu qui venait de naître, or aucun des dignitaires religieux ne vient s’incliner devant lui, ce ne sont que des bergers qui viennent ! Et puis très peu de temps après, il faut partir parce que Hérode, ce tyran sanguinaire, en veut à la vie de l’enfant. Ils partent en Egypte et il semble qu’ils aient été obligés d’y rester pas mal de temps, vivant la terrible condition des réfugiés. Il y aurait eu de quoi se rebeller contre Dieu en lui disant : je t’ai dit « Oui » et Toi, en récompense, tu fais pleuvoir sur moi cette pluie de catastrophes : faire un voyage dans les pires conditions, accoucher dans les pires conditions, fuir dans les pires conditions. Non, Marie ne s’est pas rebellée, elle a continué à faire confiance au Saint-Esprit en croyant qu’il les accompagnerait, elle et la Sainte Famille, quelles que soient les épreuves à traverser.

Ainsi en va-t-il pour ceux qui se laissent conduire par le Saint-Esprit. Nous l’avons vu dans au cours de la retraite, le Saint-Esprit, c’est celui qui va nous apprendre à consentir au réel de nos vies. Ça ne veut pas dire qu’on n’a pas le droit de rêver à une vie meilleure quand on traverse de grosses difficultés, mais il ne faudrait pas passer sa vie à rêver en oubliant de vivre ! L’Esprit-Saint va nous aider à croire, que dans notre vie, telle qu’elle est, le Seigneur se donne déjà à rencontrer et qu’il nous donne la possibilité de vivre des moments de grâce. Dans les Foyers de Charité, nous sommes marqués par le témoignage de Marthe Robin et c’est justement ce très beau témoignage qu’elle nous a donné. Elle a accepté de consentir à vivre sa vie telle qu’elle se présentait en croyant que l’Esprit-Saint la suivrait comme son ombre, l’aidant à traverser les pires difficultés et l’aidant à goûter à tous les moments de grâce.

Rassurez-vous, je ne vais pas passer en revue tous les épisodes de la vie de Marie pour voir ce que le Saint-Esprit lui a donné de vivre. Mais je veux en souligner encore deux. C’est d’abord sur la parole de Marie à Cana que je veux m’arrêter. Nous connaissons tous la parole que Marie dit aux serviteurs à Cana : faites tout ce qu’il vous dira. Il faut regarder le contexte dans lequel elle dit cette parole. Jésus vient de répondre à sa demande par cette parole qui ne souffre aucune contestation : mon heure n’est encore pas venue ! Et elle, c’est juste après cette parole qu’elle dit : faites tout ce qu’il vous dira ! Quelle foi !

Eh bien, à la suite de Marie, tous ceux qui se laissent envahir par l’Esprit-Saint deviennent capables d’oser, comme elle, des coups d’audace, je ne comprends pas tout, mais je fais confiance … je ne me crois pas capable de tout, mais je sais que l’Esprit-Saint m’accompagne, alors, je crois qu’avec lui tout devient possible, comme nous l’avons médité dans la retraite.

Enfin j’évoque la présence de Marie au Golgotha. Le chemin de croix avait déjà été éprouvant pour Marie qui avait assisté impuissante aux humiliations et aux tortures infligées à son divin Fils. En plus, elle se rend compte que les apôtres ont fui, sauf Jean. La prophétie du vieillard Syméon est en train de s’accomplir : une épée de douleur lui transperce le cœur. Mais elle est là, debout nous dit l’Evangile, signe de sa confiance. L’Esprit-Saint lui donne d’oser encore la confiance, alors que tout semblerait inviter au désespoir. Extérieurement, c’est fini et ça se finit mal, très mal ! Mais Marie est là debout, signe qu’elle n’est pas totalement effondrée parce que l’Esprit-Saint la suit comme son ombre et c’est Lui qui la soutient. 

Ainsi en va-t-il pour ceux qui se laissent envahir par l’Esprit-Saint. Ils seront comme les autres, ils ne seront pas épargnés par les épreuves et les épreuves traversées les feront souffrir. Mais, l’Esprit-Saint leur permettra de tenir et de traverser ces épreuves.

Voilà l’œuvre du St Esprit dans la vie de Marie, voilà l’œuvre que le Saint-Esprit est prêt à accomplir dans la vie de ceux qui, comme Marie, accepteront que le Saint-Esprit les suive comme leur ombre. Dans ces jours qui nous préparent à Noël, que Marie intercède pour nous afin que nous acceptions, nous aussi, de nous laisser envahir par le Saint-Esprit.