La 1° lecture d’aujourd’hui n’est pas facile, mais comme n’étaient pas faciles toutes celles de cette semaine tirée du livre de Daniel. Elles ne sont pas faciles parce qu’elles sont écrites dans ce qu’on appelle le style apocalyptique, un style qui ne nous est pas familier et devant lequel nous faisons souvent des erreurs d’interprétation. Dans le langage courant, quand on dit : « c’est l’apocalypse ! » c’est pour dire que c’est la catastrophe ou la cata comme disent les jeunes ! Ainsi donc, quand nous lisons ces textes, nous entendons l’annonce d’une série de catastrophes qui nous effraient, la conséquence c’est que nous n’aimons pas lire ces textes et encore moins les méditer ! Pourtant, ça devrait être le contraire car « apocalypse » en grec, ça signifie « dévoilement ». Le Seigneur confie à des prophètes, à des hommes inspirés, la mission de lever le voile sur ce qui doit arriver. Les Apocalypses sont écrites en temps de crise et elles sont donc comme un cadeau du Seigneur offert aux croyants pour leur dire : ce que vous vivez est très compliqué, mais ça ne va pas durer éternellement. Attention le Seigneur ne fait pas chanter au prophète ce refrain bien connu : ça ira mieux demain ! Non, les apocalypses ne cachent rien des difficultés à venir, mais elles annoncent que ces difficultés finiront par cesser.
Et c’est bien ce qui est annoncé dans la 1° lecture d’aujourd’hui comme c’était le cas tout au long de la semaine. Comme hier, nous avons eu sous les yeux la description terrible des bêtes, aujourd’hui, cette description était moins détaillée que celle d’hier sauf pour la 4° bête. Permettez-moi de dire un mot sur le symbolisme de ces bêtes, ce qu’elles représentent. Nous l’avons entendu dans le texte, donc Daniel nous donnait déjà une clé d’interprétation : Ces bêtes énormes, au nombre de quatre, ce sont quatre rois qui surgiront de la terre. Elles sont terrifiantes ces bêtes ce qui signifie que la politique menée par ces rois à la tête de ces 4 Royaumes va être une politique destructrice. Mais vous avez entendu ce qui suivant l’explication de Daniel quand il précisait que les 4 bêtes étaient 4 rois, il rajoutait, de la part de Dieu : « Mais ce sont les saints du Très-Haut qui recevront la royauté et la posséderont pour toute l’éternité. » C’est donc très clair, ces 4 rois n’auront pas le dernier mot, ce sont les saints de Dieu, ceux qui restent fidèles, qui auront ce dernier mot. Voilà, c’est cela le dévoilement opéré par Daniel de la part de Dieu.
Pour autant, comme je le disais, le Seigneur ne minimise pas les difficultés présentes, il ne dit pas : rassurez-vous, ce n’est qu’un mauvais moment à passer et puis ce que vous avez souffert n’est pas si terrible que ça ! Non ! Dieu est clairvoyant. Ce lion qui représentait l’empire Babylonien a fait beaucoup de mal ; l’ours décrit avec beaucoup de cruauté représentant l’empire Perse n’a pas été en reste ; de même pour le léopard ou la panthère, selon les traductions, représentant l’empire grec et ses grandes conquêtes, imposant au monde entier sa puissance. Oui, tout cela est terrible, mais Dieu ne cache rien des difficultés à-venir, l’empire qui va s’installer ou qui est en train de s’installer, ne sera pas meilleur que les précédents, il s’agit de l’empire romain, il ne ressemblera à aucun autre, mais sa violence sera encore supérieure à tous les autres. Je ne suis pas sûr qu’il faille essayer de comprendre tous les détails. La description générale suffit pour comprendre que de grandes tribulations sont annoncées et elles auront lieu, elles ont commencé au temps où le livre est écrit. On le sait l’empire romain sera responsable des plus grandes persécutions.
Evidemment, il ne faut pas s’arrêter à cette description des bêtes et de la 4° en particulier, ce qui compte, c’est la suite ! Il était question d’un tribunal qui allait se réunir, signe que la justice va se prononcer, Dieu va prendre les affaires en main et vous avez entendu l’annonce, le dévoilement de la suite de l’histoire : Je regardais, et la bête fut tuée, son cadavre fut jeté au feu. Exit la 4° bête, elle finira victime de la violence qu’elle a semée, comme les autres. Pour autant, le Seigneur prévient que ça ne sera pas tout à fait la fin : Quant aux autres bêtes, la domination leur fut retirée, mais une prolongation de vie leur fut donnée, pour une période et un temps déterminés. Heureusement que le Seigneur a fait cette précision, sinon, nous pourrions avoir des doutes sur la vérité de ce dévoilement. Parce que, aujourd’hui, encore, nous constatons bien que le mal et le Malin qui en est à l’origine ne sont pas tout à fait mis au pas, ils gardent un vrai pouvoir de nuisance.
Pour l’expliquer, j’aime bien donner cette image : un canard vous lui coupez la tête, il va continuer à courir pendant quelques secondes ! Eh bien, le Malin, on lui a coupé la tête, mais il court encore et, avec sa queue de dragon, il fait des dégâts, mais il sait que ses jours sont comptés, qu’il a perdu et c’est justement parce qu’il a été vaincu qu’il redouble de violence. Mais ça ne durera pas éternellement parce que ce Fils d’Homme qu’entrevoyait Daniel dans la lecture d’hier et dont le temps de l’Avent nous fera désirer la venue a emporté la victoire et, selon la lecture d’hier, c’est à lui que sont donnés domination, gloire et royauté ; c’est lui que tous les peuples, toutes les nations et les gens de toutes langues serviront. C’est sa domination qui sera une domination éternelle, et c’est sa royauté, qui sera une royauté qui ne sera pas détruite.
J’espère que ces quelques mots vous aideront désormais à lire ces lectures écrites en style apocalyptique à les accueillir comme une Bonne Nouvelle : le Seigneur a voulu lever pour les croyants de ce temps un coin du voile afin qu’ils tiennent bon et qu’ils mènent le bon combat.
Avec l’Evangile, nous restons finalement dans la même perspective.
Jésus annonce sa venue et il craint que ce jour ne prenne trop de personnes au dépourvu. Il est évident que si nous attendons ce jour, nous n’avons rien à craindre. A chaque messe, au moment de l’anamnèse, après la consécration, nous disons : nous attendons ta venue dans la gloire, eh bien, si ce que nous disons est vrai, si ce sont des paroles qui jaillissent de notre cœur, ce jour ne nous surprendra pas, il ne s’abattra pas sur nous comme un filet. Par contre, ça ne sera pas le cas si, pour nous ne comptent que les plaisirs éphémères et souvent dégradants que Jésus a résumé par ces mots : beuveries, l’ivresse et les soucis de la vie. Si nous veillons amoureusement dans l’attente de sa venue, alors nous ne pourrons que nous réjouir de sa venue.
Par l’intercession de Notre Dame de Laghet demandons que nous soit accordée la grâce de tenir dans les épreuves en croyant que le dernier mot sera à Dieu et à sa justice. Demandons-lui aussi la grâce d’attendre, d’espérer, de hâter la venue de son Fils Jésus dans tous les cœurs afin que l’amour puisse enfin régner sur la terre comme au ciel.