L’Evangile que nous venons d’entendre, nous allons le réentendre dimanche ! Et comme je ne sais encore pas ce que je vais dire dimanche, je ne voudrais pas griller par avance mes cartouches ! Aussi, je vous parlerai de la 1° lecture. De cette lecture, j’aimerais retenir deux points : tout d’abord une invitation à ne pas confondre connaître et savoir et ensuite comprendre quelle est la nouveauté de ce commandement ancien qu’est le commandement de l’amour.
Dans la 1° partie de cette lecture, on peut dire que St Jean mettait les points sur les « i » en nous invitant à ne pas trop vite dire que nous connaissons le Seigneur. Bien-aimés, voici comment nous savons que nous connaissons Jésus Christ : si nous gardons ses commandements. Celui qui dit : « Je le connais », et qui ne garde pas ses commandements, est un menteur : la vérité n’est pas en lui. Peut-être que pour comprendre la portée de ces paroles, il est bon de se rappeler que St Jean écrit ses lettres au soir de sa vie, donc vers la fin du 1° siècle. C’était une époque qui n’était pas particulièrement simple pour les chrétiens puisque les communautés étaient persécutées. Les empereurs romains qui se sont succédé ont mené la vie dure aux chrétiens, parfois même une vie très dure. L’Apocalypse du même St Jean donnera, en langage codé, un écho de tous ces drames que pouvaient vivre les chrétiens.
En temps de persécution, la foi exige du courage parce qu’on la vit au péril de sa vie. Alors la tentation peut être grande de chercher à ménager la chèvre et le chou pour ne pas trop prendre de risques. Evidemment, je ne juge pas car je ne sais pas ce que je ferais si j’étais confronté à ce genre de situation. Toujours est-il que St Jean va faire une mise au point en disant que la foi ne consiste pas à dire des choses admirables sur Dieu, à savoir beaucoup de choses sur Dieu, avoir la foi, c’est d’abord, dit-il, garder les commandements et la 2° partie du texte nous montrera clairement qu’en parlant de commandements, il pense d’abord à celui qui les résume tous : le commandement de l’amour. Etre croyant, c’est donc vivre dans l’amour et amour qui prend des risques, un amour qui va même jusqu’à l’amour des ennemis, de ceux qui menacent nos vies.
On pourrait résumer cela en disant que St Jean nous invite à ne pas nous contenter de SAVOIR des choses sur Dieu, le connaître, c’est bien autre chose. De fait, aujourd’hui, on voit des personnes qui connaissent beaucoup de choses sur Dieu, ceci dit, il y en a quand même de moins en moins ! La plupart de nos contemporains sont plutôt guettés par un analphabétisme religieux. Mais il y a des personnes, moi, je connais la religion, j’ai été au catéchisme, j’ai appris par cœur les commandements et le reste, je connais ! Non, ils ne connaissent pas, ils savent … et il faudrait vérifier de près ce qu’ils pensent savoir ! Mais savoir n’est encore pas connaître. Je peux avoir avalé le Catéchisme de l’Eglise Catholique et rectifier tous ceux qui disent des erreurs sans vraiment connaître Dieu. Savoir et connaître, c’est bien différent. Je peux savoir beaucoup de choses sur telle ou telle personne, telle ou telle star sans connaître la personne. En effet connaître suppose de vivre des choses ensemble.
Eh bien, nous dit St Jen, celui qui connait le Seigneur, ce n’est pas celui qui sait des choses sur lui, mais seul peut prétendre le connaître, celui qui le fréquente vraiment. Et comment peut-on être sûr qu’une personne fréquente vraiment le Seigneur ? Eh bien, ça se voit dans sa manière de vivre l’amour. Parce que lorsqu’on fréquente Celui qui n’est qu’amour, on finit par lui ressembler. Au chapitre suivant, St Jean dira qu’on finit par devenir semblable à celui qu’on contemple. (1Jn 3,2) J’aime tellement cette parole qui donne du sens à l’adoration eucharistique : nous devenons semblables à Celui que nous contemplons. Voilà donc ce que c’est être chrétien, c’est fréquenter le Seigneur, pas nous contenter de savoir des choses sur lui, le fréquenter pour lui devenir semblables et vivre dans l’amour.
Dans la 2° partie de la lecture, St Jean va méditer sur la nouveauté de ce commandement ancien qu’est le commandement de l’amour. Vous entendez le paradoxe : il y a de la nouveauté dans ce commandement ancien.
Voilà ce que disait St Jean : Bien-aimés, ce n’est pas un commandement nouveau que je vous écris, mais un commandement ancien que vous aviez depuis le commencement… Et pourtant, c’est un commandement nouveau que je vous écris.
Oui, St Jean a raison, ce commandement de l’amour, il est ancien. D’ailleurs, Jésus, quand on lui demandera comment résumer toute la Loi répondra qu’on peut résumer toute la loi, tout le Premier Testament par le double commandement de l’amour : amour de Dieu et amour des frères. Il est donc très ancien ce commandement de l’amour. Pourtant avec Jésus, il acquiert une nouveauté radicale, pas forcément dans son contenu, mais surtout dans la manière de le vivre. La loi disait qu’il fallait aimer Dieu et son prochain, mais elle ne pouvait pas donner la force de le vivre. Car, vous en conviendrez, aimer, ce n’est pas simple tous les jours ! Ce n’est pas simple de vraiment aimer ceux avec qui nous vivons et dont nous connaissons tous les petits travers et qui eux aussi connaissent tous nos petits travers ! Il y a des jours où aimer peut sembler aussi de nos forces. Ces jours-là, on se réfugie dans la parole de St Paul qui dit : supportez-vous les uns les autres (Col 3,13) en disant que se supporter, ne pas s’entretuer, c’est déjà pas mal !
Mais la nouveauté, la nouveauté du christianisme, peut-on dire, c’est que Jésus n’est pas venu pour nous dire tout ce que nous devions faire, cela la loi le faisait parfaitement, Jésus est venu nous donner la force de vivre ce qu’il nous demandait. Quand il a quitté cette terre, Jésus n’a pas dit à ses apôtres : j’ai passé 3 ans avec vous, je vous ai tout bien montré ce qu’il fallait faire, maintenant, je pars, soyez à la hauteur ! Non ! Il leur a dit qu’ils allaient recevoir une force venue d’en haut, le Saint-Esprit et que c’était ainsi qu’ils pourraient vivre comme ses disciples. Cette force d’en haut, elle est venue sur eux et quand St Paul voudra rendre compte théologiquement de ce qui s’est passé à la Pentecôte, il dira : l’Amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné. Rm 5,5 recevoir le Saint-Esprit, c’était recevoir l’amour car l’Esprit-Saint est l’Amour qui unit le Père et le Fils.
Voilà donc la nouveauté du commandement : pour vivre dans l’amour, un amour vrai, un amour qui aille jusqu’au bout, nous ne sommes pas livrés à nos pauvres forces, nous pouvons compter sur la puissance de l’Esprit-Saint répandu dans nos cœurs.
Que Notre Dame de Laghet nous donne de compter plus souvent sur le Saint-Esprit pour aimer en vérité et qu’elle nous donne de réellement fréquenter le Seigneur pour lui ressembler.