Je donne cette exhortation à la maison Saint François de Dinard ce samedi 24. La maison Saint François est l’autre maison du Foyer de Charité de Tressaint, mais à Dinard et c’est une maison d’accueil … très accueillante pour passer des vacances ou prendre un temps de repos.

La louange, chemin de libération

J’ai cherché sur internet une homélie du père Cantalamessa dont j’avais besoin pour vérifier un détail pour l’homélie de demain, cette homélie je ne l’ai pas trouvée, par contre, l’Esprit-Saint est bon, je suis tombé sur une autre homélie du père Cantalamessa qui a tout de suite attiré mon regard parce qu’elle parlait de la louange en temps de crise et comme j’étais aussi branché sur la demande que Claire m’avait faite sur ce thème, je me suis dit que c’était un cadeau de la Providence ! Je vais donc m’inspirer très largement de cette homélie pour vous adresser ces quelques mots sur la puissance de la louange. Mais je voudrais d’abord dire quelques mots d’introduction.

Cette puissance de la louange, nous avons toujours besoin de nous la redire, de nous en convaincre à nouveau, surtout quand nous traversons des moments difficiles et nous traversons des moments difficiles à cause de cette pandémie. Bien sûr, la situation, dans notre région, ne semble pas très dramatique, n’empêche que les mesures sanitaires qui ne permettent pas d’accueillir nous empêchent, vous empêchent de déployer votre vocation. Et ne pas pouvoir vivre ce pourquoi on a donné notre vie, c’est forcément difficile. Et, au bout d’un moment, ça peut se ressentir sur notre moral, sur notre caractère, sur notre enthousiasme. Et vous savez que le mot enthousiasme, qui désigne une très belle qualité, vient du grec et suggère que le véritable enthousiasme est donné à ceux qui sont en Dieu : « en Theou. » Or quand on traverse des moments difficiles, c’est compliqué d’être en Dieu, de rester en Dieu, la prière devient plus difficile et la louange, peut-être encore plus ! Quand on arrive à prier, c’est plus pour demander ou pour râler que pour louer. Or, c’est la louange qui peut tout débloquer qui peut nous aider à retrouver notre enthousiasme. Et c’est donc là que l’homélie du père Cantalamessa est vraiment éclairante. 

Comme je vais beaucoup le citer, je ne vais pas dire à chaque fois que je le cite ! Certains appelleraient ce procédé du plagiat mais comme on n’ouvrira pas de procès en canonisation pour moi, on n’étudiera pas mes écrits, donc je peux me le permettre et en plus le père Conrad est mort donc je ne risque rien !

Vous connaissez forcément ce passage des Actes des apôtres puisque communautairement vous avez travaillé le livre des Actes. A Tressaint, je me suis joint à ce travail quand je suis arrivé. Ac 16, 22-26 nous raconte ce très bel épisode que je vais lire, mais auparavant, pour le goûter, il faut dire un mot du contexte. Paul a fait taire une femme qui avait un esprit divinateur, il a carrément expulsé cet esprit. Cette femme était une servante et ses maîtres ne sont pas du tout contents car ils imaginaient faire pas mal d’argent grâce à cet esprit divinateur de leur servante. Ils vont donc monter les gens contre Paul qui était accompagné de Silas. Voilà donc l’extrait que je lis maintenant  : « La foule s’ameuta contre eux (Paul et Silas), et les stratèges, après avoir fait arracher leurs vêtements, ordonnèrent de les battre de verges. Quand ils les eurent bien roués de coups, ils les jetèrent en prison, en recommandant au geôlier de les garder avec soin. Ayant reçu pareille consigne, celui-ci les jeta dans le cachot intérieur et leur fixa les pieds dans des entraves. Vers minuit, Paul et Silas, en prière, chantaient les louanges de Dieu ; les prisonniers les écoutaient. Tout à coup, il se produisit un si violent tremblement de terre que les fondements de la prison en furent ébranlés. À l’instant, toutes les portes s’ouvrirent, et les liens de tous les prisonniers se détachèrent. » 

Vous avez bien entendu : avec leurs vêtements lacérés, couverts de coups, les entraves aux pieds, Paul et Silas ne prient pas Dieu de les secourir, mais ils chantent les louanges de Dieu. Et c’est le fait de louer qui va être à l’origine de leur libération. Puissance de la louange ! 

Au moment où ils sont en grande difficulté, Paul et Silas louent le Seigneur, évidemment, ils ne le louent pas pour le mal qui leur arrive. Ils le louent parce qu’ils sont sûrs que Dieu pourra faire sortir un bien de ce mal. Finalement, on peut dire que la louange procède d’un acte de foi. Oui, ce que je vis est compliqué, mais je crois que Dieu reste Dieu même si, moi, et les autres, nous vivons une situation difficile. Il y a une parole de Saint Augustin  qui peut vraiment nous aider à comprendre comment la louange qui est un acte de foi est possible dans les difficultés: « Étant suprêmement bon, Dieu ne permettrait jamais à un mal quelconque d’exister dans ses œuvres s’il n’était assez puissant et assez bon pour faire sortir le bien du mal lui-même » (Enchir., 11,3). Voilà pourquoi nous louons Dieu, nous croyons que sa puissance reste entière et donc qu’il saura tirer du bien même de ce mal, pour nous et pour le monde. Nous le louons parce que nous sommes convaincus que ce que dit Paul en Rm 8,28 est vrai : « tout concourt au bien de ceux qui aiment Dieu. » et on peut rajouter pour élargir encore : tout concourt au bien de ceux que Dieu aime ! 

Dans la lettre aux Thessaloniciens, Paul recommandait d’ailleurs : « En toute chose, rendez-grâce » (1 Th 5, 18). Le père Cantalamessa commente en disant : Louange et action de grâce, doxologie et eucharistie sont les deux premiers devoirs de l’homme envers Dieu. Et il rajoute : Le péché fondamental de l’humanité, celui qui, selon Paul, est à la source de tous les autres péchés, c’est précisément le refus de ces deux attitudes et il cite un passage de la lettre aux Romains : « les hommes] sont inexcusables, car ayant connu Dieu, ils ne lui ont pas rendu comme à un Dieu gloire (doxazein) ou actions de grâces (eucharistein) » (Rm 1, 20-21). 

Et alors, le père Cantalamessa a cette très belle affirmation : en conséquence, l’exact opposé du péché n’est pas la vertu, mais la louange ! La louange de Dieu, faite dans les circonstances dramatiques actuelles, est la foi poussée à son degré le plus haut. Du coup, il invite le Renouveau Charismatique Catholique à revenir à ses origines en rappelant que dès sa naissance, il est apparu face au reste de chrétienté comme un peuple de louange, le peuple de l’alléluia. Et je rajoute que c’est pour cela qu’on s’est beaucoup moqué de ceux qui sont entrés dans ce courant de grâce.

Il y a un autre texte de l’Ecriture qui peut encore nous éclairer sur la puissance de la louange. Ce sont les fameux versets que nous chantons à l’office de Laudes les dimanches et jours de fête, la louange de ces 3 jeunes jetés dans la fournaise ardente. Je me permets de vous lire trois versets qui montrent que comme situation terrible, c’est difficile de faire mieux ! « Les serviteurs du roi qui les avaient jetés dans la fournaise ne cessaient d’alimenter le feu avec du bitume, de la poix, de l’étoupe et des sarments, et la flamme s’élevait de quarante-neuf coudées au-dessus de la fournaise. En se propageant, elle brûla ceux des Chaldéens qu’elle trouva autour de la fournaise. » La flamme s’élevait de 49 coudées, c’est-à-dire à peu près 25 mètres ! Ce n’est pas rien, or, que lit-on à la suite : « d’une seule voix, les trois jeunes gens se mirent à louer, à glorifier et à bénir Dieu en chantant … » et c’est là que commence le cantique que nous connaissons bien. Les plus grands miracles de l’Esprit Saint ne sont pas obtenus en réponse à nos supplications, mais en réponse à notre louange.

Oui la louange est extrêmement puissante parce qu’elle me décentre de moi, de mes problèmes et qu’elle m’invite à la foi, à croire que Dieu reste Dieu et c’est bien ce que je dis dans la louange. Invoqons donc l’intercession de Paul et Silas et de ces 3 jeunes pour que notre louange retrouve toute sa vigueur et nous obtienne tous les miracles dont nous avons besoin puisque, avec le père Cantalamessa, nous croyons que « Les plus grands miracles de l’Esprit Saint ne sont pas obtenus en réponse à nos supplications, mais en réponse à notre louange. »