Après les difficultés rencontrées à Antioche de Pisidie, Barnabé et Paul sont partis pour rejoindre Iconium.
Iconium, pour moi, ça évoque un souvenir très précis car j’ai eu la chance d’accompagner un pèlerinage en Turquie sur les pas de St Paul. Iconium qui devait être une petite ville du temps de Paul est devenue une très grande ville de plus de 2 millions d’habitants ! Eh bien, dans cette ville de 2 millions d’habitants, il n’y a plus que 2 chrétiennes et encore, l’évêque les a fait venir d’Italie. Ce sont 2 laïques consacrées qui, par leur présence, essaient de faire en sorte que la flamme de la présence chrétienne ne s’éteigne pas totalement ! Pour moi, ça avait été un choc terrible, cette ville dans laquelle le christianisme s’était très vite enraciné et développé, qui faisait partie des toutes premières villes païennes devenues chrétiennes, dans cette ville, il n’y a plus que deux chrétiennes courageuses venues d’Italie pour répondre à l’appel de l’Eglise.
Hélas, ce n’est pas le seul lieu où on peut rencontrer cette situation. Pensons à l’Afrique du Nord dans laquelle ont brillé tant de belles figures comme Augustin à Hippone, aujourd’hui Annaba en Algérie, ou Tertullien et Cyprien à Carthage en Tunisie actuelle, ville qui avait aussi recueilli le martyr de Félicitée et Perpétue. On peut dire que l’Afrique du Nord était le fleuron de l’Eglise d’Occident. Aujourd’hui, dans ces différentes Eglises, la situation est assez semblable à celle d’Iconium, le christianisme ne s’y maintient que grâce à la présence de missionnaires étrangers, souvent très courageux … car il fallait et il faut encore du courage pour rester même si la situation semble un peu moins dramatique. Avec le martyr des frères de Tibhirine, auquel il faut rajouter 12 autres martyrs dont Mgr Claverie, l’évêque d’Oran, nous avons pu mesurer le prix qu’il fallait être prêt à payer pour que cette flamme du christianisme ne meure pas, là où elle avait été allumée quasiment en premier.
Nous remettre tout cela en mémoire, ça ne peut que nous encourager à accueillir avec plus de détermination les invitations répétées du pape François à devenir des disciples-missionnaires. Evidemment, ce n’est pas lui qui est à l’origine de la relance de la nouvelle évangélisation dont Jean-Paul II s’était fait le chantre après Paul VI déjà. Mais il y a, aujourd’hui, un caractère d’urgence encore plus marqué et l’urgence d’évangéliser se situe encore plus chez nous. Bien sûr les statistiques peuvent nous anesthésier, il y a encore pas mal de personnes qui se disent chrétiennes. Mais combien le sont vraiment en faisant des choix cohérents avec leur foi, en participant au rassemblement des chrétiens. Avec le confinement, nous avons entendu s’exprimer une soif de pouvoir communier, de pouvoir participer à la messe … et on comprend bien tous ceux qui en ont été privés. Mais pour la plupart de nos concitoyens, le shopping ou un bon restau leur aura plus manqué que la messe ! En son temps, Jean-Paul II avait eu cette parole que je trouve si percutante, c’était dans l’exhortation publiée après le synode sur l’Europe. Il disait que dans la vieille Europe, le défi n’était pas tant de baptiser les convertis que de convertir les baptisés !
Oui, c’est un vrai défi que nous devons prendre au sérieux si nous ne voulons pas que nos terres chrétiennes ressemblent un jour à Iconium ! Jésus lui-même nous avait invité à ne jamais nous laisser endormir par des statistiques rassurantes en posant cette question : « Le Fils de l’homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » Je ne dis pas cela pour nous inquiéter mais parce que nous avons périodiquement besoin d’être réveillés et de mesurer à nouveau l’urgence de l’évangélisation. Nous avons toujours à nous interroger pour savoir si la parole de Jean-Paul II n’est pas à entendre aussi chez nous : l’urgence ne consiste pas tant à baptiser les convertis qu’à convertir les baptisés. Méfions-nous de ne pas croire trop vite que, chez nous, les jeunes et leurs familles ne sont pas comme ailleurs !
Pour évangéliser, pour devenir toujours mieux disciples-missionnaires, deux repères nous sont donnés dans ces textes.
- La suite de la 1° lecture nous invite à rester vigilants par rapport à ce qui manifeste un trop grand attachement à l’évangélisateur. Le rapport qui nous a été lu doit nous rendre encore plus attentifs pour réagir à tout ce qui ressemble de près ou de loin, dans les paroles ou les attitudes à ce que disaient les gens de Lystres : « Les dieux se sont faits pareils aux hommes, et ils sont descendus chez nous ! »
- L’autre repère, c’est ce que Jésus dit dans l’Evangile, de très belles paroles qui justement nous éviteront de tomber dans le piège que je viens d’évoquer. « Si quelqu’un m’aime, il gardera ma parole, mon Père l’aimera, nous viendrons vers lui et, chez lui, nous nous ferons une demeure. » Celui qui se laisse habiter, travailler, corriger, encourager par la Parole de Dieu qu’il fréquente vraiment, son cœur deviendra une demeure pour la Trinité. C’est vraiment scotchant d’entendre ça, notre cœur, une demeure pour la Trinité. Alors forcément, elles deviendront attirantes ces personnes dont le cœur est devenu une demeure pour la Trinité, mais il n’y aura plus de risque, ce n’est pas d’elles qu’elles parleront, ce n’est pas elles qu’elles chercheront à faire admirer mais la Trinité qui les habite.
Pour ne jamais l’oublier, demandons au St Esprit de nous le rappeler, demandons-lui de nous aider à lutter contre tout risque de dérapage puisqu’il est le Défenseur et qu’il nous enseignera tout et nous fera souvenir de tout ce que Jésus ne cesse de nous dire.
C’est si vrai et si lumineux ,père ,la photo que vous nous offrez de contempler du ou de la véritable missionnaire:
« Alors,forcément, elles deviendront attirantes ces personnes dont le cœur est devenu une demeure pour la Trinité, mais il n’y aura plus de risque, ce n’est pas d’elles qu’elles parleront, ce n’est pas elles qu’elles chercheront à faire admirer mais la Trinité qui les habite. »