Dans la 1° lecture, nous avons entendu le récit de cette raclée que le prophète Elie a mise aux prêtres de Baal ! Pourquoi y avait-il, en Israël, tant de prêtres de ce dieu païen ? Tout simplement parce que le roi avait épousé une païenne qui était venue avec ses dieux et leurs prêtres. Le culte à Baal s’était donc répandu et ça ne plaisait pas du tout à Dieu qui l’a fait savoir à son prophète. Dieu n’était pas content de voir son peuple attiré par les Baals car l’une des significations de ce nom, c’est propriétaire. Il s’agit donc de savoir une bonne fois pour toutes à qui appartient ce peuple : est-il à Baal, ce dieu païen, comme le prétendent la reine Jézabel et ses prêtres ou est-il au Dieu des Pères qui a tout fait pour lui ? D’où cette mise en demeure du prophète entendue au début de la lecture : Combien de temps allez-vous danser pour l’un et pour l’autre ? Si c’est le Seigneur qui est Dieu, suivez le Seigneur ; si c’est Baal, suivez Baal.
Le prophète Elie a donc imaginé cette mise en scène grandiose afin de prouver définitivement que Baal est un usurpateur. De fait, il va se révéler incapable de faire tomber le feu du ciel sur le sacrifice préparé par ses prêtres qui, pourtant, sont en très grand nombre et multiplient les incantations. Au passage, Elie va même se permettre de charrier les prêtres de Baal : « Criez plus fort, puisque c’est un dieu, il est forcément préoccupé par des soucis ou il règle des affaires, ou bien il est en voyage ; il dort peut-être, mais il va se réveiller ! » Elie a intérêt à réussir parce qu’après les avoir brocardés de cette manière, il ne peut pas se permettre un échec ! Mais il est tranquille, il a foi en Dieu ! Alors, seul, sans aucun moyen, il ose encore se compliquer la tâche en versant de grandes quantités d’eau sur le bois. Et voilà que par une simple prière, Elie va obtenir ce qu’il demande : le feu du ciel tombe sur l’autel. Le Seigneur, le Dieu des Pères a montré qui est le boss, qui est le propriétaire ! Le Peuple le reconnait en répétant : « C’est le Seigneur qui est Dieu ! C’est le Seigneur qui est Dieu ! »
Je dis un petit mot de la suite parce que nous ne l’entendrons pas, le lectionnaire de la liturgie a fait ce choix sans doute pour nous épargner une scène particulièrement sanglante. Pour Dieu, c’était fini, la preuve avait été apportée que Baal était un usurpateur. Oui, pour Dieu, c’était suffisant, mais pas pour Elie qui décide d’égorger les 450 prêtres de Baal en pensant rendre gloire à Dieu. Elie a beau être prophète, il est encore loin de connaître vraiment Dieu. Parce que, bien évidemment Dieu ne le lui avait pas demandé et ne pouvait se sentir glorifié par ce massacre. Dieu avait manifesté sa puissance, il n’y avait pas à humilier encore plus ces hommes, et encore moins à les tuer. Pour Dieu la vérité ne s’imposera jamais par la violence, elle doit triompher en rayonnant à travers le témoignage des hommes qui la défendent.
Retenons les leçons de ce texte, j’en mets deux en avant :
- 1/ La mise en scène d’Elie nous montre à l’évidence que ce n’est pas la puissance des moyens qui donne la victoire. Nous rêvons souvent d’avoir toujours plus de moyens à notre disposition pour réussir ce que nous entreprenons, pour mener à bien nos projets, mais, en fait c’est de foi que nous manquons le plus souvent ! Plus que l’accroissement de nos moyens, c’est l’accroissement de notre foi qu’il faut demander.
- 2/ Quand nous rêvons d’humilier ceux qui se mettent en travers de notre route pour bloquer nos projets ou au moins les contrarier, ayons bien conscience que ce désir ne peut jamais venir du Seigneur ! Tôt ou tard, la violence que nous utilisons pour humilier se retournera contre nous, qu’il s’agisse de violence en parole ou en actes.
Venons-en à l’Evangile dans lequel nous avons entendu la parole qui se trouve sur le livre que tient ouvert l’enfant Jésus, dans les bras de la statue de Notre Dame de Laghet. Nous pouvons être étonnés d’entendre Jésus dire : « Ne pensez pas que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes : je ne suis pas venu abolir, mais accomplir. » ou encore : « pas un seul iota, pas un seul trait ne disparaîtra de la Loi. » Jésus en défenseur de la Loi, ça nous étonne parce qu’on a plus l’habitude de le voir ferrailler au sujet de la Loi avec les pharisiens
En fait, ce n’est jamais la Loi que Jésus remet en question, comment pourrait-il le faire puisque la loi a été donnée par Dieu ! C’est au légalisme que Jésus s’attaque et le légalisme, parce que c’est une maladie, Jésus ne peut le supporter. C’est St Paul qui donnera toute la clarté nécessaire à cette déclaration de Jésus dans la lettre aux Romains. Il dira que l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour. Rm 13,10. Jésus recadre donc les pharisiens et tous ceux qui auraient tendance à se laisser aller à un légalisme étroit, la loi, son seul but, c’est de conduire à l’amour. Si l’homme n’était pas pécheur, il n’y aurait pas besoin de loi, il serait naturellement porté à faire le bien, mais comme ce n’est pas le cas, alors il faut la loi qui donne un cadre pour éviter de faire n’importe quoi.
Oui, l’accomplissement parfait de la loi, c’est l’amour, il n’y a donc pas à supprimer la loi, il suffit juste de la libérer du corset trop serré du légalisme dans lequel elle finit par étouffer. En effet, quand elle est bien comprise bien vécue, elle va permettre de ne pas seulement parler d’amour ou d’avoir des idées sur l’amour, mais de nous y engager totalement et tous les jours puisque l’accomplissement parfait de la Loi, c’est l’amour !
Par l’intercession de Notre Dame de Laghet demandons que la grâce nous soit donnée de pouvoir tout vivre dans l’amour.