16 août : lundi 20° semaine ordinaire. Tout bien que tu détiens est un lien qui te retient !

Ces prochains jours, la 1° lecture nous fera lire des extraits du livre des Juges. Quelques mots pour situer ce livre et sa problématique. La semaine dernière, avec Josué, nous enfin étions enfin entrés en Terre Promise après ces 40 années d’errance et d’épreuves dans le désert. Le pays va être partagé pour que chacune des 12 tribus en reçoive une partie. En fait, il ne sera pas partagé en 12 parts, mais seulement en 11, puisque la tribu de Lévi chargée d’assurer le culte ne recevra aucune part de territoire, sa part ce sera le Seigneur lui-même et son service. Mais comme cette magnifique déclaration spirituelle ne suffit quand même pas à se nourrir, ceux qui composent cette tribu seront autorisés à prélever leur subsistance sur les sacrifices offerts. Le Denier de l’Eglise, à l’époque, se payait en nature ! Tout aurait donc pu aller pour le mieux dans le meilleur des mondes ! Mais ça ne sera pas le cas et cela pour deux raisons essentielles.

  • Première raison, le pays donné par Dieu n’était pas tout à fait libre, des peuplades l’occupaient dont vous avez sûrement déjà entendu les noms : les Hitites, les Jébuzites, les Madianites et d’autres encore. Cette Terre promise, il va donc falloir la conquérir dans des batailles qui ne se termineront pas aussi vite que souhaitées.
  • Deuxième raison, le pays a été partagé, mais il y aura beaucoup de mécontents. C’est en grande partie, un tirage au sort qui répartira les territoires en fonction des tribus. Je dis en grande partie, car Moïse avait déjà fait des promesses précises à quelques tribus. Vous savez quand on partage un gâteau, il y a toujours des mécontents qui estiment que la part du voisin est plus grosse et que, évidemment, comme toujours on lui a donné la part sur laquelle il y avait le moins de crème !

Tout cela va donc générer des conflits qui pourrissent la vie quotidienne. Et avec tout ça, Moïse qui avait été, pendant les 40 années de traversée du désert, expert en résolution des conflits était mort depuis belle lurette et Josué son successeur était mort également. C’est pour faire face à cette situation compliquée, si souvent conflictuelle, que Dieu va susciter des juges, ces personnages assez hauts en couleur qui n’auront jamais des missions faciles. C’est donc une partie de leurs aventures que nous allons lire dans la 1° lecture jusqu’à jeudi inclus.

Et la 1° lecture d’aujourd’hui ajoutait une raison supplémentaire aux difficultés que j’évoquais : c’est l’inconstance du peuple. Non seulement, il fallait sans arrêt faire la guerre aux peuplades qui occupaient le pays et qui revenaient sans arrêt à la charge pour récupérer les territoires perdus, non seulement il y avait des conflits internes, suscités par la jalousie entre tribus, mais, en plus, il y avait cette inconstance du peuple séduit par le culte des idoles. On a entendu le nom de deux de ces idoles : Baal et à Astarté. Ces divinités étaient censées favoriser la fécondité non seulement pour les hommes mais aussi pour les récoltes. Dans un pays où on manque cruellement d’eau, on comprend que ces divinités aient pu exercer une véritable attraction. Du coup en plus d’être des chefs de guerre et des juges de paix, les juges seront aussi chargés de remettre le peuple sur le bon chemin en les ramenant vers Dieu.

Après ce panorama général, de cette lecture, je ne retiendrai qu’un seul point. En lisant ces textes, on a quand même l’impression que Dieu n’est pas très miséricordieux. Oui, bien sûr, on comprend que Dieu soit fatigué des infidélités récurrentes de son peuple, mais il ne les rate pas et la sanction parait lourde ! Comme moi, vous avez entendu ces paroles terribles : « Alors la colère du Seigneur s’enflamma contre Israël. Il les livra aux mains des pillards, les abandonna aux ennemis qui les entouraient, et ils furent incapables de leur résister. Dans toutes leurs expéditions, la main du Seigneur était contre eux, pour leur malheur …Ils furent dans une très grande détresse. » On comprend qu’en entendant de telles paroles certains aient du mal à lire le Premier Testament ! Pour bien comprendre le sens de ces paroles donc pour pouvoir lire ce genre de textes, il me semble qu’il est important de faire une double mise au point.

  • D’abord, il faut accepter qu’il y ait une progression dans la Révélation. D’emblée, Dieu a voulu se faire connaître tel qu’il était : lent à la colère et plein d’amour. Mais ça allait tellement à l’encontre de ce que les hommes pensaient qu’il leur faudra du temps pour intégrer cette sublime révélation. Il faudra que Jésus lui-même vienne attester de ce qu’il a contemplé de Dieu. Avec le livre des Juges, nous sommes donc dans les débuts de la Révélation, ne nous étonnons donc pas que les hommes n’aient encore pas tout compris de Dieu et que les auteurs bibliques parlent comme les hommes de leur temps avec les idées de hommes de leur temps.
  • Et puis, deuxième élément de la mise au point, même si Dieu est lent à la colère et plein d’amour, il ne faudra jamais oublier que le péché a toujours des conséquences. Dieu peut pardonner sans se lasser le péché des hommes, n’empêche que ce péché a des conséquences et c’est ce qui lui donne un caractère de gravité. Si je blesse au visage une personne avec un couteau, la personne peut me pardonner, Dieu peut me pardonner n’empêche que la personne est défigurée pour le reste de ces jours … et il n’y a pas forcément besoin d’un couteau pour blesser une personne et la défigurer. Ne l’oublions jamais : notre péché a toujours des conséquences. Et je crois que c’est de cette manière qu’il faut interpréter tout ce qui est dit de la punition de Dieu dans le Premier Testament. En parlant de punition de Dieu, les auteurs bibliques veulent en fait parler des conséquences inéluctables du péché, mais ils en parlent en hommes de leur temps.

Quant à l’Evangile, il constitue un beau cadeau en ce début de retraite ! Voilà un homme qui vient voir Jésus parce qu’il veut avoir la vie, une vie plus plus plus, la vie éternelle ! Si vous êtes venus en retraite, c’est bien parce que, vous aussi, vous voulez une vie plus plus plus. Et s’il y a des membres de Foyer pour vous accueillir et des amis du Foyer pour vous accompagner dans la prière, c’est parce qu’ils ont fait l’expérience que cette vie plus plus plus, elle est un cadeau de Jésus. Voilà pourquoi ils ont décidé de donner leur vie en se mettant à votre service, c’est pour vous permettre, à votre tour, de faire cette expérience. La réponse de Jésus à cet homme qui veut une vie plus plus plus ne peut donc que nous intéresser. Cette réponse se fait en deux temps.

  • Premier temps, la vie plus plus plus, elle exige d’abord que tu te conduises honnêtement. C’est ce que Jésus affirme en rappelant les commandements élémentaires. Autrement dit, ne rêve pas à de grands élans mystiques si tu ne commences pas par le b.a. ba : mener une vie honnête. C’est une condition indispensable mais non suffisante. En menant une vie honnête, tu te détacheras d’une vie médiocre, c’est déjà un pas décisif, mais ce n’est encore pas la vie plus plus plus dont tu rêves.
  • Deuxième temps, accrochez-vous, ça va se corser : « va, vends ce que tu possèdes, donne-le aux pauvres ! » Je ne sais pas si vous connaissez ce sketch des inconnus qui s’intitule malicieusement « Skippy le grand gourou » ? Pour ceux qui n’auraient pas compris le jeu de mots, Skippy, c’est un nom d’un kangourou ! Ici, donc, le grand gourou Skippy dit à ses adeptes pour mieux les plumer : « Tout bien que tu détiens est un lien qui te retient ! » Pas mal la formule ! « Tout bien que tu détiens est un lien qui te retient ! » Evidemment, c’est exagéré, mais c’est quand même vrai qu’il y a des biens que je détiens qui peuvent devenir des liens qui me retiennent. Et ce n’est pas seulement vrai des biens matériels, je peux être soucieux de ma réussite, de ce que je donne à voir de moi et de tant d’autres choses. Alors, Jésus est finot, il ne dit pas : « donne tes biens aux pauvres. » Ça serait terrible de leur refiler les biens que tu détiens pour que ces biens se mettent à retenir ceux qui les reçoivent. Non, il dit : vends tout ça, débarrasse-toi de tout ça et aux pauvres tu leur offriras le fruit de ta liberté reconquise.

C’est donc une triple grâce que nous sommes invités à demander en ce début de retraite. Première grâce, vouloir rompre avec le péché pour ne plus faire porter aux autres les conséquences de notre péché. Deuxième grâce nous débarrasser, dans la confession, le plus vite possible de nos écarts par rapport à vie honnête. Troisième grâce : voir dans les biens que tu détiens ce lien qui te retient ou ces liens qui te retiennent pour les couper afin de reconquérir ta liberté intérieure.

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