Vous avez facilement remarqué que la 1° lecture que nous avons entendue fait immédiatement suite au passage entendu hier. Les rédacteurs du lectionnaire liturgique ont d’ailleurs voulu le signifier clairement en reprenant le dernier verset du texte d’hier sur lequel je m’étais arrêté : « c’est pour que nous soyons libres que le Christ nous a libérés. »
Hier, je nous invitais à profiter de cette retraite pour reconquérir notre liberté intérieure, il me semble que le passage d’aujourd’hui nous donne quelques précisions pour comprendre comment nous pourrons la reconquérir. Une retraite, c’est un peu comme le carême, c’est un temps au cours duquel, généralement, nous prenons des résolutions et il faut bien en prendre si nous ne voulons pas glisser progressivement dans la tiédeur qui conduit vite à la médiocrité. Seulement voilà, les résolutions, nous finissons par être fatigués d’en prendre parce que nous savons comment ça se termine. Elles finissent bien rangées dans le placard à bonnes résolutions ! D’ailleurs, au lieu d’en prendre de nouvelles, on ferait mieux d’aller ressortir de ce placard celles qu’on n’a pas usées !
Quand Paul dit : « Tenez bon, ne vous mettez pas de nouveau sous le joug de l’esclavage. » Je l’entends presque nous mettre en garde contre cette propension à prendre des résolutions, toujours plus de résolutions et des résolutions toujours nouvelles et toujours plus exigeantes. Cette manière de fonctionner nous fait vite tomber dans la religion de la transpiration dans laquelle nous faisons rimer foi et loi. Or, nous savons que Paul a refusé de faire rimer foi et loi. Evidemment, lui le juif, fier de l’être, n’avait rien contre la loi. Jésus non plus, et ça serait faire une lecture caricaturale de l’Evangile d’aujourd’hui que de tirer la conclusion que Jésus s’affranchit allègrement de la loi pour la ranger aux oubliettes. Dans cette réflexion sur la Loi, il faut se garder de toute simplification paresseuse. Pour le dire en quelques mots, Paul n’a rien contre la loi, comme tout bon juif, il sait qu’elle est un don de Dieu et que Dieu ne peut pas faire des cadeaux empoisonnés ! Mais Paul a vite compris, parce qu’il s’y est lui-même cassé les dents lui-même, que si la loi montre le bien, elle ne donne pas la force de l’accomplir. Moi, ce dont je rêve, ce n’est pas que quelqu’un m’explique comment c’est au sommet du Mont Blanc et qu’il m’explique en détail comment on y parvient, ce dont je rêve, c’est de quelqu’un qui me permette d’y monter !
Et c’est exactement ce qui se passe avec nos résolutions, elles disent ce qu’il serait bien de faire, mais elles ne donnent pas la force de l’accomplir. Elles nous font rêver à une vie meilleure, à une liberté retrouvée, à des choix posés clairement pour grandir et faire grandir dans l’agapê. Oui, mais voilà, ça reste souvent des rêves qui peuvent nous stimuler un temps et finir par nous déprimer en constatant que ces rêves n’étaient pas pour nous. Nous rêvions de tutoyer les sommets de l’agapê et comme nous peinons déjà à nous hisser et à nous maintenir sur les petites collines du dévouement honnête, nous rabaissons le niveau des exigences en finissant par nous contenter de peu. Et, pour ne pas trop déprimer, nous nous justifions en disant : le Bon Dieu m’aime comme je suis !
Oui, bien sûr qu’il nous aime tels que nous sommes. Bien sûr que notre pauvreté, notre inconstance et nos égarements ne le découragent pas de nous aimer, mais il ne veut pas que nous végétions dans la médiocrité parce que lui, il a de beaux et de grands rêves pour nous. Et pas seulement pour nous mais pour que nous puissions entrainer sur les sommets de l’agapê tous ceux qui nous sont confiés ! Alors, comment ça va être possible ?
Eh bien, il nous faut écouter jusqu’au bout la lecture et entendre le secret que Paul nous livre : « Nous, c’est par l’Esprit, en effet, que, de la foi, nous attendons la justice espérée. » Je traduis à ma manière : ce ne sont pas nos résolutions et les maigres efforts inconstants qui nous permettront de devenir des justes, c’est-à-dire qui nous ajusteront à Dieu, c’est l’Esprit-Saint. « Nous, c’est par l’Esprit, en effet, que, de la foi, nous attendons la justice espérée. »
Il y a quelques semaines, une chanteuse populaire est décédée, je lui emprunte souvent l’un de ses refrains les plus connus pour résumer notre malaise, notre inconfort et même nos découragements : « J’voudrais bien, mais j’peux point ! » Oh oui, comme je voudrais être ajusté à Dieu, être un bon prêtre, un bon diacre, un bon père et époux, une bonne mère et épouse. Oh oui, comme je voudrais être ajusté à Dieu pour avoir un cœur miséricordieux à l’égard des fratelli tutti ! « Oui, j’voudrais bien, mais j’peux point ! » C’est sûr que si je ne compte que sur mes forces, sur ma bonne volonté, mes résolutions ma vie va très vite se résumer avec les mots d’une autre chanson, mais celle-là, pour les enfants : 3 pas en avant, 3 pas en arrière, 3 pas sur le côté, 3 pas de l’autre côté ! Ce n’est évidemment pas en marchant ainsi qu’on parviendra au sommet de l’agapê !
« Nous, c’est par l’Esprit, en effet, que, de la foi, nous attendons la justice espérée. » dit Paul. Quand est-ce que nous allons y croire vraiment ? Vous savez l’Esprit-Saint, c’est un peu comme un ordinateur, du moins pour moi qui ne suis pas un spécialiste en informatique. Je dois utiliser à peu près 20% des capacités de mon ordinateur. Eh bien l’Esprit-Saint, c’est pareil, nous n’utilisons qu’un infime pourcentage de sa puissance, cette puissance qui est pourtant mise à notre disposition pour nous permettre de tutoyer les sommets de l’agapê et de ne plus nous contenter des collines du dévouement honnête.
Ce n’est pas moi qui l’invente, c’est Paul qui le dit avec des mots d’une puissance inouïe dans la lettre aux Ephésiens : « Que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père dans sa gloire, vous donne un esprit de sagesse qui vous le révèle et vous le fasse vraiment connaître. Qu’il ouvre à sa lumière les yeux de votre cœur, pour que vous sachiez quelle espérance vous ouvre son appel, la gloire sans prix de l’héritage que vous partagez avec les fidèles, et quelle puissance incomparable il déploie pour nous, les croyants : c’est l’énergie, la force, la vigueur qu’il a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts et qu’il l’a fait asseoir à sa droite dans les cieux. » Est-ce que vous avez bien entendu ? Je la redis en mettant les groupes de mots dans un ordre un peu différent pour que nous réalisions mieux : « l’énergie, la force, la vigueur qu’il a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts, cette puissance incomparable il la déploie pour nous, les croyants ! » Vous avez entendu : cette puissance incomparable il la déploie pour nous, les croyants.
Est-ce que nous y croyons vraiment ? J’ai fait une retraite avec un vieux père jésuite qui régulièrement tapait sur la table et hurlait presque en demandant : Est-ce que vous croyez ou est-ce que vous croyez que vous croyez ? Est-ce que nous croyons que « l’énergie, la force, la vigueur qu’il a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts, cette puissance incomparable il la déploie pour nous, les croyants en nous donnant le Saint-Esprit ? »
« C’est par l’Esprit, en effet, que, de la foi, nous attendons la *justice espérée* »…
Amen !
Oui, je crois !!! 🙂
Oui,je le crois…merci
Je vois que nous n’avons pas les mêmes valeurs : hier, je vous parlais d’Aznavour ; de votre côté vous êtes pro Annie Cordy.
Mais je vous rassure : je connais aussi le répertoire de cette dernière : Tata yoyo, qu’est-ce qu’y a sous ton grand chapeau ?
Et bien, pour moi, sous mon grand chapeau se trouve ma tête et à l’intérieur de celle-ci un cerveau. Et ce dernier n’est pas lent ; il est même comparable à un disque dur (et non un CD) qui a une grande capacité de mémoire. Et là encore, cela rejoint votre homélie du lundi 12 octobre qui disait de ne pas avoir la mémoire courte mais plutôt de revisiter notre journal de notre vie, histoire de se souvenir de notre amour premier avec le Christ.