En ce dimanche, les lectures sont au choix, j’ai choisi : Sg 3, 1-6.9 ; 1 Co 15, 51-57 ; Jean 6, 37-40
Il n’est pas très fréquent que le 2 novembre, jour de la commémoration de tous les défunts, tombe un dimanche, la dernière fois, c’était en 2014 et la prochaine fois, il faudra attendre moins longtemps puisque ça sera en 2031 ! D’habitude, nous célébrons donc cette mémoire des défunts en semaine, avec une assemblée clairsemée, aujourd’hui, c’est un dimanche avec une assemblée plus fournie même si un certain nombre de chrétiens vont se contenter d’être allé à la messe hier, pour la grande fête de Toussaint. Célébrer les défunts un dimanche, c’est une belle occasion de nous remettre face à cette réalité incontournable qu’est la mort. Et Dieu sait si cette réalité qu’on cherche souvent à occulter va être de grande actualité prochainement quand les députés vont débattre de la loi concernant la fin de vie … s’ils arrivent à voter le budget, bien sûr ! Alors profitons de cette opportunité que nous offre la liturgie pour réfléchir quelques instants sur la mort. Et je voudrais le faire en deux points.
Pendant de nombreuses années, dans mon ministère, je me suis occupé de jeunes et donc, en été, je faisais des camps avec eux, la plupart du temps en montagne. Quand les jeunes rouspétaient parce que la balade étaient trop dures, certains disaient : je m’arrête, je reste là et tu seras bien obligé de venir me chercher et dans tous les camps les animateurs répondaient à peu près la même chose : tu peux rester et je ne viendrai pas te chercher car nous avons droit à 10% de perte ! Je ne sais pas d’où venait cette histoire, fausse, bien heureusement, mais il y avait toujours ce droit à 10% de perte. Lui, Jésus dans l’Evangile que nous avons entendu, il ne parle pas du tout comme ça. Vous avez entendu, lui, c’est à 0% de perte qu’il a droit ! La volonté de mon Père qui m’a envoyé, c’est que je ne perde aucun de ceux qu’il m’a donnés, mais que je les ressuscite au dernier jour. Voilà les choses sont dites clairement : Jésus est venu sur terre, envoyé par le Père avec une mission précise : sauver tous les hommes, n’en perdre aucun. Ça, c’est le désir de Dieu, maintenant, du côté des hommes, pour qu’ils soient sauvés, encore faut-il qu’ils le veuillent. Comme le disait St Augustin que notre pape Léon aime tant citer : le Dieu qui t’a fait sans toi ne te sauvera pas malgré toi !
Comme il nous est bon d’entendre ces paroles en ce jour où nous faisons mémoire de nos chers défunts. S’ils ont accepté de se jeter dans les bras miséricordieux du Seigneur, oui, ils seront sauvés. Certes, il y aura un passage nécessaire à la douche purificatrice qu’on appelle le purgatoire, mais la volonté de Dieu est claire : il veut qu’aucun des hommes, ses enfants, ne soit perdu. Bien sûr, tout cela mériterait plus de développements, mais je n’ai pas le temps de le faire, par contre dans l’enseignement de cette après-midi, je prendrai le temps de le faire. Voilà, c’était mon 1° point ! Avant de passer au second, je cite aussi cet extrait de la 1° lecture tirée du livre de la Sagesse qui disait : Les âmes des justes sont dans la main de Dieu ; aucun tourment n’a de prise sur eux. Aux yeux de l’insensé, ils ont paru mourir ; leur départ est compris comme un malheur, et leur éloignement, comme une fin, mais ils sont dans la paix. Nous sommes dans la main de Dieu depuis le moment de notre conception jusqu’à notre morte et ce qui suivra la mort.
Mais alors, me direz-vous, si nous sommes dans la main de Dieu pourquoi certains connaissent-ils une mort si brutale, si injuste. Nous ne pouvons pas répondre à cette question, c’est le grand mystère de la vie dont la mort fait partie. Mais ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas Dieu qui programme tout. Ce même livre de la Sagesse, dans les tout premiers versets affirme : Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. (Sg 1,13-15). Dans les formules de faire-part de décès, il en est une que je trouve particulièrement horrible : il a plu à Dieu de rappeler à lui Mr X ou Mme Z. Heureusement, en principe, on ne l’utilise pas quand c’est un enfant ou un jeune qui meurt. Mais certains donnent encore cette interprétation épouvantable à la mort d’un enfant : Dieu l’a pris car il avait besoin d’un ange. Non ! Dieu n’a pas fait la mort, il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Jésus, lui-même, a pleuré devant la mort de son ami Lazare. C’est donc bien le signe que Dieu n’a pas fait la mort, qu’il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants.
Je me rappelle avoir expliqué cela dans un enseignement que j’avais donné en Afrique au cours d’un de mes séjours. Et une personne m’a dit : mais ici, mon Père, tous les faireparts disent que Dieu a rappelé à lui la personne défunte. Sommes-nous de si mauvais chrétiens que ça ?
Comme toujours, dans ces situations difficiles, j’ai vite demandé au St Esprit de me donner la bonne parole, la bonne réponse et je me suis entendu répondre à peu près ceci. Cette formule peut être juste mais uniquement à une condition. Si vous dites qu’une personne est morte parce que Dieu l’a rappelée, ce n’est pas juste parce que Dieu n’a pas fait la mort, et qu’il ne se réjouit pas de voir mourir les êtres vivants. Mais, peut-être voulez-vous dire autre chose, peut-être voulez-vous dire que c’est la mort qui avait appelé cette personne et, avec la mort, le néant, et que Dieu, lui, il a appelé cette personne pour que la mort et le néant ne la gardent pas. Si c’est cela que vous voulez dire, alors c’est très juste parce que Dieu veut qu’aucun de ses enfants ne soient perdus dans le néant de la mort. C’est un peu ce que nous disait St Paul dans la 2° lecture en nous parlant de la victoire du Christ sur la mort. Pour les chrétiens, la mort n’aura pas le dernier mot, le dernier mot sera à la vie. Et c’est en ce sens qu’on pourrait dire que Dieu a appelé une personne, il l’a appelée à la vie pour que la mort qui lui avait ôté la vie n’ait pas le dernier mot. C’est encore ce que disait Paul comme en narguant la mort quand il disait : Ô Mort, où est ta victoire ?
Evidemment, tout ce que je viens de dire n’enlève rien à la douleur que provoque la mort. Je peux être absolument sûr que mes chers défunts sont dans la main de Dieu, qu’il les a appelés pour qu’ils ne restent pas prisonniers de la mort et du néant et, en même temps, souffrir de leur absence. Ma mère est morte comme une sainte, rassasiée de jours, comme le dit la Bible, elle a désiré que le Seigneur vienne la chercher, il n’empêche qu’il y a encore des jours où j’aimerais la serrer dans mes bras et l’entendre me demander : comment tu vas mon petit ? La foi la plus assurée ne supprime pas la souffrance causée par l’absence et j’ai bien conscience que ma souffrance n’est rien en comparaison de ceux qui ont perdu un enfant, quand ce n’est pas plusieurs enfants. La foi ne supprime pas la souffrance, mais elle ouvre un chemin pour l’espérance, l’espérance qu’un jour, nous serons tous réunis pour vivre une éternité d’amour en compagnie de la Trinité, accueillis par la Vierge Marie, débarrassés de tout mal. Quelle promesse !
Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons en ce jour que notre foi se fasse espérance.
