Toussaint 2020 : ça ira mieux demain ???

Si tel était le cas, on tiendrait l’explication qui nous permettrait de comprendre la désaffection de nos églises. En effet, à l’évidence, demain n’est pas mieux qu’hier ! En ce moment, on a plutôt l’impression que chaque demain semble pire que l’hier qui vient de se terminer ! Mais Jésus n’était pas un doux rêveur ! Il n’a pas prononcé ces paroles, confortablement installé dans un ciel sans problème. Ce ciel sans problème, il a voulu le quitter pour se mêler aux hommes et partager leur histoire qui peut devenir tragique à certains moments. Et pour que ce soit clair, il n’a pas choisi le moment le plus calme de l’histoire du le peuple dans lequel il s’est incarné. Rappelons-nous qu’il est venu au temps de l’occupation romaine, ce mot d’occupation suffit à lui-même pour évoquer un contexte lourd. Notre pays l’avait connue cette occupation et les plus anciens, souvent aujourd’hui disparus, quand ils nous racontaient ces heures sombres nous laissait entrevoir ce que Jésus avait pu connaître en son temps.

Jésus n’était donc pas un doux rêveur et il n’est pas venu pour nous apprendre à chanter : « ça ira mieux demain ! » Quand l’ange est venu le réconforter dans la nuit de Gethsémani, ce n’était pas pour lui chanter : ça ira mieux demain ! Demain serait même encore pire pour lui, puisqu’à la nuit de Gethsémani va succéder la barbarie du Golgotha. Il nous faut vraiment affirmer haut et fort que le christianisme n’est pas un opium qui nous endormirait au point de nous faire chanter en toute circonstance : ça ira mieux demain, laissant ainsi le champ libre à ceux qui, jouant dans le camp des forces obscures, s’évertuent à pourrir tous les demains de l’humanité !

Non, jamais le Christianisme, ne nous invitera à chanter comme des benêts : ça ira mieux demain ! Le christianisme, c’est l’affirmation que Dieu est avec nous. Si, en Jésus, Dieu a voulu s’incarner, c’est pour devenir, jusqu’à la fin des temps, l’Emmanuel, c’est à dire Dieu avec nous. En Jésus, Dieu a voulu tout partager de ce que nous vivons. Et on peut dire que rien n’aura été épargné à Jésus. Mais il a accepté de vivre chacune de ces épreuves, d’en porter le poids de souffrance pour que, jamais, nous ne puissions penser que les épreuves que nous vivons, sont le signe que Dieu nous a abandonnés, pour que jamais les épreuves que nous vivons ne nous écrasent. Toujours, il sera avec nous, se proposant de porter avec nous ce qui serait trop lourd pour nous. Et, pour que ce soit très clair, il l’a affirmé dans une de ses dernières paroles : et moi, je suis avec vous jusqu’à la fin des temps ! C’est là que se situe l’originalité du christianisme, pas dans sa morale. C’est dans cette affirmation que se situe le trésor que nous voulons partager.

Quel rapport, me direz-vous avec la fête de la Toussaint ? 

Eh bien, je crois que le saints, reconnus et inconnus, qui nous sont proposés comme modèles aujourd’hui, ce sont précisément ceux qui ont pris au sérieux cette vérité du christianisme : « Dieu est avec nous et il l’est pour toujours. » Hélas, nous avons trop souvent de la sainteté une représentation si peu ajustée en imaginant les saints comme des héros dont l’histoire glorieuse était déjà inscrite dès leur berceau. Mais je n’ai pas de peine à penser que les parents Vianney n’ont rien vu en berçant leur petit Jean-Marie ni les parents Chanel en berçant leur petit Pierre pas plus que les parents Rendu en berçant leur petite Rosalie ! Peut-être même qu’ils se sont interrogés dans leurs premières années, se demandant ce qu’ils allaient devenir ! Oui comment pourrait-il réussir dans la vie ce pauvre Jean-Marie Vianney qui ne pouvait même pas aller à l’école en raison du contexte si troublé de la révolution française ? Quels grands horizons pourrait-il découvrir ce pauvre Pierre Chanel en naissant dans ce hameau perdu de la Bresse dans une famille dont les parents n’avaient sûrement jamais voyagé plus loin que Bourg-en-Bresse ? Et cette petite Rosalie Rendu que pourrait-on bien en faire avec ce tempérament de feu bien peu accordé à ce qu’on attendait des femmes à l’époque.

Jean-Marie Vianney, Pierre Chanel, Rosalie Rendu, pour ne prendre que les plus célèbres de notre diocèse, étaient des pauvres comme nous. Car voilà bien la bonne nouvelle dont le christianisme est porteur : pour les chrétiens, la réussite n’est pas réservée à ceux qui seraient nés avec une cuiller en or dans la bouche ou ceux qui auraient été dotés d’un tempérament et d’une intelligence hors du commun. La réussite, la vraie, est accessible à tous et d’abord à ceux qui ont conscience de leur pauvreté et c’est bien ce que rappelle la toute première béatitude. La réussite, la vraie est promise à ceux qui croiront que Dieu est avec eux. Cette conviction de foi permet de ne pas nous inquiéter de nos faiblesses, et même mieux, elle nous permet de croire que nos faiblesses peuvent devenir la chance de notre vie car, comme le révèlera le Seigneur à St Paul : il n’y a que lorsque nous reconnaissons nos faiblesses que nous permettons à Dieu de déployer sa puissance en nous. 

Les saints sont des pauvres, tellement conscients de leur pauvreté qu’ils ont accepté de compter sur Dieu, de croire qu’il était avec eux à chaque instant. Reconnaissant leur pauvreté, ils ne se sont pas dit qu’ils devaient laisser la placer à plus compétents qu’eux. Reconnaissant leur pauvreté, ils ont accepté de répondre à ce qui leur était demandé, même s’ils étaient bien conscients que ça les dépassait complètement, mais ils décidaient de s’appuyer sur cette conviction de foi : Dieu est avec moi ! 

Du coup, on peut vraiment dire que cette fête de la Toussaint tombe au bon moment. Ce que nous avons à vivre en ces jours troublés nous dépasse tellement que la question nous est posée : allons-nous oser le chemin de la sainteté qui est le seul chemin qui nous permettra de sortir par le haut ? Plutôt que de fredonner comme des désespérés qui cherchent à se persuader que ça ira mieux demain, il nous faut emboiter le pas de tous ces pauvres qui nous ont précédé sur le chemin de sainteté. Eux aussi, ils étaient dépassés par tout ce qu’ils avaient à vivre, parce que ce qu’ils avaient à vivre était difficile et aussi parce qu’ils n’avaient pas été préparés à le vivre. Mais ils ont osé la foi qui conduit à la confiance, ils ont osé croire que Dieu est avec nous pour toujours. Qu’ils intercèdent pour nous, tous les saints, afin que, à leur image, nos paroles, nos jugements, nos décisions traduisent de manière concrète et visible que Dieu est avec nous ! Et que la puissance de cet acte de foi nous permette d’oser dire et croire avec St Paul : Si Dieu est avec nous qui pourrait donc être contre nous ? (Rm 8,31) Continuons le texte avec les versets qui suivent :

Qui pourrait nous séparer de l’amour du Christ ? la détresse ? l’angoisse ? la persécution ? la faim ? le dénuement ? le danger ? le glaive ? Vous avez entendu, il parle du glaive qui égorge ! Je continue la citation : En effet, il est écrit : C’est pour toi qu’on nous massacre sans arrêt, qu’on nous traite en brebis d’abattoir. Mais, en tout cela nous sommes les grands vainqueurs grâce à celui qui nous a aimés. J’en ai la certitude : ni la mort ni la vie, ni les anges ni les Principautés célestes, ni le présent ni l’avenir, ni les Puissances, ni les hauteurs, ni les abîmes, ni aucune autre créature, RIEN ne pourra nous séparer de l’amour de Dieu qui est dans le Christ Jésus notre Seigneur.

Enfin, je vous laisse avec ces paroles du curé de la basilique de Nice où a eu lieu le drame. On lui demandait s’il fallait laisser les églises ouvertes, il a répondu : « Bien sûr ! Parce que Jésus n’est pas venu pour fermer le tombeau mais pour l’ouvrir et nos églises, comme le tombeau de Jésus, sont des lieux de résurrection, elles doivent donc rester ouvertes » et je rajoute, pleine de chrétiens qui croient et témoignent que Dieu est avec nous !

Cet article a 2 commentaires

  1. Christine

    Loué soit l’Esprit Saint qui vous inspire des paroles de réconfort en ces temps difficiles.

  2. wilhelm richard

    Pour une fois que je suis d’accord avec vous : c’est bien dans l’acceptation de notre vulnérabilité que le Seigneur fera des merveilles en nous et nous donnera Sa force nécessaire pour avancer et faire la volonté de Dieu.
    quant aux églises, laissons-les ouvertes. c’est le seul endroit encore où nous pouvons déposer nos fardeaux afin que le Seigneur puisse les porter à nos côtés ! N’oublions pas aussi de lui déposer nos actions de grâces. l’église est vraiment un face-à-face qui peut permettre d’échanger en vérité.
    A force de laisser nos églises fermées, nous aurons de beaux édifices qui se transformeront dans quelques années en galeries marchandes ou en musées et où le saint Sacrement ne sera malheureusement plus présent !!!
    que préférons-nous : la façade ou l’intériorité ? la beauté extérieure ou la beauté intérieure ?
    ALORS, BON VOYAGE ET QUE LE SEIGNEUR RÉCHAUFFE CHACUN DE NOS COEURS, LÀ OÙ NOUS SOMMES !

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