20 avril : mardi 3° semaine de Pâques. Le Pain de vie, donné pour que nous restions bien vivants jusqu’au bout !

Samedi, nous avons lu le récit de l’institution des diacres et je vous disais qu’ils avaient été institués pour le service des tables, pour régler ce problème scandaleux de discrimination ethnique au sein de la communauté chrétienne. Je vous disais aussi que, finalement, on ne sait pas bien quel sera la mission de ces diacres puisque, à chaque fois qu’il en est question dans les Actes, on les trouve en train de faire autre chose que ce pourquoi ils avaient été institués. C’est bien le cas avec Etienne ! Hier, nous avons entendu « qu’il accomplissait parmi le peuple des prodiges et des signes éclatants. » Il y a peu de chance que ces signes et prodiges éclatants consistent en sa manière de mettre la table et d’assurer le service pour les veuves d’origine grecque ! Et aujourd’hui, nous le voyons en train de prêcher « au peuple, aux anciens et aux scribes. » Et, le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il ne donne pas une prédication à l’eau de rose ! Donc, là encore, Etienne accomplit une mission qui ne semble pas être celle qu’il a reçue et ça sera vrai également pour un autre diacre Philippe qui, comme nous l’avons vu, recevra le très beau titre d’évangéliste, quant aux autres diacres, nous ne connaissons que leur nom, nous ne savons rien de ce qu’ils ont pu faire. 

Je voudrais m’arrêter un instant sur le fait qu’ils font autre chose que ce qu’on leur a demandé de faire. Nous connaissons tous des personnes, évidemment, ce cas de figure n’existe pas ici, mais ailleurs, il y en a, j’en ai même connu dans mon diocèse … nous connaissons tous des personnes qui sont très performantes pour faire ce qu’on ne leur a pas demandé de faire et qui délaissent trop souvent le cœur de la mission ou du service qui leur a été confié. Est-ce que ces personnes pourraient invoquer les premiers diacres comme leurs saints patrons en leur adressant une prière du genre : apprenez-moi, comme vous, à faire avec ardeur tout ce qui ne m’est pas demandé et à délaisser consciencieusement ce qui m’a été confié ? 

Evidemment, non ! Quand je réfléchis sur ce fait, quand même étonnant, il y a tout de suite une phrase du curé d’Ars qui revient à ma mémoire. Il aimait dire cette parole pleine de naïveté et en même temps d’une profondeur exceptionnelle : « On reconnait les amis du Bon Dieu au fait qu’ils font ce qu’ils ne seraient pas obligés de faire ! » Comprenons bien le sens de cette parole qui, dans la bouche du curé d’Ars, n’est en aucun cas une invitation à délaisser notre devoir d’état. Il était tellement scrupuleux au niveau de son devoir d’état qu’il n’y avait aucun risque qu’il dise cela dans ce sens. Je crois que cette parole du curé d’Ars, il faut la mettre en lien avec la fameuse parole de Jésus parlant des serviteurs inutiles ou des serviteurs quelconques : « Quand vous aurez fait tout ce que vous deviez faire, dites-vous : nous sommes des serviteurs quelconques, nous n’avons fait que ce que nous devions faire. » Il n’y a aucune gloire à tirer de l’accomplissement de son devoir d’état, de toutes façons, il n’y a aucune gloire à tirer de quoique ce soit !

Faire ce que nous devons faire, ce qui nous a été confié, c’est indispensable, c’est pourquoi j’aimais bien ce que disait un missionnaire qui rajoutait un mot à la parole de Jésus : dites-vous bien que vous n’êtes que des indispensables serviteurs inutiles. Mais, nous le savons, Jésus ne souhaite pas que nous nous contentions de ce statut de serviteurs, il veut que nous devenions ses amis : je ne vous appelle plus serviteurs, mais amis. Et comment on passe du statut de serviteur à celui d’ami ? Sûrement pas en délaissant son devoir d’état, mais en ne l’accomplissant pas comme la caricature que l’on donne des mauvais fonctionnaires qui ont l’œil rivé sur la pendule et sur leur fiche de poste pour être sûrs de ne pas en faire trop ! Pour passer du statut de serviteur à celui d’ami, la parole du curé d’Ars nous en donne le secret : « On reconnait les amis du Bon Dieu au fait qu’ils font ce qu’ils ne seraient pas obligés de faire ! » Bien sûr, il ne s’agit pas d’aller empiéter sur le domaine de service des autres, ce qui crée des conflits sans fin ! Il ne s’agit pas non plus de se tuer à la tâche en pensant qu’on n’en aura jamais assez fait pour que le Bon Dieu nous considère comme ses amis. Mais il s’agit seulement de saisir toutes les occasions de faire avec amour et sans fanfaronner un petit plus qui a été délaissé par les autres ou que les autres n’ont pas vu ou qu’ils n’ont pas eu le temps de faire. C’est une prière qu’on peut faire chaque jour : Seigneur montre-moi aujourd’hui au moins un petit service que je pourrai rendre parce que je veux être ton ami. Et tout ceci s’adresse à nous que nous soyons membres ou amis du Foyer ou participants à la halte spirituelle, ou simplement de passage ! Encore un détail, mais qui peut avoir son importance, il ne s’agit pas d’en faire toujours plus pour briller aux yeux des autres ou aux yeux de Dieu, une telle attitude serait le plus sûr moyen de rater l’objectif et de devenir pénible !

Quand on entre dans cette catégorie des amis, c’est alors qu’on devient de véritables témoins et vous savez que témoin, en grec, ça se dit martyr. Il y a peu de risques ou de chances que nous mourions martyr, mais nous pouvons devenir ces authentiques témoins qui, geste de service après geste de service vivront ce qu’il est convenu d’appeler, avec Thérèse de Lisieux, le martyr de l’amour. « On reconnait les amis du Bon Dieu au fait qu’ils font ce qu’ils ne seraient pas obligés de faire ! » Etienne l’a vécu parfaitement, il est tellement devenu un ami de Jésus que, dans toute sa vie, et jusque dans sa mort, il a été configuré à Jésus.

Venons-en à l’Evangile et à ce fameux discours que Jésus prononce après la multiplication des pains et que nous connaissons tous sous le titre « discours sur le Pain de Vie. » Ce long discours va nous occuper toute la semaine, et je peux vous dire que ça va être un grand défi pour les prédicateurs qui vont se succéder, pour ne pas redire ce qui a déjà été dit et ne pas empiéter sur ce qui sera dit, c’est pour cela que je suis content de passer au début ! Ce long discours, il est donc résumé par ces mots : discours sur le pain de vie. Ces mots sont eux-mêmes le résumé de la déclaration de Jésus qui concluait le texte entendu aujourd’hui : « Moi, je suis le pain de la vie. Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. » Le Pain de Vie, c’est sur ces mots que je voudrais m’arrêter quelques instants. Nous avons tous envie d’être plus vivants et de pouvoir rester bien vivants jusqu’au bout. C’est ainsi que pour devenir toujours plus vivants et rester vivants jusqu’au bout, nous sommes à la recherche du praticien qui pourra soulager nos douleurs au dos, par exemple, ou à la recherche de tel complément alimentaire qui pourrait améliorer notre quotidien en nous donnant une meilleure forme. Eh bien, dans ce discours, Jésus se présente à nous comme le meilleur des praticiens, si nous nous remettons vraiment entre ses mains, nul doute que nous irons mieux puisque nos passions inutiles et toxiques vont s’éteindre : « Celui qui vient à moi n’aura jamais faim ; celui qui croit en moi n’aura jamais soif. » Et il nous présente le plus performant et le moins cher de tous les compléments alimentaires, le Pain de Vie. Parce que vous l’aurez compris, pour devenir plus vivants, pour rester bien vivants jusqu’au bout, ce qu’il faut chercher à faire disparaitre, ce ne sont pas les rides du visage, mais celles de l’âme et du cœur qui nous empêcheraient de garder jusqu’au bout un amour ardent.

Quand je marche, j’écoute souvent ce qui est stocké sur mon téléphone, j’ai pal mal de musiques, chants, mais aussi des enseignements et, la plupart du temps, je programme une écoute aléatoire, je prends ce qui vient. C’est ainsi qu’il y a quelques jours, je suis tombé sur un enseignement de Daniel Ange qui parlait entre autres choses de l’Eucharistie car les enseignements de Daniel Ange, c’est toujours comme un feu d’artifices, les thèmes s’enchainent à la vitesse grand V ! Il expliquait que l’Eucharistie est tellement le Pain de Vie, qu’il est impensable qu’un corps qui a reçu régulièrement ce Pain de Vie ne puisse pas devenir immortel. Ce Pain de Vie a une telle puissance de Vie que non seulement il nous permet d’être chaque jour un peu plus vivant, que non seulement il nous permet de rester vivants jusqu’au bout, mais en plus, il ensemence en nous, dans nos pauvres corps mortels, dans nos corps qui peuvent avoir tant de défaillances, il ensemence la Vie éternelle. Quel Pain que ce Pain de Vie pour réaliser un tel miracle !

Les participants à la halte spirituelle méditent depuis ce matin sur la foi et l’Eucharistie. C’est une heureuse initiative que d’avoir lié ces deux thèmes. Parce que nous ne pourrons mesurer les effets du Pain de Vie qu’en fonction de notre foi. Attention, ça ne veut pas dire que participer à l’Eucharistie relèverait de la méthode Coué du nom de ce célèbre pharmacien et psychologue qui expliquait que si on arrive à se persuader que ça va mieux eh bien, ça ira mieux ! Non, il ne s’agit pas de cela. Mais la foi, représente l’ouverture de notre cœur au travail de la grâce en nous. Et, nous le savons, parce qu’il nous aime, Dieu nous respecte infiniment, il n’agira donc qu’en fonction de l’ouverture du cœur que nous lui offrons par la foi. Plus nous nous ouvrons, plus nous croyons et plus nous nous livrons au travail de sa grâce et plus le Pain venu du ciel deviendra Pain de Vie.

Alors, demandons cette grâce de pouvoir dire comme les auditeurs de Jésus : « Seigneur, donne-nous toujours de ce pain-là. » Oui, donne-nous le pour que nous devenions toujours plus vivants, pour que nous restions bien vivants jusqu’au bout et que, jusqu’au bout, nous ayons à cœur de vivre en étant tes amis, ces amis qu’on reconnait au fait qu’ils font ce qu’ils ne seraient pas obligés de faire.

Laisser un commentaire