1° Janvier : Sainte Marie, Mère de Dieu. Accueillir la bénédiction du pape Benoit XVI

Depuis que le pape Benoit nous a quittés, nous avons pu lire un certain nombre de choses sur lui ou de lui. Personnellement, dans les retraites que je prêche, surtout pour les prêtres, j’aime citer cette parole qu’il avait prononcée au moment de son élection : « Après le grand Pape Jean Paul II, Messieurs les Cardinaux m’ont élu moi, un simple et humble travailleur dans la vigne du Seigneur. Le fait que le Seigneur sache travailler et agir également avec des instruments insuffisants me console et surtout, je me remets à vos prières, dans la joie du Christ ressuscité, confiant en Son aide constante. Nous allons de l’avant, le Seigneur nous aidera et Marie, Sa Très Sainte Mère, est de notre côté. » C’est vrai que succéder à Jean-Paul II n’était pas une tâche aisée, je me rappelle ce dessin paru dans « le Monde », je crois, qui montrait les cardinaux qui passaient les uns après les autres pour essayer une immense paire de chaussures et qui disaient tous : trop grand pour moi ! C’était très juste, personne ne se sentait à la hauteur, mais il a bien fallu que quelqu’un y aille quand même ! Et c’est ainsi que l’Esprit-Saint a désigné le cardinal Ratzinger. C’est sûr que, surtout au début, on le voyait bien mal à l’aise, notamment face aux foules. Jean-Paul II, lui, il était très à l’aise, selon la belle expression de Jean XXIII, très vite, il avait sur « faire le pape » avec de grands gestes pour saluer ceux qui l’acclamaient. Benoit XVI, lui, il ne savait pas bien « faire le pape », il faisait un tout petit geste comme un enfant qui dit aurevoir ! Alors, on fait comment quand on a cette certitude d’être « un instrument insuffisant », comme il l’a dit dans la citation que je rappelais ? On fait comment pour gouverner l’Eglise ? On fait comment pour affronter les foules ? 

Eh bien, je crois que, finalement, le secret de Benoit XVI, c’est qu’il aura pris au sérieux les textes que nous venons d’entendre, particulièrement le texte de Paul dans la 2° lecture. Dieu a envoyé l’Esprit de son Fils dans nos cœurs, et cet Esprit crie « Abba ! », c’est-à-dire : Père ! Ainsi tu n’es plus esclave, mais fils, et puisque tu es fils, tu es aussi héritier : c’est l’œuvre de Dieu. Je ne sais pas si nous arrivons à percevoir le caractère inouï de ces paroles : En Jésus, par la puissance de l’Esprit-Saint, nous sommes fils de Dieu et donc, parce que fils, héritiers. Oui, les enfants sont, de fait, héritiers de leurs parents. Alors, quand on est, comme moi, d’une famille modeste, l’héritage n’est pas très conséquent, mais quand votre père s’appelle Bill GATES, par exemple, ou Bernard ARNAULT, l’héritage est très conséquent. Les héritiers de telles fortunes n’ont aucun souci à se faire pour leur avenir … en fait, si, ils ont sûrement beaucoup plus de soucis que moi, mais après tout, il ne tient qu’à eux de ne plus avoir de soucis en partageant très largement ! Mais, même en partageant très largement, il leur restera suffisamment pour vivre jusqu’au soir de leur vie.

Eh bien, mes amis, Paul nous dit que nous sommes les héritiers de Dieu. La fortune de Bill GATES ou celle de Bernard ARNAULT, à côté de celle de Dieu, c’est de la gnognote ! Evidemment, la fortune de Dieu, elle n’est pas cotée en bourse parce que, la fortune de Dieu, ce n’est pas une fortune en espèces sonnantes et trébuchantes, c’est une fortune en Amour. Mais cette fortune d’Amour, elle est sans limite, comme Dieu, lui-même. Eh bien, je le redis, Paul nous annonce cette bonne nouvelle extraordinaire que nous sommes les héritiers de la fortune de Dieu. Normalement, un héritage, on le touche à la mort des parents, heureusement, Dieu, lui, il a accepté qu’on touche notre part de son vivant et il valait mieux parce que si on devait attendre la mort de Dieu, on pourrait tirer la langue un moment ! 

Conscient qu’il était « un instrument insuffisant », le cardinal Ratzinger, quand il a été élu Pape a compris qu’il avait le choix entre 3 solutions : 

1° solution : Passer tout le reste de sa vie à déprimer en se plaignant de ce qui venait de lui arriver et en disant comme le petit Gibus dans la guerre des boutons : si j’avais su j’aurais pas venu ! Mais avouez que, pour un pape, c’est limite !   

2° solution : Faire croire qu’il était capable et prendre un coach en développement personnel pour donner l’illusion qu’il avait appris à « faire le pape. » Mais, là encore, pour un pape, c’est pas top !

3° solution : faire un plongeon dans la foi en croyant à l’histoire de l’héritage : Seigneur, je n’ai pas les réserves nécessaires en moi, mais puisque je suis héritier, je puise en toi ce qui n’est pas en moi ! Et c’est ce qu’il a fait, passant de longues heures en prière.

Evidemment, tout ce que je viens de dire n’est pas réservé à un pape ! Je pense que nous sommes tous bien conscients d’être « des instruments insuffisants ». Dans un couple, chacun sent bien qu’il n’est pas toujours à la hauteur de ce qu’il devrait être ou de ce que l’autre attend de lui. C’est aussi vrai au plan professionnel ou associatif, nous ne sommes pas toujours à la hauteur, c’est encore vrai dans une communauté. Oui, c’est bien vrai, nous sommes tous « des instruments insuffisants ».

Mais, en même temps, nous sommes tous les enfants de Dieu, donc nous sommes tous ses héritiers, ça signifie que ce que nous n’avons pas en nous, nous pouvons le puiser en Lui puisqu’il nous a donné un accès illimité à son trésor d’amour, de patience, de pardon, de bienveillance, d’encouragement, j’en passe et des meilleurs ! Qu’est-ce que ça veut dire concrètement ? Eh bien, c’est tout simple ! Dès que nous sommes confrontés à nos limites, plutôt que  de nous mettre en colère, de dire aux autres : arrêtez de me demander ce que je ne peux pas vous donner, si nous nous arrêtions, ne serait-ce que quelques secondes, pour dire au Seigneur : je n’y arrive plus, je puise en Toi ce qui me manque, je suis sûr que tout se mettrait à changer en nous et autour de nous.

Avouez que c’est quand même une sacrée bonne nouvelle en ce début d’année d’entendre St Paul nous rappeler qu’étant Fils, nous sommes héritiers et que nous avons donc un accès illimité au trésor du Père des cieux. Voilà qui peut ensoleiller toute cette année qui commence, à condition que nous ne l’oublions pas trop vite. Peut-être pourrions-nous d’ailleurs nous aider fraternellement en nous le rappelant. Quand on voit son conjoint, ses frères et sœurs de communauté qui dérapent, on pourrait leur glisser un petit papier avec n’importe quelle combinaison de chiffres en griffonnant ce petit mot : au cas où tu aies perdu le code secret du coffre-fort céleste, je te redonne la combinaison puisque tu as accès illimité !

Je disais que ce qui a aidé le pape Benoit à réussir à « faire le pape » c’était d’avoir pris au sérieux les lectures d’aujourd’hui. Je viens de beaucoup parler de la 2° lecture, je voudrais aussi parler de l’Evangile avec cette petite mention que nous avons entendue à la fin : l’enfant reçut le nom de Jésus. Ce nom, nous le savons, il signifie « le Seigneur sauve. » Le pape Benoit, grand homme de foi, a compris que ce qui lui était demandé, ce n’était pas d’être le Sauveur de l’Eglise. De Sauveur, il n’y en a qu’un, c’est Jésus ! On pourrait bien imaginer que, dans les premiers jours de son pontificat, il ait vécu ce qu’avait vécu Jean XXIII et qu’il a raconté si malicieusement. C’était aussi au début de son pontificat, on lui avait parlé d’un gros problème dans la journée et, en se couchant le soir, il était encore très habité par ce problème. Du coup, il tournait et retournait dans son lit sans trouver le sommeil. A un moment donné, il se plaint auprès du Seigneur de la lourdeur de sa charge et là, il entend le Seigneur lui demander : Angelo, est-ce toi ou est-ce moi qui conduis l’Eglise ? C’est vous Seigneur, répond-il ! Alors le Seigneur lui dit : eh bien, tu peux dormir tranquille ! Bien vu ! Les problèmes surviennent quand nous nous prenons pour ce que nous ne sommes pas !

Le pape Benoit était tellement conscient d’être « un instrument insuffisant » qu’il a forcément laissé le rôle de Sauveur au seul Sauveur, Jésus, s’effaçant derrière lui. Mon évêque m’avait raconté cette anecdote. Il avait amené au Vatican la relique du cœur du curé d’Ars, le pape Benoit voulait prier la nuit devant cette relique. Une procession se forme pour aller à la chapelle, le pape Benoit marche en tête et, très vite, il s’arrête et dit à celui qui portait la relique : il n’est pas convenable que le pape marche en tête, que le curé d’Ars passe devant ! S’il a agi ainsi avec la relique du cœur du curé d’Ars, on peut facilement qu’il agissait ainsi, de manière permanente avec le Seigneur ! Si nous voulons que l’année soit bonne, il nous reste à faire comme lui, toujours laisser Dieu être Dieu en nous, toujours laisser le Seigneur passer devant.

Cher Pape Benoit, aux funérailles du Pape Jean-Paul II, vous aviez conclu votre homélie en disant : Nous pouvons être sûrs que notre Pape bien-aimé est maintenant à la fenêtre de la maison du Père, qu’il nous voit et qu’il nous bénit. Puisque, maintenant, vous êtes ensemble, à la fenêtre de la maison du Père, je suis sûr qu’en ce matin, vous nous bénissez en reprenant, pour nous et pour tous les hommes de bonne volonté, les paroles de la bénédiction d’Aaron : 

Que le Seigneur te bénisse et te garde ! Que le Seigneur fasse briller sur toi son visage, qu’il te prenne en grâce ! Que le Seigneur tourne vers toi son visage, qu’il t’apporte la paix ! Vierge Marie puisque c’est avec toi que nous voulons commencer cette année pour mieux la vivre toute entière à ta main, donne-nous d’avoir des cœurs suffisamment ouverts pour accueillir la puissance de cette bénédiction et en rayonner auprès de tous ceux qui ont aussi besoin de l’accueillir.

Cet article a 2 commentaires

  1. wilhelm richard

    Alors pape ou pas cap’ ?
    Je vois que vous commencez fort bien l’année !!! Comme en athlétisme, sur 100 mètres, vous partez fort, pour accélérer ensuite et terminer au sprint. Qu’est-ce que cela va donner au 31 décembre 2023 ? 3 secondes 65 et pulvériser le record du monde ….

    Meilleurs voeux.. et homélies pour la nouvelle année, tout en laissant l’Esprit Saint vous précéder afin que nous puissions tous en profiter pour ensuite partager le butin .

    1. Adéline

      Bonne année ! Et merci pour les jeux de mots!

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