22 février : chaire de St Pierre. « Et surtout n’oubliez pas de prier pour moi ! »

Fêter la chaire de St Pierre, c’est rendre grâce au Seigneur pour sa fidélité à continuer à inspirer celui qu’il a mis à la tête de son Eglise pour que son enseignement conduise l’Eglise de manière assurée comme le chantait le psaume. Oui, c’est. Bien la fidélité du Seigneur que nous célébrons encore aujourd’hui. Il s’est engagé avec Pierre et tous ses successeurs, il a tenu parole même dans les moments les plus sombres que l’Eglise a pu traverser et Dieu sait si, dans l’histoire, il y en a eu de ces moments où les successeurs de Pierre n’ont pas été à la hauteur. Mais, Lui, le Seigneur, il est toujours resté fidèle. Les lectures de ce jour nous montrent assez clairement que le successeur de Pierre a deux moyens de déployer son enseignement.

Le premier moyen, c’est l’exemple pour ne pas dire l’exemplarité de sa vie. La première lecture, justement tirée de la 1° lettre de Pierre, le disait très clairement : « Devenez les modèles du troupeau. Veillez sur lui, non par contrainte mais de plein gré, selon Dieu ; non par cupidité mais par dévouement ; non pas en commandant en maîtres à ceux qui vous sont confiés. » Tous ces conseils se trouvent comme récapitulés dans cette invitation : « Soyez les pasteurs du troupeau de Dieu qui se trouve chez vous. » Cette image du pasteur, du bon pasteur, Jésus l’avait développée, on la retrouve dans le chapitre 10 de St Jean et Pierre avait dû être profondément marqué par cet enseignement de Jésus qu’il tient à évoquer discrètement, certes, mais nettement dans ces conseils qu’il donne aux anciens. 

Le pape François aime particulièrement développer cette image du pasteur. Et, à ce sujet, il rappelle volontiers que le pasteur, selon les circonstances, doit se tenir devant, au milieu ou derrière son troupeau.

  • Le pasteur devant le peuple. Jamais un pasteur ne doit demander à ceux dont il a la charge de faire ce que lui-même ne serait pas prêt à faire. Jamais, il ne doit, comme on le dit un peu trivialement, envoyer les autres au charbon si lui-même n’a pas l’audace d’y aller et de marcher en avant, prêt à recevoir en premier les coups si c’est nécessaire.
  • Le pasteur au milieu de son peuple parce que le pire, pour un pasteur, c’est de vivre dans sa tour d’ivoire. A ce sujet, le pape aime dire que les pasteurs doivent garder sur eux l’odeur des brebis. L’expression est suffisamment claire, il ne souhaite pas de pasteur vivant à l’abri, mais mêlés au peuple. C’est ce que lui-même a choisi de faire en ne vivant pas dans les appartements pontificaux. Il a rappelé cette exigence du ministère pastoral dans son intervention au symposium organisé ces jours au Vatican sur le ministère du prêtre.
  • Le pasteur derrière son peuple, parfois pour le pousser gentiment, certes, mais avec détermination. Derrière aussi pour avoir une vue plus globale et s’assurer que personne n’est en train de se perdre.

Enfin, pour conclure cette première dimension du ministère d’enseignement du successeur de Pierre qui enseigne donc par l’exemple et en actes. Je souligne cette importance du ministère des clés qui lui est confié avec cette responsabilité énorme que Jésus souligne : les décisions qu’il prendra auront une portée considérable. En son temps, le saint pape Jean-Paul II avait commenté l’importance de ce ministère des clés en disant qu’il consistait essentiellement à ouvrir et il donnait en exemple la décision audacieuse de Pierre d’ouvrir les portes de la foi aux païens dans le fameux épisode du centurion Corneille. Certes, il arrive que le pape doive parfois prendre des décisions de discipline qui ferment, mais c’est quand même plutôt pour ouvrir au plus grand nombre les portes de la foi que les clés lui ont été remises, c’est bien ce que le pape François ne cesse de rappeler en partageant son souci d’aller toujours plus aux périphéries, comme il aime le dire. Reprenant une parole du saint pape Jean-Paul II, il justifie cette hantise en disant que nul ne doit être exclu de l’accolade de la miséricorde du Père.

J’en ai fini avec cette première manière pour le pape de déployer son enseignement qui consiste à vivre de manière exemplaire et à poser des actes en cohérence avec ce ministère des clés qu’il a reçu. Venons-en à la 2° manière qui est l’enseignement proprement dit et Dieu sait si cela occupe la plus grande partie du ministère d’un pape quel qu’il soit. C’est impressionnant le nombre de prises de paroles qu’un pape est amené à faire dans une journée ! Le texte d’Evangile que nous avons lu nous donne le secret de la fécondité de ce ministère. Certes, le pape ne pourrait pas l’accomplir sans l’aide de ceux qui travaillent à son service et qui lui préparent des notes, des discours. Mais avec François, on voit bien que régulièrement, il lève les yeux et, quittant ses notes, il se met à improviser comme pour dire une parole que le Saint-Esprit vient de lui souffler. Oui, le secret de la fécondité de ce ministère, c’est la capacité du pape à se laisser inspirer par le Saint-Esprit.

Quand Pierre donne une si bonne réponse à la question de Jésus, Jésus prend bien soin de lui faire remarquer qu’il a été bon parce qu’il s’est laissé inspirer. « Heureux es-tu, Simon fils de Yonas : ce n’est pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais mon Père qui est aux cieux. » Nous le savons, Pierre était un homme au tempérament généreux et il n’hésitait pas à monter en 1° ligne, répondant souvent plus vite que les autres, faisant de grandes promesses : si tous t’abandonnent, tu pourras compter sur moi ! Son reniement au cours de la passion le rendra enfin lucide sur ce qu’il valait personnellement. A partir de là et du pardon accordé par Jésus qui le confirme dans sa mission malgré ce dérapage si grave, Pierre se rappellera que lorsqu’il avait été bon, c’était parce qu’il s’était laissé inspirer. C’est ainsi que je comprends cette insistance du pape François qui n’arrête pas de demander à ceux qui le rencontrent de prier pour lui : « et surtout n’oubliez pas de prier pour moi ! » C’est ainsi que se terminent toutes ses rencontres. Il veut rester fidèle aux inspirations du Saint-Esprit. 

Imposer ses idées, conduire les autres là où on a décidé qu’il serait bon d’aller et par les chemins qu’on a choisis, c’est une grande tentation à laquelle il faut savoir résister quand on est en situation de responsabilité. Un pasteur ne sera pas jugé en fonction de l’originalité de ses propositions, de ses décisions, mais il sera jugé sur sa capacité à conduire son peuple, au nom du Seigneur, vers les prés d’herbe fraiche, vers les ruisseaux tranquilles, à lui faire traverser les ravins de la mort. Nous pourrions reprendre chacun des éléments du psaume 22 pour en faire comme les éléments d’une charte dirigeant l’action des pasteurs.

Avec tout cela, nous avons de quoi alimenter notre prière aujourd’hui pour que celui qui a été placé sur la chaire de Pierre reste toujours fidèle aux inspirations du Saint-Esprit afin que son enseignement donné en paroles ou en actes soit fécond. Ecoutons-le nous dire : « et surtout n’oubliez pas de prier pour moi ! » et répondons à son appel.

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