24 mai : mercredi 7° semaine de Pâques. Portrait du pasteur idéal

Hier, nous avons commencé à lire le discours de Paul aux anciens d’Ephèse qu’il avait fait réunir à Millet. Au cours d’un pèlerinage sur les pas de St Paul que j’accompagnais en Turquie, nous sommes allés à Millet et je me rappelle avoir commenté ce texte dans le grand amphithéâtre. Ce n’était sûrement pas là que Paul avait prononcé ce discours, mais c’était bien dans cette ville. Et je vous avoue que ça m’a donné une grande émotion car ce discours fait partie des grands textes du livre des Actes. 

On pourrait l’intituler : portrait d’un pasteur. Pour brosser ce portrait du bon pasteur, Paul croise des points de repères qu’il s’était donné pour exercer son ministère et des conseils qu’il donne aux anciens d’Ephèse, c’est-à-dire aux « presbyteroi », les ancêtres des prêtres. Il leur annonce qu’ils ne reverront plus son visage, que son chemin de vie va bientôt s’arrêter ce qui plonge ces presbyteroi dans un immense chagrin, comme nous l’avons entendu à la fin de la lecture : Tous se mirent à pleurer abondamment ; ils se jetaient au cou de Paul et l’embrassaient. Comme je continuerai, au moins jusqu’au week-end de Pentecôte à faire des homélies plus courtes, je veux juste épingler quelques caractéristiques qui, selon Paul, font d’un pasteur un bon pasteur. 

Comme hier, l’homélie ne portait pas sur la 1° partie du discours, je me permets de reprendre duex points que Paul soulignait déjà.

  • Le service dans l’humilité et les deux mots comptent. Servir dans l’humilité, c’est sans doute le meilleur moyen de ne pas tomber dans cette maladie terrible que le pape François ne cesse de dénoncer car elle gangrène l’Eglise, le cléricalisme.
  • Paul rappelait également qu’il a voulu que sa manière de vivre le ministère soit un témoignage, c’est-à-dire que ses actes ne viennent pas contredire ses paroles. Il a su allier deux facettes pas toujours simples à unir : être maître et témoin. Il a ainsi illustré à merveille la parole de Paul VI qui disait que l’homme contemporain écoute plus volontiers les témoins que les maitres ou s’il écoute les maitres c’est parce qu’ils sont aussi des témoins. Il ajoutait à la fin du texte d’hier que ce témoignage devait être ce qui comptait le plus, plus que la préservation de sa vie. Il annonçait ainsi qu’il était prêt pour le martyr et nous nous rappelons que témoin et martyr, en grec, c’est le même mot.

Venons-en maintenant au texte d’aujourd’hui. Je soulignerai 4 points.

  • 1° point : Veillez sur vous-mêmes, et sur tout le troupeau dont l’Esprit Saint vous a établis responsables, pour être les pasteurs de l’Église de Dieu, qu’il s’est acquise par son propre sang. Dans ces quelques mots, Paul donne pas mal de points de repères. Il rappelle que les pasteurs ne sont pas propriétaires du troupeau, il appartient au Seigneur qui l’a acquis en versant son sang. Dans l’Evangile, Jésus aime utiliser des paraboles qui parlent d’un intendant, d’un économe qui aura des comptes à régler avec le maître. Voilà ce que sont les pasteurs. Et Paul précise qu’ils doivent au moins autant veiller sur eux qu’ils ne veillent sur le troupeau. Je ne pense pas que Paul avait en tête la nécessité, pour les pasteurs, de se ménager, de prendre du repos. La suite parlera de loups redoutables qui attaqueront le troupeau et on sait bien qui est le loup le plus redoutable. Le pasteur doit veiller, éduquer son troupeau au combat spirituel. Eh bien, dit Paul, le pasteur doit être au moins aussi vigilant pour que lui-même ne se laisse pas dévorer par le loup redoutable. Bien des abus n’auraient pas eu lieu si certains pasteurs très pointilleux sur la morale qu’ils inculquaient aux autres avaient été aussi pointilleux dans le respect des règles pour leur propre conduite !
  • 2° point : Je reviens sur les loups redoutables. Paul prévient ces pasteurs que cette présence du loup restera une donnée incontournable. La communauté aura beau s’affermir, les loups roderont et même plus la communauté s’affermira, croitra, plus les loups seront attirés. Il ne s’agit pas de devenir naïfs, ni de s’endormir et cela, particulièrement quand tout va bien ! On se rappelle aussi ce que Jésus avait dit du vrai pasteur capable de donner sa vie pour protéger le troupeau en empêchant l’entrée des loups redoutables dans la bergerie.
  • 3° point : Et maintenant, dit Paul, je vous confie à Dieu et à la parole de sa grâce, lui qui a le pouvoir de construire l’édifice. Cette parole encourageante est aussi une mise en garde : les pasteurs ne devront jamais oublier que les plus beaux fruits dans la vie des communautés ne seront pas dus au travail des pasteurs mais au travail de la grâce. Ou plutôt que le travail des pasteurs sans la grâce n’aura aucun avenir, il risque juste de tenir les pasteurs dans l’orgueil. Comme le dit le psaume 126 : si le Seigneur ne bâtit la maison, les travailleurs travaillent en vain !
  • Enfin 4° point, Paul dit : En toutes choses, je vous ai montré qu’en se donnant ainsi de la peine, il faut secourir les faibles et se souvenir des paroles du Seigneur Jésus, car lui-même a dit : il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir. Avec ces paroles, il invite les pasteurs à ne jamais délaisser les faibles. La vitalité d’une communauté ne se mesurera donc jamais au nombre de pratiquants qui fréquentent l’Eglise, mais au nombre de faibles à qui elle a su faire une place ! Et il termine son discours en citant une parole de Jésus qu’on ne trouve à aucun endroit dans les Eangiles : il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir on pourrait même dire il y a plus de bonheur à se donner qu’à recevoir. C’est la béatitude du pasteur et de tous ceux qui, avec lui veulent se mettre au service de leurs frères.

Il ne nous reste plus qu’à prier pour que l’Esprit-Saint vienne renouveler le cœur de tous les pasteurs afin qu’ils correspondent toujours mieux à ce portrait car c’est ainsi que ceux qui leur sont confiés pourront grandir et s’affermir dans la foi, c’est ainsi qu’ils pourront accueillir la vie en abondance.

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