28 août : Pourquoi tarde-t-il et semble-t-il prendre plaisir à venir de nuit pour mieux nous surprendre ?

C’est un anniversaire pour moi ! Il y a exactement 30 ans, je devais prêcher, dans une retraite de prêtres à laquelle je participais, sur ce même texte d’Evangile, juste après avoir reçu, au cours de la nuit, le Baptême dans le Saint Esprit. La préparation de cette homélie m’avait pas mal inquiété tout au long de la semaine, car j’avais su en arrivant qu’il me faudrait prêcher ce jour-là, et je vous avoue que le texte ne m’inspirait pas tellement. Le Saint-Esprit, qui m’avait visité dans la nuit, m’avait bien inspiré. Je bénis encore le Seigneur pour cette nuit de feu.

Mais nous ne sommes plus il y a 30 ans ! Alors qu’est-ce que le Seigneur veut nous dire aujourd’hui ? Vous aurez remarqué que ce texte qui est la suite de celui que nous avons lu hier est tout à fait dans la même tonalité. Il nous est encore demandé de veiller si nous ne voulons pas être dépourvus comme l’ont été ces jeunes filles insouciantes. 

Mais pourquoi Jésus décrit sous les traits de l’époux tarde-t-il ? Pourquoi se fait-il attendre ? Avec notre esprit mal tourné, nous risquons d’imaginer qu’il tarde et vient de nuit exprès pour nous prendre en défaut, car la nuit, nous dormons et c’est aussi de nuit que se réalisent les choses les moins avouables. Comme c’est terrible d’avoir en tête de telles idées ! Quand est-ce que nous arriverons à sortir de nos têtes cette idée que Dieu est pervers et qu’il cherche à nous coincer pour mieux nous punir ! En Jésus, Dieu a fait alliance avec nous, il est donc notre allié, notre allié, pas notre adversaire ! 

Le fait que l’époux tarde pour n’arriver que la nuit, il faut l’accueillir comme une Bonne Nouvelle ! Il retarde sa venue parce que c’est la nuit que Jésus veut venir à notre rencontre. C’est vrai que dans la plupart des textes qui parlent de sa venue, il est dit qu’il viendra la nuit. Et souvent il est rajouté, quand on ne l’attendra pas. Oui, car nous nous croyons spontanément que c’est la lumière qui attire Jésus, que c’est lorsque nos vies sont brillantes que Jésus est attiré vers nous. Mais non, je ne dis pas que nos réussites ne l’attirent pas, mais dans nos réussites, la plupart du temps nous nous passons assez bien de sa présence ! Par contre, si Jésus vient de nuit, c’est parce qu’il sait que c’est lorsque nous sommes dans la nuit que nous avons besoin de la lumière de sa présence. 

Il ne vient pas la nuit pour nous coincer, mais il vient lorsque nous sommes dans la nuit pour repousser, par la lumière de sa présence bienfaisante, ces ténèbres qui nous écrasent. C’est au cœur de nos nuits que Jésus veut venir nous visiter, qu’il s’agisse de la nuit de la foi, la nuit des épreuves, la nuit du péché… Grâce à ces textes d’Evangile, nous pouvons nous dire que lorsque nous sommes dans la nuit, Jésus n’est pas loin, parce que c’est la nuit qu’il aime venir nous visiter. 

Mais il y a une condition pour qu’il vienne au cœur de nos nuits et c’est la suite du texte qui nous le dit. Nous sommes toujours un peu choqués par le fait que les 5 jeunes filles non-prévoyantes vont être rejetées. Essayons de comprendre ce détail de la parabole qui ne peut pas contredire ce que je viens d’affirmer.

Ce n’est pas quand l’époux arrive qu’elles veulent vite aller chercher de l’huile. C’est lorsqu’elles entendent qu’on annonce l’arrivée de l’époux qu’elles veulent à tout prix trouver de l’huile. Ce détail a une grande importance pour moi. En fait, elles ont peur que l’époux les voit « à sec ». Elles ont peur de paraître devant lui dans une situation pas brillante. Alors, elles demandent vite de l’huile pour qu’il ne voit pas, pour qu’il ne puisse pas se rendre compte de leur problème. Elles veulent cacher leur problème ; elles veulent faire semblant, faire comme si. 

Moi, je suis sûr que si elles avaient osé aller à la rencontre de l’époux avec leurs lampes à sec et si elles avaient osé reconnaître devant l’époux : voilà nous sommes à sec, dans la nuit, je suis sûr que l’époux les aurait accueillies avec beaucoup de tendresse et d’attention. Mais elles n’ont pas voulu reconnaître qu’elles étaient dans la nuit, elles ont préféré cacher leur état en cherchant à se procurer de l’huile par tous les moyens. Voilà leur problème et le nôtre, nous n’aimons pas nous présenter devant le Seigneur quand nous n’avons rien de brillant, de lumineux à lui montrer, nous avons honte de toutes ces nuits que nous traversons. Mais c’est terrible ! Quand nous cachons notre nuit, quand nous refusons de reconnaître les épreuves que nous vivons, quand nous faisons semblant pour que personne ne puisse voir, que voulez-vous que le Seigneur fasse pour nous ?

Si les 5 prévoyantes refusent de partager leur huile, ce n’est pas par égoïsme, c’est plutôt une marque d’amour : elles veulent les encourager à oser se montrer telles qu’elles sont. Parce que lorsqu’elles disent : allez chez les marchands, elles savent bien que les marchands sont fermés la nuit ! Mais les 5 imprévoyantes courent quand même ! On ne sait jamais, s’il existait encore un moyen de sauver les apparences ! Du coup, on comprend que si la porte leur est fermée – et elle ne l’est jamais définitivement – c’est comme pour leur dire : je ne peux rien pour vous tant que vous aurez décidé de faire semblant et de sauver les apparences, le jour où vous accepterez d’être vraies, alors vous pourrez entrer et moi, surtout je pourrais venir visiter vos ténèbres.

         Voilà la bonne nouvelle de ce texte : Jésus veut venir nous visiter quand nous sommes dans la nuit, et par la douce lumière de sa présence, il veut repousser ces ténèbres qui nous étouffent. Mais encore faudra-t-il que nous acceptions de reconnaître nos nuits, d’oser jeter les masques qui nous utilisons si bien pour faire croire que tout va bien et sauver les apparences.

         Tout cela, je l’ai vécu moi-même, il y a 30 ans. Et, bien avant moi, Augustin, que nous fêtons aujourd’hui l’avait vécu, lui aussi. Il a résisté longtemps mais quand il a accepté de se laisser visiter au cœur de la nuit de son péché, tout a changé. Qu’il intercède pour nous pour que nous osions croire que c’est au cœur de notre nuit que le Seigneur aime nous visiter. Que nous osions croire que le Seigneur n’attend pas que nos vies soient brillantes pour nous visiter. Il est bien plus déterminé à venir quand nous sommes dans la nuit, dans la misère pour inonder nos misères de sa miséricorde.

Cet article a 4 commentaires

  1. ANGE Barbara et Emmanuel

    Bel et joyeux anniversaire cher père Hébert de ce si beau et grand jour de votre Baptême dans l’Esprit Saint…(avec un jour de retard…mais heureusement en Dieu il n’y a pas de temps….l’éternité étant un instant éternel dans la Plenitude de leur Amour…)

    Merci vraiment ++++ pour votre homélie si lumineuse…. qui fait écho avec force à une homélie qui nous avait percutée aussi,homélie si belle du pape François de la Messe du dimanche de la Miséricorde ,ce 19 Avril 2020…dont voici en partage l’extrait :

  2. ANGE Barbara et Emmanuel

    « Jésus a dit à sainte Faustine : « Je suis l’amour et la miséricorde même ; il n’est pas de misère qui puisse se mesurer avec ma miséricorde » (Journal, 14 septembre 1937). Une fois, la Sainte a dit à Jésus, avec satisfaction, d’avoir offert toute sa vie, tout ce qu’elle possédait. Mais la réponse de Jésus l’a bouleversée : « Tu ne m’as pas offert ce qui t’appartient vraiment ». Qu’est-ce que cette sainte religieuse avait gardé pour elle ? Jésus lui dit avec douceur : « ‘‘Ma fille, donne-moi ta misère’’ » (10 octobre 1937). Nous aussi, nous pouvons nous demander : ‘‘Ai-je donné ma misère au Seigneur ? Lui ai-je montré mes chutes afin qu’il me relève ?’’ Ou alors il y a quelque chose que je garde encore pour moi ? Un péché, un remords concernant le passé, une blessure que j’ai en moi, une rancœur envers quelqu’un, une idée sur une certaine personne. Le Seigneur attend que nous lui apportions nos misères, pour nous faire découvrir sa miséricorde. »

  3. Adéline

    AMEN !!! 🙂
    Lumineux !

  4. wilhelm richard

    Votre homélie pourrait être résumée par … trois chansons de Johnny Halliday. (attention aux droits d’auteur).
    Tout d’abord : Revient la nuit. En réalité, plus nous sommes dans la nuit, plus Jésus est proche de nous. C’est paradoxal mais très éclairant.
    Mais pour un face-à-face avec Lui, que choisissons-nous ?
    Le par… être (ou) celui que je suis véritablement ?
    Si c’est le paraître, alors nous entendrons : les portes du pénitencier et donc nous resterons prisonnier à l’extérieur de l’intimité de Dieu !
    En revanche, si je Lui donne « être ce que je suis véritablement, (cad avec mes richesses et mes pauvretés), alors nous chanterons de tout notre cœur :
    Noir, c’est noir …. Il y a toujours de l’espoir !!!!! Ainsi, comme le dit la prière après la messe de ce jour (de saint Augustin) : « nous pourrons devenir ce que nous avons reçu « .

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