3 janvier : fête de l’Epiphanie Quel genre de croyant es-tu ?

Il est possible qu’au Sénégal, ce soit comme en France et que la fête de l’épiphanie soit sans doute plus connue dans le grand public pour l’occasion qu’elle donne de manger des galettes et de couronner l’un des convives qui aura tiré la fève que pour son message profond … et c’est bien dommage car le message est si important ! St Paul l’a magnifiquement résumé dans la 2° lecture le message de cette fête : « toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus. » Dieu a choisi un peuple, le peuple juif pour lui donner sa promesse de Salut, la 1° lecture nous le rappelait en présentant Jérusalem comme un phare pour toutes les nations qui convergeront vers elle. Mais la Bonne Nouvelle que nous célébrons en cette fête de l’Epiphanie, c’est que Dieu a décidé que sa promesse ne serait pas limitée à ce peuple, voilà pourquoi Paul osait dire : « toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus. »

C’est-à-dire que l’épiphanie, c’est notre fête à tous, à vous, comme à moi. En effet, nous faisons partie de ces nations qui ont été associées à l’héritage car pour Paul, c’est clair, lorsqu’il parle « des nations » il parle des païens. Et nous sommes des païens, enfin au sens où Paul l’entend et où toutes les Ecritures utilisent ce mot. Les païens ce sont ceux qui ne sont pas juifs. Eh bien, dit Paul, les juifs qui sont les héritiers de la promesse du Salut qui leur a été adressée à eux, cet héritage, ils le partagent désormais avec les païens : « toutes les nations sont associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus. » Oui, vraiment, cette fête de l’épiphanie, c’est notre fête, à nous les païens, qui avons été associés à l’héritage promis au peuple juif. Dieu veut entrer en Alliance, en Amitié avec tous les hommes, il veut qu’aucun homme d’aucun pays et d’aucune époque ne soit perdu et c’est pour cela qu’il a envoyé son Fils Jésus.

Oui, cela, c’est ce que Dieu veut, mais tous les hommes n’accueilleront pas sa proposition. Et le texte d’Evangile nous montre 3 catégories de personnes qui, finalement, représentent 3 manières de se situer par rapport à la proposition de Dieu. Dans ce texte, il y a les Mages, les grands-prêtres et les scribes et Hérode, je vais les décrire pour que, après, nous puissions regarder à quelle catégorie nous appartenons.

1/ Commençons par les Mages. Ils représentent bien ces païens que Dieu a voulu associer à l’héritage. Vous aurez remarqué que l’Evangile est très discret sur eux, il nous est juste dit qu’ils venaient d’Orient et qu’ils étaient des Mages. On ne dit même pas qu’ils étaient 3, c’est parce qu’il y a 3 types de cadeaux qu’on en a déduit qu’ils étaient 3 ! Pourquoi cette appellation de Mages qui évoque plutôt des magiciens, chez vous, on aurait dit des sorciers ? Peut-être justement parce qu’ils observaient le ciel et qu’étant très observateurs et intelligents, ils savaient calculer la course des astres et prévoir les éclipses qui étaient des phénomènes redoutés dans l’Antiquité. J’ai lu dans un livre sur l’évangélisation du Sénégal qu’avant l’arrivée des missionnaires, les sorciers devenaient riches quand il y avait une éclipse de soleil. Toute la population défilait chez eux offrant ce qu’il fallait au sorcier pour qu’il obtienne que le soleil se dévoile, que la terre ne soit pas plongée totalement dans les ténèbres et qu’il brille à nouveau pour que la vie puisse continuer. Les sorciers savaient-ils que c’était un phénomène naturel et profitaient-ils de la crédulité des gens, je ne sais pas, mais ce qui est sûr, c’est qu’ils s’enrichissaient et renforçaient leur pouvoir sur les gens puisque suite aux sacrifices qu’ils offraient, le soleil se dévoilait ! Ça veut donc dire que de tout temps, ceux qui ont compris comment les astres bougeaient était devenus des personnages influents. 

Ces Mages de l’Evangile faisaient donc partie de ces personnes influentes puisqu’ils étaient des observateurs des astres. Et c’est à force d’observer qu’ils ont vu une étoile qu’ils ne voyaient pas habituellement. Et voilà que, eux qui savaient tant de choses, acceptent de ne pas savoir d’où vient cette étoile, ce qu’elle représente et ils se mettent en route pour comprendre, ils se font chercheurs de vérité. En se mettant en route, ils étaient bien loin d’imaginer ce qu’ils allaient trouver !

Le message de l’Evangile est donc clair, ceux qui se font chercheurs de vérité, ils finissent, à un moment ou à un autre par trouver Dieu. Et quand ils le trouvent, ils donnent le meilleur, le plus précieux de ce qu’ils ont. 

2/ Cet Evangile nous présente aussi Hérode, c’est un bien triste personnage. Lui, la religion ne l’intéresse absolument pas, la preuve, il ne connait rien aux Ecritures saintes ! Par contre, ce qui l’intéresse, c’est le pouvoir et tout ce que le pouvoir lui permet de s’offrir. Si la religion des autres peut lui servir, alors il s’en sert et si la religion des autres dérange ses plans, alors il la combat. Hérode, c’est un calculateur qui n’est intéressé que par lui-même ; les autres, tout comme Dieu ne l’intéressent pas, il peut se servir d’eux quand il a besoin d’eux comme il peut décider de les éliminer quand ils deviennent gênants. Permettez-moi de vous donner quelques éléments vérifiés par l’histoire qui attestent la vérité de ce que je vous dis.

Il avait été installé sur le trône par les romains qui voulaient faire croire qu’ils donnaient une certaine autonomie au pays, en fait Hérode était, pour les romains, un roi de pacotille qui devait leur obéir. Mais pour son peuple, il était un véritable dictateur qui, comme tous les dictateurs, était enfermé dans la peur d’un coup d’état. C’est pour cela qu’il n’hésitera pas à faire noyer son beau-frère, à faire assassiner son beau-père, puis assassiner un autre beau-frère, ensuite c’est sa femme qu’il fait tuer et, puis deux de ses enfants et enfin un troisième, 5 jours avant de mourir ! C’est aussi pour cette raison qu’il avait fait construire plus d’une dizaine de forteresses dans le pays : pour pouvoir s’y réfugier en cas d’émeutes. Avec cette dizaine de forteresses, où qu’il se trouve dans le pays, si une révolte éclatait, il pouvait se mettre rapidement en sécurité. Parmi ces forteresses, il y avait l’Hérodium, une colline en face de Bethléem (quelle ironie !), colline qu’il avait fait araser pour être plus à l’aise. Dans cette forteresse, il s’était fait aménager plusieurs piscines avec de l’eau à différentes températures … et tout cela dans un pays où l’eau manque cruellement ! Voilà ce qu’un roi de pacotille se fait construire parce qu’il estime être digne de ce luxe et quand, dans le même temps, le Roi du monde va naître, il arrivera dans une étable et une mangeoire … quel écart !

On comprend dès lors qu’Hérode était haï par la population. Du coup, il se doutait bien que le jour de sa mort, personne ne pleurerait, c’est pourquoi il avait demandé qu’à sa mort, on tue un certain nombre de ses collaborateurs à Jérusalem pour qu’il y ait quand même des pleurs … on ne pleurera pas pour lui, mais on pleurera quand même ! Le massacre des nouveaux-nés évoqués dans l’Évangile juste après la page que nous venons de lire est donc hautement probable.

3/ Enfin la dernière catégorie de personnages qui nous est présentée, ce sont les scribbes et les grands-prêtres. Eux ils savent beaucoup de choses sur Dieu, ils connaissent les Ecritures et dès qu’ils entendent ces païens leur parler d’une étoile, ils comprennent que le Messie annoncé a dû naître quelque part. Pourquoi en sont-ils aussi sûrs ? Parce qu’ils connaissent l’oracle de Baalam, ce mage païen qui avait prophétisé il y a bien longtemps en disant : 

« Je le vois, je l’observe, de Jacob monte une étoile, d’Israël jaillit un sceptre mais ce n’est pas pour tout de suite. » Si ces hommes s’étaient mis en route en suivant une étoile nouvelle, c’est que la prophétie de Balam est accomplie. Le Messie est donc né quelque part et pour savoir où il a pu naître, ce n’est pas très difficile puisqu’un autre texte annonce : « Et toi, Bethléem, terre de Juda, tu n’es certes pas le dernier parmi les chefs-lieux de Juda, car de toi sortira un chef, qui sera le berger de mon peuple Israël. » Donc, c’est clair, il est né à Bethléem, c’est là-bas que les Mages doivent aller s’ils veulent le voir.

Mais ce qui est très étonnant, c’est que ces gens qui savent ne vont pas bouger ! Eux les juifs, héritiers de la promesse, eux les spécialistes qui savent, ils envoient des païens adorer l’envoyé de Dieu mais eux, ils ne bougent pas ! C’est le monde à l’envers !

Voilà donc ces 3 catégories qui nous sont présentées : 

  • Des scribbes et grands-prêtres qui savent tout sur Dieu et connaissent les Ecritures sur le bout des doigts mais qui ne bougent pas pour aller à la rencontre de l’envoyé de Dieu.
  • Des Mages qui sont païens, eux, par définition, étant païens, ils ne connaissent rien sur Dieu. Mais ce sont des hommes qui scrutent le ciel, et quand ils voient ce qu’ils ne peuvent comprendre, ils se mettent en route à la recherche de cette vérité qui les dépasse.
  • Entre les deux, il y a ce triste personnage d’Hérode qui n’est intéressé que par lui-même et qui est prêt à tout pour que rien ne vienne perturber ses plans et contrarier la réalisation de tous ses désirs même les plus fous.

Je disais que l’Evangile nous présente ces 3 catégories pour que nous puissions nous demander à quelle de ces 3 catégories nous appartenons. Evidemment, nous ne voulons ni être du côté des scribes et grands-prêtres et encore moins du côté d’Hérode. 

  • Mais dans la réalité, sommes-nous vraiment toujours du côté des Mages, de ces chercheurs de la vérité prêts à se mettre en route, à quitter quelques certitudes bien établies qui arrangent et évitent de trop bouger ? 
  • Ne nous arrive-t-il pas d’être parfois du côté de ceux qui savent, qui en savent beaucoup ou un peu moins, mais chez qui ce savoir concernant Dieu ne transforme pas vraiment la vie ? 
  • Et puis, n’y a-t-il pas aussi des moments où, à l’image d’Hérode, ce qui nous intéresse le plus, c’est nous, nous et l’accomplissement de nos désirs même les plus capricieux ? Alors nous ne ferons jamais autant de mal qu’Hérode, mais quand la seule préoccupation, c’est soi-même, on court de grands risques et on en fait courir aux autres.

Frères et sœurs puisque nous sommes au tout début de l’année et que la coutume veut que nous nous présentions des vœux, je formule ce vœu pour vous et aussi pour moi : que l’Esptit-Saint, justement parce qu’il est l’Esprit de vérité, fasse de nous, tout au long de cette année, des hommes et des femmes, chercheurs de la vérité. Qu’il nous donne la force de nous bouger, de quitter ces quelques mauvaises habitudes qui nous paralysent et qui feront toujours de nous des chrétiens timides, tièdes et trop installés pour donner envie aux autres d’accueillir et de vivre de la Bonne Nouvelle. Que l’Esprit-Saint nous permette d’être à la hauteur du don qui nous a été fait par pure grâce puisque, comme nous le rappelait Paul nous faisons partie de ces « nations qui ont été associées au même héritage, au même corps, au partage de la même promesse, dans le Christ Jésus. »

Cet article a 4 commentaires

  1. Adéline

    Amen ! Merci pour cette belle homélie !

    1. Père Roger Hébert

      Merci Adéline pour ces mercis si fidèles auxquels je ne réponds pas souvent !

  2. wilhelm richard

    Le message
    Des Rois Mages :
    Quel éclairage !!
    Sage
    Est leur adage,
    Sûreté est leur gage.
    Noël est passé, il faut savoir tourner la page
    Direction Carême, un grand passage
    Temps favorable pour une vraie conversion, un nouveau langage.
    Moins de bavardages,
    Hommes, tous à l’abordage.
    Cette aventure sera tout à notre avantage
    Pour un éternel et divin héritage.

    1. Père Roger Hébert

      Ah Richard … quel poète ! Les années n’altèrent pas son inspiration !

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