30 août 2022 : mardi 22° semaine ordinaire Puissance de la Parole qui nous travaille et nécessité de libération

Pour commencer, je voudrais vous faire remarquer que nous sommes entrés dans la lecture quasi-continue de l’Evangile de Luc. L’Evangile de Matthieu accompagnait notre méditation quotidienne depuis la 10° semaine du temps ordinaire, succédant à l’Evangile de Marc. Et cet Evangile de Luc nous accompagnera jusqu’à la fin du temps ordinaire. Ainsi, chaque année, le cycle liturgique nous permet de lire et méditer la majeure partie des Evangiles synoptiques. L’Evangile de St Jean sera lu moins systématiquement, mais on en retrouve de larges extraits pour de nombreuses fêtes, à la fin du carême, au cours de la semaine sainte et du temps pascal. 

Au-delà de ces informations toujours bonnes à prendre pour mieux comprendre la liturgie, il me semble qu’elles nous permettent aussi de mesurer la grâce qui nous est faite, à nous qui participons à la messe, chaque jour, de pouvoir nous nourrir de la quasi-totalité des Evangiles chaque année. Sans compter le fait que chaque dimanche, nous avons aussi la méditation d’un Evangile, avec l’année A, c’est l’Evangile de Matthieu, avec l’année B, c’est Marc et l’année C, dans laquelle nous sommes, c’est Luc. Là encore, l’Evangile de Jean est lu par tranches certains dimanches du temps liturgique. Calculez donc le nombre d’années depuis lequel vous participez à la messe chaque jour et vous saurez combien de fois vous avez lu, entendu les Evangiles en entier ! Il ne s’agit évidemment pas de s’enorgueillir en imaginant que nous avons réalisé des prouesses, mais il s’agit de prendre conscience de ce que cette Parole a pu produire en nous puisque nous croyons que cette affirmation du prophète Isaïe est vraie : La pluie et la neige qui descendent des cieux n’y retournent pas sans avoir abreuvé la terre, sans l’avoir fécondée et l’avoir fait germer, donnant la semence au semeur et le pain à celui qui doit manger ; ainsi ma parole, qui sort de ma bouche, ne me reviendra pas sans résultat, sans avoir fait ce qui me plaît, sans avoir accompli sa mission. Is 55,10-11.

Alors, entrons dans ce texte d’Evangile. Si nous n’avions pas fêté le martyr de Jean-Baptiste, hier, nous aurions entendu le début du chapitre 4 de Luc, ce passage bien connu où Jésus commence son ministère en allant à la synagogue de Nazareth. Nous connaissons bien ce passage dans lequel Jésus lit ces versets du prophète Isaïe : L’Esprit du Seigneur est sur moi parce que le Seigneur m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la Bonne Nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs leur libération, et aux aveugles qu’ils retrouveront la vue, remettre en liberté les opprimés, annoncer une année favorable accordée par le Seigneur. En refermant le livre, Jésus dit que c’est aujourd’hui que cette Parole s’accomplit, faisant de ces versets d’Isaïe, le programme de son ministère. Hélas, ça ne va pas marcher à Nazareth, il commence à être admiré mais, très vite, il y a un revirement de situation et, ayant à peine commencé son ministère, on cherche à le faire mourir en le précipitant d’un escarpement. Devant cet échec, Jésus ne se dit pas : c’est le programme qui n’est pas bon, il faut que je le révise ! Il comprend qu’à Nazareth, il ne pourra pas exercer son ministère car nul n’est prophète en son pays. Il ne change donc pas le programme mais le lieu d’exercice de son ministère et c’est ainsi qu’il se rend en Galilée et c’est là que nous le retrouvons pour l’épisode qui nous est raconté dans l’Evangile d’aujourd’hui.

Nous voyons bien que Jésus n’a rien changé au programme. Dans la citation d’Isaïe, par deux fois, il était question de libération : annoncer aux captifs leur libération, remettre en liberté les opprimés, eh bien Jésus va appliquer le programme en libérant cet homme tourmenté par un démon impur. Et, de fait, la libération sera une dimension constitutive de tout son ministère. En tout cas, dans l’Evangile de Luc, le premier acte que Jésus accomplit dans son ministère, c’est un acte de libération. Je vous propose que nous regardions d’un peu plus près le lieu et le moment où se passe cet acte de libération et comment il se passe.

Le lieu, c’est la synagogue. Je le souligne parce que ça peut nous aider à comprendre parfois ce qui va se passer en nous quand nous sommes à la messe, à l’adoration ou en prière. Nous ne sommes pas à l’abri quand nous sommes à la chapelle ou dans une église. 

Les démons impurs ne se sentent pas arrêtés par la sainteté du lieu, au contraire, cette sainteté peut leur donner des envies très fortes de se déchainer pour mieux nous enchainer. Donc ne nous étonnons pas d’être traversés par des sentiments ou des idées peu glorieuses quand nous sommes à la chapelle et, surtout, n’allons pas penser que nous sommes tordus. Non, ce n’est pas nous qui sommes tordus, c’est le Mauvais qui est tordu et qui cherche à tout tordre. Et Luc le désigne comme un démon impur, c’est-à-dire qu’il va chercher à nous refiler cette impureté. En disant cela, je ne veux pas forcément dire qu’il va mettre en nous des pensées obscènes, encore que ce n’est pas impossible, mais il veut nous rendre impurs et l’impureté, c’est fondamentalement le fait d’avoir un cœur partagé. Un élément pur, en chimie, c’est un élément qui est sans mélange, un cœur pur, c’est donc un cœur qui n’est pas partagé. Et le démon impur n’aime pas que nous cultivions la pureté du cœur, que nous cherchions à être sans mélange, à avoir un cœur qui ne soit pas partagé. C’est pour cela qu’il vient nous donner tant de distractions dans la prière pour nous emmener ailleurs, pour nous faire rêver à des futilités ou entretenir des pensées d’orgueil, de haine, de jalousie, de jugements. Quand nous nous surprenons, à la chapelle, en prière à être dans ce scénario, vite, invoquons la puissance de Jésus pour être libérés de ce démon impur.

Le moment où cela se passe, c’est le sabbat. Dimanche, j’ai expliqué que le sabbat, c’était ce jour sacré au cours duquel, on voulait redonner à Dieu sa vraie place, c’est-à-dire la première. Eh bien, chez ce pauvre homme qui se trouve en train de perturber la liturgie synagogale, il y en a un, l’esprit impur, qui a pris une place qui n’est pas la sienne. C’est pour cela que Jésus va tout de suite intervenir sans s’inquiéter de l’esbrouffe que l’esprit impur déploie pour essayer d’impressionner ceux qui sont réunis. En prenant cette place qui n’est pas la sienne dans le cœur de cet homme, il s’est conduit comme un usurpateur et Jésus va s’occuper de lui sans ménagement pour que ce pauvre homme soit rendu à sa dignité de Fils de Dieu et qu’il puisse redonner à Dieu, dans sa vie, la place qui lui revient. Dans l’Eglise, il y a un sacrement qui nous est offert pour nous libérer, pour redonner à Dieu la place qui lui revient dans notre cœur et dans notre vie, c’est évidemment le sacrement du pardon. Ne nous habituons pas à le recevoir et encore moins à nous éloigner de lui !

Dans la manière dont ça se passe, c’est quand même étonnant, d’entendre le démon impur faire une si belle profession de foi : « Ah ! que nous veux-tu, Jésus de Nazareth ? Es-tu venu pour nous perdre ? Je sais qui tu es : tu es le Saint de Dieu. » J’ai dit « profession de foi », mais le terme n’est pas juste car il ne dit pas : je crois que tu es le Saint de Dieu. Il dit : Je sais qui tu es. Il faut se méfier du savoir. En soi, ce n’est pas mauvais de savoir beaucoup de choses, surtout quand on en fait profiter les autres sans chercher à se faire mousser. Mais le savoir peut aussi nous enfermer dans un piège quand il reste extérieur. Il est possible de trouver des personnes capables de vous expliquer la périchorèse de manière bluffante et qui n’ont aucune vraie relation avec le Saint-Esprit ! Si vous ne savez pas ce qu’est la périchorèse, voilà la définition que j’ai trouvée sur internet : La périchorèse désigne l’essence divine sous l’angle de l’immanence réciproque des personnes ; elle envisage les relations intratrinitaires comme intériorité mutuelle dans l’amour. Avec cette définition, vous êtes sûrement bien plus avancés ! Mais vous comprenez que j’ai fait exprès de choisir cet exemple, pour le Seigneur, ce qui compte, ce n’est pas ce que nous savons de lui, mais ce que nous vivons avec lui. Et ce qui vient gâcher ce que nous pourrions vivre avec lui, c’est justement de nous laisser séduire par le démon impur qui va nous obliger à trainer des cœurs partagés. 

Jésus puisque tu n’as rien perdu de ta puissance, puisque, selon ce que nous dit la lettre aux Hébreux, tu es le même aujourd’hui qu’hier, ce que tu as fait dans la synagogue de Capharnaüm pour ce pauvre homme en le libérant de ce démon impur, fais-le pour nous aujourd’hui et donne-nous le désir puis le courage de faire les démarches nécessaires pour collaborer à ton action de libération car tu ne feras rien pour nous sans nous.

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