On pouvait difficilement rêver de meilleure introduction que ce texte des Actes entendu en 1° lecture pour sur cette retraite qui nous prépare à Pentecôte ! Je vous présente les circonstances pour que vous puissiez bien comprendre ce qui se passe parce qu’il est possible qu’un certain nombre parmi vous n’aient pas pu participer à la messe samedi. Or, il fallait entendre la 1° lecture de samedi pour comprendre ce qui se joue dans cette rencontre entre Paul et les chrétiens appartenant à la petite communauté qu’il trouve dans cette ville d’Ephése, communauté fondée par Apollos.
Samedi, on nous disait qu’Apollos était passé à Ephèse, donc bien avant Paul et que c’est lui qui avait réalisé la 1° annonce de l’Evangile dans cette ville et donc créer la 1° communauté chrétienne. Je vous lis les versets de cette lecture de samedi qui nous présentaient Apollos réalisant cette fondation : « un Juif nommé Apollos, originaire d’Alexandrie, venait d’arriver à Éphèse. C’était un homme éloquent, versé dans les Écritures. Il avait été instruit du Chemin du Seigneur ; dans la ferveur de l’Esprit, il parlait et enseignait avec précision ce qui concerne Jésus. » C’est donc un portrait très élogieux qui nous est fait de cet homme, c’est même le portrait du presque-parfait prédicateur que brosse ce texte. D’abord, il était éloquent, c’est important de bien parler quand on est prédicateur. Ensuite, on nous dit qu’il était versé dans les Ecritures, voilà encore une belle qualité pour un prédicateur que cette capacité à rendre la Parole parlante. Et puis il est encore précisé qu’il avait été instruit du Chemin du Seigneur, c’est-à-dire qu’il était un nouveau converti, ce qui signifie qu’il était habité par le feu, comme tous les nouveaux convertis, c’est d’ailleurs confirmé par la suite : il parlait dans la ferveur de l’Esprit. Voilà encore une bien belle qualité pour un prédicateur : en effet, parler dans la ferveur de l’Esprit, c’est l’assurance de pouvoir toucher les cœurs. D’autant plus que sa prédication n’était pas fondée que sur les émotions puisque nous pouvons encore lire qu’il enseignait avec précision ce qui concernait Jésus. N’hésitez pas à prier pour que le prédicateur de cette semaine ait au moins quelques-unes de ces très belles qualités qui étaient celles d’Apollos.
En tout cas, on comprend qu’avec de telles qualités, Apollos ait réussi à conduire à la conversion un certain nombre de juifs à qui il avait parlé dans la synagogue d’Ephèse. Ceci dit, il y avait quand même un hic. En effet, Apollos, au milieu de toutes ses qualités, avait une vraie faiblesse et quelle faiblesse ! Comme baptême, il ne connaissait que celui de Jean le Baptiste, c’est encore ce que nous disait la lecture de samedi. Priscille et Aquila, un très beau couple, l’avaient pris en main pour compléter sa formation … mais il n’avait pas dû avoir le temps de rectifier le tir auprès de tous les nouveaux convertis d’Ephèse avant de les quitter. Et c’est là que nous en arrivons à la lecture d’aujourd’hui. Quittant Corinthe, Paul décide de visiter la communauté d’Ephèse, sans doute parce qu’il avait entendu parler de l’excellent travail accompli par Apollos. Mais quand il arrive à Ephèse, très vite, il voit qu’il y a quelque chose qui cloche dans cette communauté. Ces chrétiens étaient sans doute généreux à l’image d’Apollos, mais dans leur comportement, Paul détecte assez vite quelque chose qui ne va pas bien. Du coup, il leur pose cette question étonnante : Lorsque vous êtes devenus croyants, est-ce que vous avez reçu l’Esprit Saint ? Et vous avez entendu leur réponse encore plus étonnante que la question : Nous n’avons même pas entendu dire qu’il y a un Esprit Saint ! Paul essaie donc de comprendre comment c’est possible et il a une intuition, il doit y avoir quelque chose de grippé dès le départ et c’est ce qu’il veut vérifier : Quel baptême avez-vous donc reçu ? En écoutant leur réponse, il comprend tout de suite : ils n’avaient reçu que le Baptême de Jean-Baptiste qui était le seul baptême que connaissait Apollos quand il les avait initiés à la foi.
Je pourrais longuement commenter tout cela, je ne retiens qu’une seule chose et c’est pour cela que je disais qu’on pouvait difficilement rêver d’une meilleure lecture pour commencer cette retraite. Cette histoire nous montre qu’on ne peut pas être vraiment chrétien si on ne vit pas du Saint-Esprit. On n’a pas de détails sur ce qui se passait à Ephése, mais c’est évident que Paul a tout de suite vu que ça n’allait pas. Quand on vit sans connaître le Saint-Esprit et donc sans pouvoir s’appuyer sur lui, ça finit par se voir assez vite. Tout au long de cette semaine, nous allons découvrir ou au moins approfondir tout ce que le Saint-Esprit apporte à notre vie chrétienne. Nous comprendrons donc que vivre sans lui, ce n’est pas possible. Je suis sûr que si Paul revenait parmi nous et qu’il faisait le tour de nos communautés, il poserait dans la plupart des lieux cette question qu’il posait aux chrétiens d’Ephèse, peut-être en la modifiant légèrement : Lorsque vous êtes devenus croyants, vous avez forcément reçu l’Esprit Saint, pourquoi ne comptez-vous pas plus sur lui ? Pourquoi ne le priez-vous pas plus souvent ? Oui, nous avons tous reçu le Saint-Esprit à notre Baptême, dans le sacrement de la Confirmation et dans tous les autres sacrements qui sont donnés dans la puissance du St Esprit et qui répandent, tous, en nos cœurs, la grâce du St Esprit. Mais pourquoi ne le laissons-nous pas plus agir en nous ?
Nous n’avons pas attendu le COVID pour imposer un confinement strict au St-Esprit, et c’est un confinement bien plus strict que le 1° confinement que nous lui imposons ! Rappelez-vous, lors du 1° confinement, nous n’avions pas le droit de sortir à plus d’un kilomètre de chez nous, eh bien, dans le cœur de beaucoup de chrétiens, le St Esprit est confiné de manière bien plus stricte puisqu’ils ne le laissent pas sortir de leur cœur. Le St Esprit, lui, il voudrait bien pouvoir, au moins visiter notre intelligence, notre volonté, notre affectivité, notre sensibilité pour que nous vivions plus en harmonie avec notre foi. Il aimerait de temps en temps pouvoir pousser une sortie jusque dans notre portefeuille pour que soyons des chrétiens plus généreux. Mais, lui, il on ne lui propose même pas de pouvoir signer et présenter une autorisation dérogatoire de sortie du cœur pour accomplir son travail dans toutes les dimensions de notre personnalité.
Tant que le Saint-Esprit restera confiné dans nos cœurs, tant qu’on ne lui demandera que des émotions spirituelles, tant qu’on ne le laissera pas travailler en nous, dans nos communautés en lui accordant carte blanche, notre foi restera ratatinée, peu opérante et nos communautés ne seront pas rayonnantes au point d’attirer. C’est donc une semaine de déconfinement que vous êtes venus vivre. Ce que vous allez vous accorder cette semaine, je vous supplie de l’accorder au St Esprit : vous allez profiter du bon air de la montagne et ça serait idiot de ne pas en profiter eh bien, laissez la même liberté au St Esprit en vous, sortez-le du confinement dans lequel, plus ou moins consciemment, vous le maintenez en vous. Lui aussi, il a envie du grand air !
Je termine en évoquant une bonne parole du pape François. Il commentait la belle citation de l’Apocalypse (3,20) dans laquelle Jésus dit : voici, je me tiens à la porte de ton cœur et je frappe, si tu m’ouvres, j’entrerai. Le pape dit : quand nous sommes devenus chrétiens, nous lui avons ouvert la porte et il est entré, pourtant, il continue de frapper ! Mais maintenant, c’est de l’intérieur qu’il frappe, suppliant de le laisser sortir car il ne veut pas rester enfermé ! Eh bien, on peut dire la même chose du St Esprit, il frappe pour sortir, non pas pour partir, mais pour irriguer toute notre vie de son amour puisque, nous aurons l’occasion de le revoir, il est l’Amour. Si ça vous fait envie d’avoir une vie irriguée par l’Amour, vous avez bien fait de venir, c’est la bonne adresse. Par contre si vous préférez rester ratatinés, bougons, tristes, radins et je ne sais quoi encore, partez vite !
Comme cette homélie vient encore bousculer en moi ce temps d’attente de mon ordination diaconale où « crainte et joie » sont entremêlées.
C’est un Esprit de force que vous recevrez !