30 mai : Pentecôte : l’Esprit-Saint fout droit et donne le coup de foudre !

Depuis l’Ascension, comme les apôtres et ceux qui les accompagnaient, nous sommes au Cénacle. Je ne sais pas quelle image vous vous faites du Cénacle, j’ose vous partager la représentation que je m’en fais même si elle ne correspond guère à l’iconographie habituelle inspirée par la petite phrase des Actes disant que, d’un même cœur, ils étaient assidus à la prière. Partant de là, souvent, on représente les apôtres et ceux qui les accompagnaient à genoux, passant toute leur journée à prier dans une ferveur extraordinaire … comme si le Saint-Esprit leur avait déjà été donné ! Moi, ce n’est pas comme ça que je me les représente. D’abord parce que, eux, quand ils sont rentrés au Cénacle, ils ne savaient pas combien de temps allait durer leur confinement, ils n’étaient pas partis pour une neuvaine et aussi, et surtout parce qu’ils devaient être morts de trouille. Ils se demandaient ce qu’ils allaient bien devenir. Bien sûr, Jésus leur avait annoncé qu’ils allaient être revêtus d’une force venue d’en haut ; bien sûr, il leur avait parlé du Saint Esprit, mais qu’est-ce qu’ils avaient compris ?

Ce dont ils étaient sûrs, c’était que Jésus était parti et que, en partant, il leur avait confié une mission impossible. Mission impossible en raison de son ampleur : être témoins jusqu’aux extrémités de la terre, pas seulement dans leur quartier, auprès de leurs amis, jusqu’aux extrémités de la terre ! Et, mission impossible, surtout en raison de leur pauvreté. Maintenant, il n’y a plus un qui osait le faire le malin, plus personne ne se demandait qui était le plus grand, ils savaient qu’ils étaient tout petits, bien trop petits pour la mission confiée. Le Saint Esprit, force d’en haut, promis par Jésus suffirait-il ? Personnellement, je les vois assez agités par toutes ces questions qui devaient tourner et retourner dans leur tête. Heureusement qu’il y avait Marie avec eux parce que, finalement, il n’y avait qu’elle qui connaissait de manière expérimentale la puissance du Saint Esprit, l’Esprit-Saint l’avait pris sous son ombre et l’impossible était devenu possible. Et l’Esprit-Saint n’avait pas fait que la prendre sous son ombre, il l’avait suivie ensuite comme son ombre et elle a eu la force de tout vivre dans la foi. Je pense que c’est ce dont elle témoignait auprès des apôtres. Mais j’imagine volontiers, le scénario suivant : elle leur parlait, du coup, ils étaient rassurés, alors, elle les invitait à se remettre à prier dans la confiance, mais au bout d’un quart d’heure, une demi-heure, il y en a un qui, trop angoissé, disait : oui mais … Et il fallait tout recommencer !

Au Cénacle j’imagine donc une ambiance un peu lourde, même carrément plombée. Et voilà qu’enfin le Saint Esprit va tomber sur eux. Le Seigneur faisant toujours bien les choses il a choisi le jour de la fête de Pentecôte pour envoyer le St Esprit, car vous savez que Pentecôte est une fête juive. C’est pour cela que, dans le récit des Actes, nous avons entendu : « quand le jour de la Pentecôte arriva … » Et la fête juive de Pentecôte faisait mémoire du don de la Loi, sur le Sinaï, 50 jours après la Pâque, la sortie d’Egypte. Le livre de l’Exode nous raconte comment s’est passé le don de la Loi. Dieu s’est manifesté dans un orage terrible : « Le troisième jour, dès le matin, il y eut des coups de tonnerre, des éclairs, une lourde nuée sur la montagne. » Oui, vraiment un orage terrible et c’est assez étonnant parce que, la lecture des Actes reprend exactement les mêmes signes pour le don de l’Esprit : « un bruit survint du ciel comme un violent coup de vent et une boule de feu. » En fait, ce n’est pas étonnant qu’on retrouve les mêmes signes puisque nous sommes le jour de Pentecôte qui fait précisément mémoire de ce qui s’est passé au Sinaï.

Du coup, je trouve que ça devient très intéressant parce que ça veut dire que le St Esprit est tombé comme la foudre. Pour développer cela, j’aimerais faire deux jeux de mots.

1/ Si l’Esprit-Saint est tombé comme la foudre, ça veut dire qu’il foudroie. Mais foudroyer, vous pouvez l’écrire de deux manières, à la manière des gens bien élevés qui respectent l’orthographe et le sens des mots ou à la manière de ceux qui ne sont pas très forts en orthographe et qui utilisent plutôt le langage très populaire : il fout droit ! C’est-à-dire, il remet droit. De fait, c’est bien de cela qu’avaient besoin les apôtres. Eux qui se retrouvaient complètement écrasés par le poids de la mission confiée et par la prise de conscience de leur incapacité radicale à l’accomplir, voilà que l’Esprit-Saint tombe sur eux et les fout-droit ! Ce n’est pas la 1° fois que l’Esprit-Saint agissait de la sorte. Dans l’Evangile, nous connaissons le miracle que Jésus effectue en faveur de cette femme courbée depuis tant d’années. Jésus lui impose les mains, c’est-à-dire lui donne le Saint-Esprit et voilà qu’elle se redresse immédiatement. Oui, vraiment, on peut le dire et c’est une bien bonne nouvelle : l’Esprit-Saint fout droit ceux qui en portent trop lourd, ceux qui sont courbés, découragés, angoissés, ceux qui se demandent ce qu’il va advenir. Nous avons bien besoin de demander l’Esprit qui fout droit car nous sommes un peu écrasés, courbés sous le poids de tout ce que nous avons vécu. Peut-être que certains d’entre vous ont perdu des proches sans pouvoir les accompagner comme ils auraient aimé le faire. Et puis, il y a la suite qui inquiète tout le monde, comment le pays va-t-il repartir ? Oui, vraiment, nous avons tout particulièrement besoin de l’Esprit qui fout droit en cette fête de Pentecôte qui arrive à ce moment si particulier.

2/ Venons-en au 2° jeu de mots. Quand on dit que l’Esprit-Saint est tombé comme la foudre, on peut dire que les apôtres, en le recevant, ont reçu un coup de foudre ! Et, là, je tombe dans le langage amoureux. Mais ça lui va très bien au St Esprit cette fonction de donner le coup de foudre. Parce que, nous le savons, le Saint Esprit, dans la Trinité, c’est l’amour. Comme le disait St Augustin, le Père, c’est celui qui aime, le Fils, c’est celui qui est aimé et le St Esprit, c’est l’Amour. Donc si le St Esprit est l’amour, il n’est pas étonnant qu’il soit responsable des coups de foudre ! En recevant le St Esprit comme un coup de foudre, les apôtres vont être inondés d’amour parce que la mission qui leur a été confiée, c’est de répandre l’amour. En leur demandant de baptiser tous les hommes au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, c’est bien cela que Jésus leur a demandé, il veut que toute l’humanité soit plongée dans le bain d’amour trinitaire pour qu’il en soit fini de ce terrible règne du moi d’abord. Mais comment pourraient-ils accomplir cette mission sans être eux-mêmes inondés d’amour ? 

Nous en avons besoin, nous aussi de ce coup de foudre. Le temps de confinement a fait surgir des gestes merveilleux d’attention entre voisins, de respect du travail de ceux qui continuaient leurs missions pour que nous, nous puissions continuer à vivre. Il y a eu ces gestes de reconnaissance vis-à-vis des soignants, mais aussi la reconnaissance de l’importance des caissières, des éboueurs et de tant d’autres. Nous avons compati au malheur des autres, de ceux qui vivaient proches de nous, mais aussi plus éloignés en Europe ou dans le monde. Bref, c’est vraiment paradoxal, alors que le confinement nous enfermait, nos cœurs s’ouvraient. Du coup, nous nous sommes tous mis à rêver que le monde d’après ne soit plus comme le monde d’avant. Mais est-ce aussi sûr que ça va marcher, le déconfinement se produit et chacun risque de retrouver ses anciens comportements, ses anciens réflexes. Nous avons bien besoin de ce coup de foudre pour que l’amour emplisse nos cœurs et nous empêche de revenir en arrière. Nous aurons bien besoin de lui pour que le monde d’après ne ressemble plus au monde d’avant.

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