4 janvier : appel disciples page blanche et ardeur missionnaire

C’est un beau cadeau qui nous est fait de pouvoir entendre cet évangile au cœur de ces journées communautaires que nous vivons. Oui, il nous fait du bien ce texte qui nous permet de réentendre l’appel des premiers apôtres.

Une seule parole a suffi pour que les deux premiers se mettent à suivre Jésus, il s’agissait d’André et sûrement de Jean lui-même puisqu’il sera, par la suite, capable de raconter tout ce qui s’est passé. Une seule parole a suffi : « Voici l’Agneau de Dieu. » 

L’Agneau, bien sûr, il évoque l’agneau de la Pâque en Egypte dont le sang avait servi à marquer les linteaux des maisons des hébreux pour qu’ils soient épargnés. Quand André et Jean entendent cette parole : Voici l’Agneau de Dieu, ils comprennent donc tout de suite que Jésus est le Sauveur attendu, celui qui enfin, allait apporter la libération, celui qui, enfin, allait répondre au désir de leur cœur. Bien sûr, à l’époque, on ne chantait pas encore : depuis plus de 4000 ans nous le promettaient les prophètes, mais le désir de leur cœur, il avait bel et bien été affiné, avivé par la prédication des prophètes. Depuis le temps qu’ils entendaient, qu’ils répétaient ces promesses qu’il viendrait bientôt celui qui allait donner un cœur nouveau, mettre au plus profond des hommes un esprit nouveau pour que chacun soit enclin à faire le bien, à aimer Dieu et son prochain non plus par une contrainte extérieure comme l’était la loi mais par une attirance intérieure.

Et voilà que Jean-Baptiste prononce ces paroles qui ne laissent plus aucun doute : « Voici l’Agneau de Dieu. » Ces quelques mots ont dû avoir à peu près le même impact dans l’oreille des apôtres que les mots de Verlaine dans l’oreille des résistants quand ils ont entendu : blessent mon cœur d’une langueur monotone ! Tout le monde a compris que le grand jour était enfin arrivé et que la libération était proche. Nous pouvons y penser quand nous entendons ces mêmes mots à la messe et nous réjouir intérieurement à l’idée que les chaines que j’ai repris depuis hier, il vient encore m’en délivrer !

En tout cas, pour André et Jean, ces paroles suffisent largement à les mettre en route à la suite de Jésus. « Ils allèrent donc, ils virent où il demeurait, et ils restèrent auprès de lui ce jour-là. » Par nature, nous sommes des petits curieux et nous aimerions savoir ce qui s’est passé au cours de cette toute première journée passée avec Jésus. Qu’est-ce que Jésus leur a dit, comment ils ont accueilli ce qu’il leur disait. Jean aurait pu le raconter puisqu’il y était, mais, ça va vous rappeler quelqu’un, Jean a préféré laisser une page blanche dans son Evangile !

Hier, en fin d’après-midi, dans un temps merveilleusement bon, nous nous sommes raconté nos histoires saintes, l’histoire de nos appels. Dans le groupe où j’étais, j’ai apprécié que nous soyons allés aussi loin dans le partage. Pourtant, même si chacun acceptait de se livrer en profondeur, il y avait cette même retenue sur ce qui a été au cœur du cœur de notre expérience, de notre rencontre avec Jésus, de son appel, de ses promesses, c’était notre page blanche à nous ! Parce que c’est vrai qu’il y a quelque chose d’indicible dans cette rencontre, les mots sont trop pauvres et piégés pour rendre compte de cet événement qui a orienté notre vie de manière définitive. 

D’ailleurs, le plus important n’est pas d’en parler sans arrêt, mais de voir ce que cette rencontre a permis, a produit. Dans l’Evangile, c’est trop clair, André court voir son frère Simon pour lui dire : ça y est, nous avons trouvé le Messie. J’aime beaucoup la mise en scène que propose Zeffirelli dans son très célèbre film Jésus de Nazareth. André essaie de convaincre Pierre qui est en train de préparer la prochaine pêche et manifestement, il n’a pas le même enthousiasme que son frère ! Il le lui dit : moi, ce n’est pas mon truc de suivre les prêcheurs, vas-y toi, si tu en as envie. Mais comme André ne le lâche pas, il finit par aller voir le prêcheur pour avoir la paix. Et, arrivé devant Jésus, il s’entend appelé par son nom et regardé comme il n’avait jamais été regardé. Lui aussi, il est touché en plein cœur.

Oui, le plus important n’est pas de raconter dans les détails notre appel, le plus important, c’est de voir quelles conséquences cet appel a eu dans notre vie, comment, à l’image d’André, il nous a fait devenir des disciples-missionnaires. Mais, hier, si nous avons partagé la manière dont le Seigneur s’y est pris pour nous appeler, ce n’était pas pour ouvrir une séquence nostalgie. Il s’agissait de retourner à la source de notre appel pour voir comment nous en vivons encore aujourd’hui. Parce que celui qui nous a séduits n’a rien perdu de son pouvoir de séduction. Si la passion est moins vivre, ce n’est pas de sa faute à lui ! Son cœur à lui, reste un brasier ardent, mais peut-être que nous, nous n’osons plus nous en approcher avec le même désir.

L’autre jour, j’entendais sur RCF, le témoignage d’une dame âgée qui avait la chance d’être en bonne santé ainsi que son époux et elle racontait qu’il leur arrivait, en fin d’après-midi, de mettre un disque et de danser, seuls, dans leur salon. Et nous, quand nous venons à l’adoration, est-ce qu’il nous arrive d’oser mettre un disque et de lui demander s’il nous accorderait encore une danse comme au temps où il nous a séduits ? La valse sera sûrement moins endiablée, mais avec lui, c’est plutôt préférable de ne pas parler « d’endiablement » ! Mais elle peut rester gracieuse et généreuse.

Parce que, ne nous y trompons pas, c’est l’ardeur de notre comportement de disciple-missionnaire qui est en jeu. André a fini par décider Pierre parce qu’il avait le cœur brûlant. Il y a bien peu de chance que nous attirions si notre vie spirituelle ressemble un peu trop au comportement de ces braves gens, dans le film camping, dont je parlais au cours de la retraite, les Pic, qui, chaque année, viennent pour se retrouver à l’emplacement 17 et qui font tout un plat quand on les met au 18 ! Celui qui a le cœur brûlé d’amour qu’il soit au 17 ou au 18 ou à n’importe quel autre emplacement, ça n’a aucune importance, pourvu qu’il y soit avec le Bien-Aimé de son cœur !

Puisque nous sommes dans le début de l’année,  dans cette messe et dans le temps de célébration que nous vivrons en fin d’après-midi, demandons la grâce d’un puissant renouvellement intérieur pour que nous soyons tous, individuellement et communautairement, rayonnants et attirants.

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