4 juillet : pas de rafistolage !

Un mot sur la 1° lecture qui nous a fait entendre la fin du livre d’Amos. Hier, en raison de la fête de St Thomas, nous n’avons pas pu entendre les versets qui précèdent le texte d’aujourd’hui et qui nous auraient permis de comprendre à quoi fait allusion le prophète quand il dit : « Ce jour-là. » Les versets annoncent un grand ménage du Seigneur, un ménage assez terrifiant d’ailleurs : Dieu ne veut plus laisser subsister ceux qui sont à l’origine des problèmes que rencontrent le peuple : le roi et sa cour ainsi que tous ceux qui ne sont pas ancrés dans la fidélité à la Loi. Tout cela est, bien sûr, annoncé dans le style prophétique de l’époque. Aujourd’hui, quand nous lisons ces textes, nous comprenons que Dieu, parce qu’il veut le bonheur de son peuple va devoir doit agir comme un bon médecin. Quand le malade souffre d’une infection due à une vilaine plaie, le médecin doit commencer par nettoyer cette plaie et c’est souvent très douloureux, mais sans cette désinfection en profondeur, il ne peut y avoir d’espoir de guérir. C’est ce que Dieu va faire et il prévient donc que ça ne sera pas un moment agréable. Mais quand, enfin, tout sera bien nettoyé, alors, comme le dit le texte : « Ce jour-là, » commencera une ère nouvelle.

Dans notre vie, nous avons régulièrement à nous laisser nettoyer, désinfecter du péché qui risque de provoquer une infection généralisée et de tout gâter dans notre vie. Ce moment de la désinfection n’est jamais franchement agréable, nous nous en rendons bien compte parce qu’il faut souvent se faire un peu violence pour décider d’aller se confesser. Mais quand c’est fait, toutes les promesses annoncées par Amos sont aussi pour nous. Et je vous inviterai à les relire tranquillement à un moment ou à un autre pour les savourer.

Il faudrait beaucoup de temps pour commenter cette controverse sur le jeûne dont il était question dans l’Evangile. Je ne veux retenir que quelques points qui ont nourri ma méditation.

1/ La question des disciples de Jean-Baptiste, telle qu’elle est formulée est quand même étonnante. Ces disciples ne commencent pas par dire : pourquoi tes disciples ne jeûnent-ils pas alors que nous, nous jeûnons ? Mais ils disent : Pourquoi nous jeûnons, alors que tes disciples ne jeûnent pas ? J’espère que vous avez entendu la différence ! C’est un peu comme s’ils venaient voir Jésus pour lui dire : nous ne comprenons pas bien ce que vous refusez de faire mais nous ne comprenons pas plus ce que nous faisons ! Pourquoi est-ce que nous jeûnons ? Je ne veux pas trop durcir ce point parce qu’il peut y avoir par derrière une tournure sémite que le grec a eu du mal à transcrire. Mais quand même, la manière dont la question est formulée m’intéresse parce qu’elle doit nous aider à nous poser une bonne question : et nous, est-ce que nous comprenons toujours le sens de ce que nous faisons ? Est-ce que nous donnons toujours assez de sens aux gestes et attitudes de la foi, aux paroles que nous prononçons dans la prière et la liturgie ? Régulièrement, nous avons besoin de nous arrêter pour nous interroger, pour redonner du sens afin que nos gestes et paroles ne deviennent pas purement et simplement des actes ritualistes qui n’ont plus d’effets sur nous.

2/ Je trouve très intéressant la manière dont Jésus répond à la question des disciples de Jean. Il ne se lance pas dans un grand développement sur le sens du jeûne et sur la liberté qu’il pourrait avoir pour interpréter la Loi. Il part d’une exception prévue par la Loi elle-même : on ne jeûne pas dans le temps d’une fête et particulièrement le temps d’un mariage. Et vous savez sans doute qu’un mariage chez les juifs, à l’époque, ça durait : 7 jours avant et 15 jours après ! C’est ce qui explique qu’on ait pu manquer de vin à Cana, il fallait prévoir pour 3 semaines et pas seulement pour une soirée ! Mais revenons à l’argumentation de Jésus que je traduis ainsi : en ne jeûnant pas, nous n’enfreignons pas la loi puisqu’elle prévoit elle-même l’exemption du jeûne pour ceux qui participent à un mariage et de manière toute particulière pour l’époux et ses amis qui étaient chargés d’animer ces 3 semaines de fête.

Sa présence au milieu des hommes, Jésus l’explique comme une fête de mariage. Il est l’époux et ses apôtres les amis de l’époux qui sont si importants pour la réussite de la fête. C’est déjà une belle manière pour Jésus de parler de ses disciples, ceux d’hier comme ceux d’aujourd’hui : nous sommes les amis de l’époux chargés d’animer la fête ! Car, vivre en présence du Christ, ça doit être une fête pleine de joie. C’est cette joie qu’annonçaient les prophètes et qu’ils n’ont pas pu voir, il y a tant de prophéties qui annoncent cette joie qui éclatera quand Dieu sera au milieu de ses peuples scellant des noces éternelles.

Et, si Jésus est l’époux, bien sûr, l’épouse, c’est l’Eglise et même plus largement l’humanité ou plutôt l’Eglise, en tant qu’elle est appelée à rassembler tous les hommes. Qui dit mariage dit alliance, il y aura toujours et dans toutes les cultures, ce moment si important de la remise des alliances. Jésus est donc venu renouveler l’Alliance, c’est ce que nous disons à la messe : ceci est le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle. Ce n’est donc pas étonnant que, dans l’évangile de St Jean, le 1° signe qu’accomplit Jésus, c’est au cours d’un mariage !

Jésus renouvelle l’Alliance, terminons en voyant ce que ça veut dire ! L’ancienne Alliance avait été scellée avec le code de l’Alliance, la Loi. Mais cette Loi a souvent été vécue comme une contrainte imposée de l’extérieur, dictant des comportements difficiles à observer. Les prophètes ont annoncé qu’un jour, la loi ne serait plus une contrainte extérieure gravée sur des tables de pierre mais qu’elle jaillirait comme un désir spontané de faire du bien, ce jour-là on découvrira qu’elle est écrite dans les cœurs. Voilà ce qu’annonce Jésus : avec lui tout cela est en train de se produire et quand l’Esprit-Saint sera donné, tout cela encore plus manifeste car il est le doigt de Dieu qui grave cette nouvelle Loi dans les cœurs.

Tout cela, dit Jésus inaugure des temps nouveaux où tout sera renouvelé, mais seuls ceux qui veulent vraiment entrer dans cette nouveauté pourront partager la joie de ces noces. Tous ceux qui ne veulent que raccommoder leur vieux manteau et garder leurs vieilles outres, leurs cœurs formatés par l’ancienne loi, ceux-là n’auront pas accès à la joie des noces et resteront empêtrés dans des vieilles pratiques dont ils ne comprendront même plus le sens ! Vous l’avez compris, c’est à nous de choisir : que voulons-nous ? Nous laisser renouveler en profondeur pour vivre la joie de noces en cette qualité d’amis d’époux ou voulons-nous simplement raccommoder nos vieilles habitudes en mettant quelques pièces nouvelles qui ne tiennent jamais très longtemps ?

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