6 juillet : c’est pour de vrai ?

Vous savez quand on raconte une histoire triste aux enfants, ils se mettent parfois à pleurer à chaude larmes et, pour consoler, on est obligé de leur dire : « c’était pas pour de vrai, c’est une histoire et puis on est encore pas à la fin, tu verras, ça va s’arranger à la fin ! » En entendant la 1° lecture, on pourrait avoir la réaction de ces enfants parce que, ce que promet Dieu pour son peuple, ce n’est quand même pas très réjouissant, je ne relis que quelques mots : « Ils ont semé le vent, ils récolteront la tempête. L’épi ne donnera pas de grain ; s’il y avait du grain, il ne donnerait pas de farine ; et, s’il en donnait, elle serait dévorée par les étrangers. » Est-ce que, pour se consoler, on peut dire que ce qu’annonce Dieu, c’était pas pour de vrai ? Oui et non ! 

Pour comprendre ma réponse de normand, il faut rappeler rapidement la problématique du livre d’Osée qui nous accompagne toute cette semaine. Dieu n’en peut plus des infidélités de son peuple qui lorgne sans arrêt sur les idoles et qui fait même plus que lorgner sur elles ! Il veut que le peuple connaisse sa souffrance, car Dieu est amoureux de son peuple comme au 1° jour, il veut aussi prévenir le peuple qu’il court à sa perte en continuant à vivre ainsi dans l’infidélité. Pour annoncer cela, Dieu se dit qu’il ne peut pas trouver mieux qu’un homme qui vive cela dans son propre couple, c’est pourquoi il appelle Osée, un homme qui connait tant de déboires conjugaux puisqu’il a épousé une femme très volage. Du coup, lorsque Osée parle de la souffrance de Dieu devant les infidélités de son peuple, il en parle avec la profondeur de sa propre souffrance. Puisqu’il vit la même situation, mieux que quiconque, il peut traduire les sentiments de Dieu.

Quand un homme est trompé ou quand une femme est trompée, à cause d’un excès de souffrance, il lui arrive de rêver un tas de malheur pour celui ou celle qui fait le tant souffrir. C’est exactement comme ça qu’il faut comprendre la 1° lecture. Mais si c’est homme ou cette femme qui sont trompés aiment encore celui ou celle qui est à l’origine de leur souffrance à cause de son comportement, il sait très bien qu’il ne mettra jamais en œuvre ses menaces et que, tôt ou tard, il va tenter une nouvelle opération séduction pour reconquérir le cœur de celui ou celle qui s’éloigne. C’est pourquoi on peut dire que tout ce qui dit Dieu dans ce texte, c’est pas pour de vrai. Par contre, c’est bien pour de vrai qu’il souffre !

Evidemment, Dieu ne souffrait pas seulement il y 2770 ans des infidélités de son peuple, au temps du prophète Osée, il souffre encore aujourd’hui car l’infidélité c’est un problème récurrent. Aujourd’hui, Dieu souffre de nos infidélités, de mes infidélités. Puissions-nous entendre ces lectures de cette semaine non pas comme des condamnations, mais comme une invitation pressante à revenir vers lui. Elles sont vraiment l’expression d’un Dieu encore amoureux de nous comme au 1° jour, et mes infidélités qui l’ont blessé n’ont pas entamé cet amour, au contraire, il s’est encore renforcé, il est encore plus déterminé que jamais à reconquérir mon cœur. Ne le laissons pas attendre plus longtemps car si c’est pas pour de vrai qu’il prononce des menaces, c’est bien pour de vrai qu’il souffre de mes écarts ! 

Et c’est bien pour de vrai que mes écarts me conduisent dans des impasses car, comme le rappelait le psaume, les idoles qui m’attirent, elles ne peuvent rien tenir de ce qu’elles promettent. Vous relirez ce psaume, le contraste est saisissant entre Dieu qui est si sensible, qui souffre tant et ces idoles totalement insensibles, qui n’ont aucun sens qui fonctionne : « Elles ont une bouche et ne parlent pas, des yeux et ne voient pas, des oreilles et n’entendent pas, des narines et ne sentent pas. Leurs mains ne peuvent toucher, leurs pieds ne peuvent marcher. »

Et comme on dit : Tel Père, tel Fils ! Dans l’Evangile, Jésus nous est présenté à l’image de Dieu son Père, sa sensibilité, au bon sens du mot est très développée. Ça me frappe toujours de voir que le sens le plus développé chez Jésus, c’est la vue. Avec Jésus tout commence toujours par un regard et un regard qui ne s’arrête pas aux apparences, un regard capable de comprendre la souffrance parfois bien cachée vécue par ceux qu’il rencontre. C’est bien le cas dans notre texte d’aujourd’hui, Jésus voit un homme possédé que l’esprit mauvais coupe de toute communication possible puisqu’il ne peut pas entendre et donc pas parler. Quelle souffrance pour un homme que de ne plus être maitre de lui-même, c’est ce que signifie la possession et d’être coupé de toute communication.

Ayant guéri cet homme, il parcourt ensuite TOUTES les villes et villages, Matthieu qui rapporte cette scène devait être un peu de Marseille pour exagérer comme ça en disant TOUTES les villes et villages ! Il veut dire que partout où il passe, il voit des misères et ne peut le supporter parce que le regard de Jésus est directement relié à son cœur, ce qui, hélas, est loin d’être le cas : nous voyons tant de souffrances sans que ça ne nous fasse bouger ! Et, il n’y a pas besoin de regarder le journal télévisé pour voir des souffrances, il suffit d’être attentif à ceux que nous croisons, à ceux avec qui nous vivons pour voir des souffrances ! Est-ce que notre regard est toujours branché sur notre cœur ? Et, Jésus, non seulement son regard est branché sur son cœur, mais il est aussi branché sur ses pieds ! Quand il a fini en un lieu, il ne se contente pas de ce qu’il vient de faire, il ne dit pas : j’ai fait ma part, maintenant c’est le tour des autres ! Non ! Il part vite pour un autre lieu continuer à faire du bien.

Et finalement, ce que Jésus va voir partout où il passe, ce ne sont pas que des gens qui ont des problèmes de santé mais il voit des personnes désemparées et abattues

comme des brebis sans berger. Il voit tout le bien qu’il y aurait à faire en faveur de tant de personnes, un bien qui ne peut pas être fait parce qu’il manque des ouvriers pour la moisson. Si Jésus voyait cela, il y a 2000 ans, ce qu’il voit aujourd’hui déclenche chez lui la même compassion et le même appel pour trouver des bergers qui prennent soin de tous ceux qui sont abattus et désemparés. 

Demandons vraiment pour nous et pour tous les chrétiens d’obtenir cette grâce d’avoir un regard directement branché sur le cœur, les pieds et les mains.

Cette publication a un commentaire

  1. Adéline

    Branchée, l’homélie !!! Merci 😉

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