Quand je vous disais, hier, que ce pauvre tobith n’avait pas la baraka, ça se vérifie vraiment aujourd’hui ! Le début de la lecture nous rappelle l’événement déjà mentionné, hier, Tobith a pris tous les risques pour donner une sépulture décente à l’un de ses compatriotes. Le roi l’avait interdit, il lui avait déjà confisqué tous ses biens pour avoir désobéi, mais Tobith récidive et on avait entendu ses voisins, hier, manifester leur incompréhension : pourquoi ne restait-il pas tranquille après ce qui lui était arrivé ? En fait, pour Tobith, il n’y avait rien de plus important que de suivre sa conscience. Après avoir achevé le travail de cette sépulture qu’il avait dû effectuer seul, on imagine mal que quelqu’un ait voulu partager le risque avec lui, Tobith prend un bain, sans doute parce qu’il a transpiré mais surtout pour se purifier. Et il s’accorde un repos bien mérité en faisant une sieste à l’ombre d’un mur. Malheur à lui, il n’avait pas vu les moineaux sur le mur qui vont se soulager sur lui. Avouez que ce n’est quand même pas de chance, c’est vraiment ce qui s’appelle être au mauvais endroit au mauvais moment, le pauvre Tobith n’a vraiment pas la baraka. Telle la femme hémorroïsse de l’Evangile, il va souffrir de nombreux médecins sans que sa situation ne s’améliore, c’est même le contraire puisqu’il finit complètement aveugle. Croyez-vous que, pour autant, il va se détourner de Dieu ? Non, la suite le montre et de quelle manière !
Ne pouvant subvenir aux besoins de sa famille, c’est sa femme qui prend le relai. Les travaux qu’elle effectue sont tellement appréciés qu’elle reçoit un chevreau en guise de 13° mois. Mais, quand elle l’amène à la maison, heureuse de pouvoir améliorer l’ordinaire, Tobith va être pris d’un doute : et si cette bête avait été volée ? Il refuse qu’on la tue et demande à sa femme de la rendre à ses patrons car, pour lui, le respect de la Loi qui interdit de manger une bête volée est plus important que tout. On le voit bien, Tobith ne tient aucune rigueur à Dieu de ce qui lui est arrivé, il est devenu aveugle par un sale coup du sort, il n’en attribue la responsabilité à Dieu. Sans doute qu’il ne comprend pas, mais il ne cherche pas à accuser Dieu, ni à se détourner de sa religion.
Il y en a une qui ne comprend pas, c’est sa femme. A sa décharge, il faut reconnaître que ça ne doit pas toujours être évident de vivre à côté d’un saint ! Je pense souvent à la femme de St Nicolas de Flüe quand il lui a annoncé qu’il allait répondre positivement à l’appel du Seigneur qui lui demandait de tout quitter pour devenir ermite … alors qu’il était père de 10 enfants ! Oui, ça ne doit pas toujours être évident de vivre à côté d’un saint ! En tout cas, la femme de Tobith, un peu à l’image de la femme de Job, nous sommes dans la même littérature de sagesse, ne va pas aider son mari à rester fidèle. Elle lui dit finalement : ça te rapporte quoi de rester fidèle alors que le sort s’acharne contre toi ? Si Dieu ne veut pas te bénir, reprend ta liberté et fais ce que bon te semble, libère-toi du carcan de ta foi qui ne t’apporte que des malheurs ! Demain, nous lirons la prière que Tobith va faire dans cette circonstance dramatique, mais ça sera demain, alors, revenez !
Pour aujourd’hui, je conclus cette histoire en disant que nous pouvons demander au Seigneur qu’il mette sur notre route les bonnes personnes quand nous serons en difficulté, les bonnes personnes qui nous aideront, souvent par leur seule présence bienveillante, sans discours moralisateurs insupportables, à tenir dans l’épreuve. Nous pouvons aussi demander au Seigneur d’être ces bonnes personnes qu’il enverra auprès de ceux qui sont en difficulté … et pour trouver des personnes en difficulté, pas besoin d’aller chercher très loin ! Par contre, pour trouver des bonnes personnes, c’est souvent bien plus compliqué !
Venons-en à l’Evangile et cette fameuse parole de Jésus : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » Cette parole pose tellement de questions, notamment celle-là : Comment on le fait ce partage ? 50/50, la moitié de ma vie regarde Dieu et pas l’autre moitié ? Ou alors 2/3-1/3 ? Mais à qui va la plus grosse part ? Autre solution, tout ce qui touche à mon âme, je gère avec le Bon Dieu, tout le reste, c’est mon affaire ! On comprend bien que ça ne peut pas marcher ainsi : comment pourrait-il y avoir des secteurs de ma vie que je refuse de mettre sous le regard de Dieu ?
Quand Jésus dit : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » je suis donc persuadé qu’il ne nous donne pas une règle de partage qui laisserait entendre que le domaine spirituel concerne Dieu et que le domaine temporel ne le concerne pas. Alors que veut-il dire ?
Quelques mots d’explication tout d’abord pour comprendre l’enjeu du débat qui s’instaure entre les pharisiens et Jésus. D’abord, il faut voir la manœuvre de ces pharisiens. Ils avancent cachés, le texte nous dit qu’ils envoient des disciples, eux, ils restent dans l’ombre. Et ils ont bien briffé ces disciples pour qu’ils commencent par flatter Jésus. Mais Jésus ne va pas se laisser endormir par cette manœuvre de déstabilisation. Il flaire tout de suite le piège qui est très habile. « Devons-nous oui ou non payer l’impôt à César ? » à cette question qui lui est posée, il n’y a, apparemment, que deux réponses possibles. Si Jésus dit oui, il sera montré du doigt, détesté comme un collaborateur qui accepte de financer la puissance occupante. Si Jésus dit non, il pourra être dénoncé comme un rebelle qui refuse de se soumettre au pouvoir en place. J’admire la manière dont Jésus va se sortir du piège qui lui est tendu.
Vous le savez, quand un chien est perdu, on regarde s’il a une médaille sur son collier indiquant le nom du propriétaire. C’est ce que Jésus fait avec cette pièce de monnaie. Puisqu’il y a l’effigie de l’empereur sur les pièces de monnaie, il est normal qu’une partie de cet argent lui revienne. Mais Jésus va considérablement élever le débat. Quand il rajoute : « Rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » il montre que cette question de l’impôt ne le passionne pas. Il déplace le débat pour le mettre là où il y a un enjeu.
La monnaie doit retourner à l’empereur puisqu’il y a son effigie sur la pièce. Et nous, avons-nous déjà réalisé que Dieu a laissé son empreinte en nous ? N’oublions jamais que nous avons été créés à l’image de Dieu, c’est à dire que Dieu a imprimé sa marque en nous. Quand un animal est perdu, on regarde son tatouage pour retrouver son propriétaire. Nous, c’est à Dieu que nous appartenons parce que c’est son effigie qu’il y a dans notre cœur. Alors pour moi, cela a deux conséquences :
1/ Tout dans notre vie doit nous orienter vers Dieu. La pièce retourne à l’empereur, via l’impôt, car il y a l’effigie de l’empereur sur cette pièce. Nous, puisque dans notre cœur, il y a la marque de Dieu, toute notre vie doit être orientée vers lui. Tout ce que nous disons, tout ce que nous faisons, doit nous rapprocher de Dieu. Et cela, ce n’est pas réservé à une élite de saints, non ! Dieu n’a pas laissé son empreinte seulement dans le cœur d’une élite ! Ainsi donc, par sa réponse, Jésus ne veut sûrement pas dire qu’il y aurait des domaines qui ne regarderaient pas Dieu et dans lesquels nous pourrions faire ce que bon nous chante ! Il dit exactement le contraire, le domaine de César, du pouvoir temporel est limité, mais par contre, le domaine de Dieu est illimité. Non pas que Dieu veuille agir comme un surveillant qui ne supporterait pas qu’une parcelle de nos vies lui échappe. Mais il nous invite à unifier toutes nos vies par la foi. C’est la très belle demande du psaume : unifie mon cœur pour qu’il craigne ton nom ! (Ps 85,11) Rien n’est plus douloureux que de vivre écartelé par des choix qui n’ont pas de cohérence. Puisque Dieu a laissé son empreinte en moi que mes choix même en matière économique, politique le regardent.
2/ 2° conséquence. Quand un animal est perdu, on regarde son tatouage pour retrouver son propriétaire et quand l’animal est rendu à son propriétaire, alors c’est une très grande joie pour lui et pour son propriétaire. Quand nous sommes perdus, le plus grand service qu’un frère puisse nous rendre, c’est de nous reconduire à Celui qui a laissé son empreinte en nous ! Quand nous voyons un frère qui se perd, le plus grand service que nous puissions lui rendre, c’est de le reconduire à Celui qui a laissé son empreinte en lui. Et cela nous comblera de joie, comblera de joie le frère perdu et comblera de joie le cœur de Dieu.
On entend parfois des histoires étonnantes de chiens perdus qui ont été capables de faire plusieurs centaines de kilomètres pour retrouver leurs maîtres. C’est absolument extraordinaire ! Mais ce que les chiens sont capables de faire, souvent les hommes ne sont pas capables de le faire, ils sont perdus, malheureux loin de Dieu, mais ils n’arrivent pas à se décider de se mettre à la recherche de leur Maître, alors aidons-les … d’autant plus qu’ils sont nombreux à porter une médaille, la médaille de leur Baptême qui indique sans ambigüité le nom de leur divin Maître mais ils ne se rappellent même plus le sens de cette médaille. Alors, nous qui en connaissons le sens, aidons-les
Wouah, wouah… quelle homélie, je n’en reviens pas. Chat, c’est sûr, c’est un enseignement pile-poil qui convient à tous.
Caninporte la direction, le chemin du Secours du Père Assistance (SPA) est une valeur refuge.
Amen