Celui dont nous nous apprêtons à fêter la 1° venue est bien celui qui a accompli toutes les promesses de Dieu portées à notre connaissance par les prophètes. Pour ne reprendre que celles qui nous étaient annoncées dans la 1° lecture : il a fait entendre les sourds, il a fait parler les muets, il a rendu la vue aux aveugles … et tant d’autres prodiges ! C’est pour cela que l’Evangile d’aujourd’hui nous montrait Jésus faisant voir des aveugles et si on avait continué la lecture, juste après il faisait entendre et parler un sourd muet. Jésus est bien le Messie attendu et annoncé.
D’ailleurs, rappelez-vous, quand Jean-Baptiste est dans sa prison et qu’il se pose tant de questions, il fait envoyer des émissaires auprès de Jésus pour lui demander : es-tu vraiment celui doit venir ou devons-nous en attendre un autre ? La réponse de Jésus est claire, il reprend ces signes qui devaient accompagner la venue du Messie et, donc, attester la vérité de son ministère. Allez annoncer à Jean ce que vous entendez et voyez : Les aveugles retrouvent la vue, et les boiteux marchent, les lépreux sont purifiés, et les sourds entendent, les morts ressuscitent, et les pauvres reçoivent la Bonne Nouvelle. Mt 11,4-5
Mais alors, si tout est aussi clair, pourquoi Jean-Baptiste a-t-il eu des doutes ? Pourquoi Jésus n’a-t-il pas été reconnu comme Messie par tous ? Ce qui le conduira à être traqué puis condamné comme un imposteur avec cette accusation : Toi qui n’es qu’un homme, tu te prends pour Dieu. Jn 10,33 Oui, pourquoi, les chefs religieux qui connaissaient si bien les Ecritures, n’ont-ils pas reconnu en Jésus le Messie alors qu’il accomplit les promesses ? En réfléchissant à cette question, je me suis dit qu’il pouvait y avoir deux raisons :
- La première, c’est qu’aux yeux des juifs, Jésus a eu une fin trop lamentable. C’est tellement difficile de pouvoir reconnaître le Messie dans celui qui finit aussi piteusement sur la croix avec, en plus, cette parole du Deutéronome qui dit que ceux qui finissent ainsi sont maudits.
- Mais il y a sans doute une 2° raison pour laquelle Jésus n’a pas été reconnu comme Messie. La 2° raison, c’est que si Jésus a accompli certains signes messianiques, il ne les a pas tous accomplis. Et c’est ce que je voudrais développer maintenant.
C’est incontestable, Jésus n’a pas accompli tous les signes messianiques annoncés dans la 1° lecture, je cite : car ce sera la fin des tyrans, l’extermination des moqueurs, et seront supprimés tous ceux qui s’empressent à mal faire. Au temps de Jésus, le tyran, c’était l’occupant romain et Jésus n’a rien fait pour l’exterminer, le supprimer, ce sont les verbes qu’Isaïe utilisait. D’où la difficulté à reconnaître en lui le Messie. Non seulement, il est mort lamentablement, mais en plus, il est mort sans avoir accompli la totalité du job !
Pour autant, on ne peut pas dire que sa venue n’ait pas marqué une victoire décisive contre le mal. En effet, pour vaincre le mal, il y a deux stratégies possibles.
1° stratégie : Supprimer tous les méchants. Méthode radicale que proposait le 1° Testament, mais qui pose une question de taille : qui en réchappera ? Parce que, nous en faisons, quotidiennement, la triste expérience, nous sommes tous, peu ou prou, complices du mal !
Faudra-t-il donc nous supprimer pour que le Mal soit éradiqué ? Non, Jésus n’est pas venu exterminer mais sauver. La plus grande victoire dont il rêve n’est pas la mort du méchant, mais sa conversion, son Salut.
C’est pour cela que Jésus mettra en œuvre une 2° stratégie : semer l’amour pour que l’accroissement de l’amour fasse reculer les frontières du mal. Implanter la lumière en croyant que la lumière fait reculer les ténèbres. Alors, c’est vrai, ça prend du temps, la lumière ne gagne que progressivement, les ténèbres ne disparaissent pas totalement, pas immédiatement. Mais cette méthode est tellement plus efficace ! Car exterminer les méchants, c’est faire place nette pour qu’une nouvelle génération de méchants puisse, un jour, prendre les commandes ; la nature humaine blessée par le péché originel rend ce scénario inéluctable.
Cette image de la lumière venant dans les ténèbres est une image absolument extraordinaire quand on y réfléchit bien. Il suffira d’une toute petite lumière pour mettre en échec les ténèbres. Dès qu’il y a la moindre petite lumière, les ténèbres commencent à être vaincues. Pour l’illustrer, je voudrais vous parler de ce tableau extraordinaire qui m’a été offert. La 1° fois que je l’ai vu, j’ai cru que c’était l’un de ces tableaux modernes qui, pour moi, n’ont pas beaucoup d’intérêt : il était tout noir ! Et je me suis dit que ce n’était pas possible que cette personne chez qui j’étais ait acheté un tel tableau, tout noir, ça ne lui ressemblait pas ! En fixant mon regard sur le tableau, j’ai vu qu’il y avait une toute petite tache de lumière en bas à gauche, comme une minuscule flamme de bougie. Et plus je fixais cette minuscule lumière, plus les détails du tableau apparaissaient. J’ai vu au départ une façade de maisons puis plusieurs, une place avec un arbre, une personne qui la traversait. En fixant la lumière, je devenais capable de voir ce que je ne pouvais pas voir quand je regardais l’ensemble si noir. Merveilleuse parabole d’autant plus que ce tableau m’a généreusement été offert.
Si nous ne regardons que les ténèbres du monde et Dieu sait si elles sont épaisses, nous allons broyer du noir, nous serons dans le noir avec des idées de plus en plus noires. A l’inverse, si nous choisissons de regarder la petite flamme d’amour que Dieu est venu allumer dans les ténèbres en envoyant son Fils Jésus, alors, peu à peu notre vie va s’éclairer. Certes, il restera des ténèbres, mais elles ne seront plus aussi épaisses et étouffantes. Comme le dit un proverbe chinois : plutôt que de maudire les ténèbres, il vaut mieux allumer une lumière. C’est la stratégie que Dieu a choisie en envoyant Jésus. Et, désormais, en tout point du monde où il y a un chrétien, la lumière de Jésus est présente et les ténèbres deviennent moins épaisses.
Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons que nos yeux soient guéris, eux qui sont si souvent incapables de voir toutes ces petites lumières d’espérance qui s’allument un peu partout dans le monde. Que nos cœurs soient aussi guéris pour que nous ne soyons pas de ceux qui préfèrent maudire sans cesse les ténèbres mais que nous soyons plutôt de ceux qui décident d’allumer une lumière aussi fragile soit-elle pour faire reculer les ténèbres.