Nous poursuivons la lecture du 2° livre des Rois qui nous raconte l’histoire du peuple des hébreux. Parfois, nous pourrions être tentés de penser que cette histoire ne nous concerne pas trop. Mais d’une part, il s’agit de l’histoire de nos pères, voire de nos grands-pères dans la foi. Donc à ce titre, nous pouvons nous y intéresser comme on s’intéresse à l’histoire de sa famille. Et puis cette histoire est riche d’enseignements. J’en retiens plus particulièrement deux.
- Le 1° enseignement, c’est que souvent, les lectures tirées de ce livre, nous parlent de faits pas très glorieux commis par des rois bien peu exemplaires. C’est une invitation à nous émerveiller devant le travail de la grâce qui arrive toujours à se frayer un chemin même dans les cœurs les plus tourmentés et à travers les événements les plus sombres.
- Le 2° enseignement, c’est que ce ne sont jamais les grands projets ambitieux des hommes qui apporteront la prospérité et la paix, mais la fidélité au Seigneur. Le texte que nous avons entendu en est une brillante illustration ! Le roi d’Assur a beau être puissant, il ne pourra rien contre Jérusalem quand le pays renouvelle sa fidélité au Seigneur et c’est bien ce qu’a fait le rois Ezéchias. Toutefois, nous l’avons entendu, ce n’est pas la puissance dérisoire d’Ezéchias qui permettra de l’emporter, mais celle du Seigneur qui agira mystérieusement par les mains de cet ange envoyé en son nom.
Ces deux enseignements, nous pouvons les garder, pour nous aujourd’hui : ne désespérons jamais car la grâce finit toujours par se frayer un chemin et c’est la fidélité au Seigneur qui apporte fécondité et prospérité.
Quant à l’Evangile, Jésus nous donne 2 consignes importantes pour que nous puissions accomplir de manière féconde notre mission de disciples-missionnaires.
La 1° consigne invite à la prudence : Ne donnez pas aux chiens ce qui est sacré. Ne jetez pas vos perles aux pourceaux. Jésus prêche la douceur, et il montre l’exemple, pour autant, à ses yeux, la naïveté n’est pas une qualité, surtout quand elle fait courir un risque au message de l’Evangile. Les perles du Royaume ne doivent pas être offertes sans discernement. Seul Dieu a totalement le pouvoir de bousculer les réticences de l’homme. Nous, nous ne sommes que ses messagers, notre témoignage va donc, en certaines circonstances, réclamer beaucoup de discernement.
Et Jésus nous donne deux critères pour reconnaître les moments où il faut savoir attendre patiemment et prudemment, ne pas aller trop vite pour témoigner, annoncer l’Evangile :
- 1° situation qui appelle la prudence : il ne faut pas présenter des perles si nous comprenons qu’elles risquent d’être piétinées, par mépris ou par inconscience.
- Et, 2° situation : il ne faut pas provoquer inutilement l’agressivité des hommes, même si c’est pour leur proposer l’Évangile.
La 2° consigne invite, au contraire, à un engagement sans réserve : Faites pour les autres tout ce que vous voulez qu’ils fassent pour vous. Si dans la précédente consigne, Jésus invitait à la retenue, cette Parole, par contre, elle doit être appliquée sans modération, sans restriction !
L’une de nos pauvretés qui complique à la fois notre vie et nos relations aux autres, c’est que nous ramenons tout à nos désirs. Nous risquons de nous prendre pour la mesure de tout, de prendre nos désirs, nos rêves comme absolus. De là viennent la plupart de nos tristesses : nous attendons tout des autres et nous leur en voulons de ne pas tout nous donner alors que, même s’ils le voulaient, ils en sont bien incapables !
Nous voudrions être reconnus, être estimés, être valorisés ; nous voudrions que nos souffrances soient comprises, que nos peines soient perçues et partagées ; que nos désirs soient perçus avant même que nous ne les exprimions. Bref, nous voudrions que notre vie occupe une place centrale dans la vie des autres. Et, finalement, nous finissons par tout mesurer à partir de nous : c’est ainsi que la joie finira par déserter nos cœurs, d’une part car ce que j’attends des autres, il n’y a que Dieu qui puisse me l’apporter ; et d’autre part parce qu’une vie autocentrée aboutit à un enfermement.
Jésus, en une phrase toute simple, inverse tout le mouvement, et d’un seul coup tous les verbes deviennent actifs : non pas être servi, mais servir, et donner sa vie ; non pas être porté, mais porter le fardeau du frère ; non pas être compris, mais comprendre ; non pas d’abord être rejoint, mais d’abord se mettre en route vers l’autre ; non pas être aimé à tout prix, mais aimer, en toute circonstance, quoi qu’il en coûte.
A travers cette énumération que je viens de faire, nous n’avons pas de mal à entendre la très belle prière de St François d’Assise : Là où il y a la haine, Que je mette l’amour ; Là où il y a l’offense, que je mette le pardon ; Là où il y a de la discorde, que je mette l’union … vous connaissez la suite et la prière se termine par ces paroles tellement en résonnance avec la consigne de Jésus : O Seigneur, que je ne cherche pas tant à être consolé qu’à consoler, à être compris qu’à comprendre, à être aimé qu’à aimer
C’est en respectant, en appliquant ces 2 consignes de Jésus que nous vivrons dans le monde notre mission de disciples-missionnaires. Mais, comme la prudence issue du discernement et le décentrement seront bien difficiles, nous demandons à Notre Dame de Laghet qu’elle nous obtienne la grâce de les vivre chaque jour un peu mieux.
Quelle justesse dans vos propos et tellement d’actualité pour tous les hommes et toutes les femmes d’aujourd’hui.
Cette homélie me rappelle celle d’un 8 décembre où le MOI D’ABORD était au menu principal et où nous étions tous mangés à la même sauce.
L’égo des humains se construit et monte si haut avant la chute ! C’est gratuitement et par folie d’amour que Jésus Lui s’abandonne et s’abaisse ainsi si bas pour nous relever, drôle de caprice de Dieu.