Enseignement en vue de la Toussaint : Comment devenir saint en une demi-heure ?

J’ai donné un enseignement aux ainés de la communauté de Tressaint et il m’a été demandé de le mettre sur mon blog … je le fais ! Comprenez bien le titre, je ne dis pas que vous serez saint en une demi-heure, je dis qu’il faut une demi-heure pour lire cet enseignement qui dit comment devenir saint !!! D’ailleurs vous comprendrez qu’il faut beaucoup moins d’une demi-heure pour devenir saint !

Introduction : Une fête qui dit notre vocation

A quoi sommes-nous appelés ? Chaque année, la fête de la Toussaint vient nous le redire : à devenir des saints ! J’espère que nous ne manquons pas d’ambition ! Il faut désirer la sainteté parce que la sainteté, c’est une vie chrétienne réussie. J’espère que vous souhaitez réussir votre vie chrétienne. Donc la sainteté, c’est pour tous, pas pour quelques personnes exceptionnelles, la sainteté, c’est pour tous : Tous saint ! Nous n’aurons pas tous une statue dans les églises, mais nous sommes tous appelés à devenir des saint, des « saints de la porte d’à côté » (n°7) comme aime le dire le pape François ! Il a développé cet appel à la sainteté dans un très beau texte « Gaudete et exsultate. » Je cite deux numéros :

  • N° 39 : « Aussi dans l’Église, tous, qu’ils appartiennent à la hiérarchie ou qu’ils soient régis par elle, sont appelés à la sainteté selon la parole de l’apôtre : « Oui, ce que Dieu veut c’est votre sanctification » (1 Th 4, 3 ; cf. Ep 1, 4) »
  • N° 42 : « Tous les fidèles du Christ sont donc invités et tenus à chercher et à atteindre la sainteté et la perfection propres à leur état. »

Sur ce sujet, Marthe a dit des choses très importantes : N’oublions pas que nous n’avons été faits chrétiens que pour devenir des saints. C’est pourquoi nous devons travailler sans trêve, sans relâchement à nous perfectionner dans le service et l’amour de Dieu. Pour y parvenir, elle ne demande pas qu’on mette un caillou dans sa chaussure pour souffrir un peu plus, non ! Se perfectionner dans le service et l’amour … perfection, c’est proche de parfait, il s’agit donc de se laisser parfaire dans le service et l’amour de Dieu … et nous allons le voir, c’est l’Esprit-Saint qui nous parfait, il est l’agent de notre sanctification. Marthe dira encore : « Il faut demander la sainteté pas pour dans 10 ans, pas dans un an, ni pour demain. Tout de suite, maintenant. » 4/03/1930. 

1. « Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint. »

Mais ce n’est ni le pape, ni Marthe qui sont le plus insistants dans leur appel à la sainteté, c’est le Seigneur lui-même : « Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint. » Lv 19. Il a été relayé par Jésus lui-même, mais de manière particulière, puisque Jésus transformera un peu l’appel en disant : soyez parfaits et nous allons chercher à bien comprendre ce que ça veut dire parce que la sainteté n’est pas la perfection, devenir saint, ce n’est pas ne plus faire de péché ! Je vais développer un peu cela !

1.1 La sainteté n’est pas la perfection

         Nous pensons être disqualifiés dans l’appel à la sainteté parce que nous voyons bien tout ce qui ne va pas dans notre vie Moi, devenir saint, avec ce que je suis aujourd’hui, avec ce que j’en bave pour prier, pour aimer, pour pardonner, avec telle ou telle médiocrité qui semble me coller à la peau … Moi ? Non ce n’est pas possible ! Cette réaction montre que ce que nous pensons n’est pas ajusté. Et je crois que l’une des plus grandes ruses du diable c’est d’entretenir cette confusion entre sainteté et perfection. Mais nous le savons bien la perfection n’est pas de ce monde, sauf pour Marie, par contre la sainteté est bien pour ce monde !

         La preuve que la sainteté n’a rien à voir avec la perfection, c’est que les saints se confessaient ! Le curé d’Ars, si on l’avait laisser faire, se serait confessé tous les jours ! Il faut dire que plus on approche du soleil et plus la moindre tache devient insupportable. Le curé d’Ars expliquait justement que lorsqu’il venait de commettre un péché, il courait devant le Saint-Sacrement et disait : « Voilà, mon Dieu, je viens de vous jouer un petit tour à ma façon ! » Et il me semble que la sainteté réside précisément dans cette démarche. Il ne s’agit pas de chercher à devenir « impeccable », c’est-à-dire au sens étymologique « sans péché », ce n’est pas possible … seule la Vierge Marie a été préservée du péché. Mais il s’agit, quand j’ai péché de m’en remettre le plus vite possible à la miséricorde du Seigneur. Je ne dis pas qu’il faut aller se confesser après chaque péché, mais qu’il faut vite, en pensée, se remettre entre les mains du Seigneur.

         Vraiment, il est important que nous comprenions cela. Croyez-vous que Jésus aurait choisi Pierre comme chef de l’Eglise s’il avait voulu quelqu’un d’impeccable à la tête de l’Eglise ? Le fait de nous reconnaître pécheurs nous fera même avancer plus vite sur le chemin de la saintété. Evidemment, ce n’est pas le péché qui va nous faire devenir saint, mais l’humilité dans laquelle il nous oblige à nous tenir. Cf. les vases en Chine qui sont recollés avec de l’or, plus ils sont recollés et plus ils deviennent précieux.

1.2 Alors comment comprendre la parole de Jésus invitant à la perfection ?

Je vous ai dit que Jésus relayait l’appel à la sainteté, mais de manière particulière puisqu’il dit en Mt 5,48 : « Vous donc, vous serez parfaits, comme votre Père céleste est parfait. » Comment peut-on comprendre cet appel à devenir parfaits après tout ce que je viens de dire sur le risque de confondre sainteté et perfection ? 

J’avais entendu un très bel enseignement du Cardinal Barbarin sur cette phrase qui m’a vraiment ouvert une porte de compréhension car je vous avoue que, jusque-là, j’étais bien perplexe ! Dans cet enseignement, le cardinal expliquait que, en français, il y a 3 verbes sur lesquels nous pouvons jouer : faire, refaire et parfaire. Le Seigneur nous a faits, c’est la Création, le Seigneur nous a refaits, c’est la Rédemption et le Seigneur veut nous parfaire, c’est la sanctification.

Ainsi donc dans l’invitation de Jésus, il ne s’agit pas de devenir parfaits par nos efforts mais de nous laisser parfaire. Alors, immédiatement une question se pose : qui va nous parfaire ? Qui va nous aider à avancer sur le chemin de la sainteté ? Le Saint-Esprit, bien sûr ! La création, c’est l’œuvre du Père, la Rédemption, c’est l’œuvre du Fils et la sanctification, c’est l’œuvre du Saint-Esprit. Ils se sont un peu spécialisés dans la Trinité ! Il s’appelle l’Esprit-Saint et ce nom est, en fait, une contraction de sa mission. On l’appelle ainsi parce qu’il est l’Esprit qui fait les saints ! Et comment va-t-il faire de nous des saints, c’est ce que nous allons voir maintenant.

2. Comment le Saint-Esprit va nous sanctifier ?

La théologie traditionnelle de l’Eglise explicite la mission de sanctification du Saint-Esprit en parlant des 7 dons du Saint Esprit qui nous sont précisément donnés pour notre sanctification, pour nous faire grandir dans notre relation à Dieu et aux autres. Le St Esprit est très bien élevé, quand il est invité, il vient, mais attention, il ne vient que s’il se sent vraiment invité cf. St Bonaventure : « l’Esprit-Saint vient là où il est aimé, là où il est invité, là où il est attendu. » 

Donc comment devenir des saints ? Rien de plus simple : en laissant le Saint Esprit agir en nous, en lui demandant régulièrement de souffler sur les cendres de notre médiocrité qui recouvrent le feu qu’il est venu allumer, c’est ainsi qu’il pourra déployer ses 7 dons que je voudrais développer maintenant rapidement.

2.1 Le don de crainte

Ce don de crainte, il ne nous est pas donné pour que nous ayons peur de Dieu, c’est l’inverse ! Le don de crainte, c’est l’Esprit-Saint qui met en nous la peur de vivre sans Dieu : cf. prière de la messe : « que jamais, je ne sois séparé de toi ! » ou encore cette oraison : « sans toi, Seigneur notre vie tombe en ruine. »

Le don de crainte, c’est donc le don par lequel le Saint Esprit nous donne de craindre tout ce qui pourrait nous éloigner de Jésus, de nous couper de lui. Le don de crainte nous apprend à nous méfier de nous et à nous confier en Dieu. Cf. prière de St Nicolas de Fluh : « Seigneur, éloigne de moi tout ce qui m’éloigne de Toi. Seigneur, rapproche de moi tout ce qui me rapprochera de Toi. Seigneur, détache-moi de moi-même pour que je m’attache à toi. »  Donc si nous ne nous éloignons plus du Seigneur, c’est sûr nous grandirons en sainteté puisque LE SAINT, c’est lui ! Il faut donc rester branché sur lui et cela c’est le Saint-Esprit qui va le permettre par le don de crainte.

2.2 Le don d’affection filiale ou de piété

Le mot de piété est un peu vieillot, doucereux, alors on a pris l’habitude de le compléter voire de le remplacer par affection filiale. Dans cette dénomination, il y a le mot filial, c’est à dire que c’est le don qui nous fait regarder Dieu comme Père et cela n’est pas rien. L’Esprit-Saint vient graver en moi le vrai visage de Dieu qui est celui du Père et il veut le graver de manière définitive. Que Dieu soit Père, on le sait intellectuellement, on le lit dans l’Evangile par exemple dans la parabole du père et des deux fils. Mais il y a tout un tas de circonstances qui font que je peux me mettre à douter que Dieu est Père. 

         Il y a d’abord ce qui m’arrive dans ma vie, les événements perturbants, dramatiques. On entend dire : « mais qu’est-ce que j’ai fait au Bon Dieu ? » Sous-entendu, c’est Lui qui est en train de me faire payer quelque chose de mal que j’aurais fait. Au fond, j’habille le visage de Dieu en fonction des évènements qui traversent ma vie. Si je suis heureux, il est Père, si je ne suis plus heureux, il n’est plus Père. Jésus, même, au plus profond de sa souffrance, continue à regarder Dieu comme un Père, à l’appeler Père : « Père entre tes mains, je remets mon esprit. » Quand l’Esprit-Saint me fait ce don d’affection filiale, il me fait le cadeau d’une image constante de Dieu gravée dans mon cœur : Dieu sera toujours Père, je serai toujours son enfant quelles que soient les circonstances de ma vie. Mais il n’y a pas que les tuiles qui peuvent me faire douter que Dieu est Père, il y a aussi mon péché : avec ce que j’ai fait comment Dieu pourrait-il m’aimer encore ? Par le don d’affection filiale, je reçois cette certitude de foi que Dieu reste mon Père et que moi je reste son enfant quoique je fasse. Moi je peux me détourner, mais lui, restera toujours fidèle. Et alors, si je m’appuie sur sa fidélité, je grandis en sainteté.

2.3 Le don de force

Par le don de force, l’Esprit-Saint va nous aider à mettre en œuvre les paroles de Jésus dans nos vies. Tout d’abord l’Esprit-Saint fait remonter à notre mémoire, mais pas la mémoire intellectuelle qui devient défaillante en vieillissant, à la mémoire du cœur, les paroles de Jésus. Cela Jésus nous l’avait annoncé : « L’Esprit-Saint vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit. » Jn 14,26 C’est-à-dire que par le don de force, nous devenons de véritables témoins de Jésus. Les témoins, ce ne sont pas ceux qui ont toujours de belles paroles dans la bouche, mais ceux qui agissent, ceux dont la vie est de plus en plus comme une incarnation de l’Evangile. Le curé d’Ars aimait dire : « là où les saints passent, Dieu passe avec eux. » La sainteté nous donne une vie en si grande proximité avec l’Evangile que ceux qui nous entourent en sont questionnés, encouragés. Le Saint-Esprit, par le don de la force fait de nous de vrais témoins et c’est bien ça un saint.

2.4 Le don de conseil 

La vie est compliquée, il est souvent difficile de savoir ce qu’il faut dire et ce qu’il faut faire. Dans cette perspective le don de conseil, appelé aussi don de discernement est important. Le Saint Esprit, par ce don, va nous aider à faire les bons choix qui ne nous éloigneront pas du Seigneur, les bons choix qui nous permettront d’être des témoins de plus en plus lumineux, de faire en permanence la volonté de Dieu. J’insiste pour dire que ça ne concerne pas que les grands choix de notre vie. Vous avez sûrement imploré l’Esprit-Saint pour demander ce don de conseil pour prendre la décision d’entrer au Foyer. Mais le Saint-Esprit veut éclairer quotidiennement nos chemins : on lance tel appel pour un service communautaire, qu’est-ce que je fais ? Devant deux choix qui se présentent, quel est celui qui me permet le mieux de remplir mon devoir d’état ? … C’est la très belle histoire de Sr Bakhita qui répond à son évêque qui lui demande ce qu’elle fait au couvent, ce qu’est son activité, elle lui répond : la même chose que vous Monseigneur ! C’est-à-dire que j’essaie de faire la volonté du Seigneur ! Elle répond cela alors qu’elle ne fait presque plus rien … mais en permanence, elle est accordée au Seigneur.

2.5 et 6 Les dons de science et d’intelligence

Ils vont ensemble car ils sont les deux canaux par lesquels Dieu nous parle, mais je les traite quand même successivement.

2.5 Le don de science

Dieu nous parle d’abord par tout ce qui existe autour de nous. La nature est le grand jardin que Dieu nous confie et qui est rempli de merveilles, c’est magnifique. Le don de science nous est communiqué pour qu’à travers tout ce que nous voyons, nous puissions retrouver la présence et la bonté de Dieu. Et lorsqu’on on retrouve ainsi cette présence de Dieu en toute chose, on développe cette belle attitude qu’est l’admiration qui vient combattre notre sale habitude de trop souvent nous plaindre. L’admiration est toujours accompagnée d’une joie profonde, on se laisse transporter. C’est cela la véritable science. Je viens de parler de l’admiration devant la nature, mais il faudrait, toujours dans ce 1° canal en dire autant de l’admiration devant les êtres humains en tant que tels et aussi ce que les hommes sont capables de faire. Par ce don de science, nous devenons capables de devenir un peu comme le ravi de la crèche qui est toujours en train de s’exclamer que c’est beau, qui ne voit que le beau, qui ne retient que le beau et qui oublie au plus vite le reste ! Cette attitude me fait grandir en sainteté.

3.6 Le don d’intelligence

Le don d’intelligence c’est le don par lequel j’entre dans la profondeur des paroles de Jésus et plus généralement toutes les paroles de l’Ecriture. Par ce don, le Saint-Esprit fait avec moi le travail que Jésus a fait avec les disciples d’Emmaüs, quand il leur ouvrait le cœur à l’intelligence des Ecritures. 

C’est exactement ce que veut faire l’Esprit-Saint pour nous par le don d’intelligence, il nous rendra l’Écriture savoureuse pour qu’elle nous mette en communion avec le Seigneur. Même si je ne retiens pas tout ce que je lis, même si je ne comprends encore pas toujours tout ce que je lis, je goûte la Parole. J’aime prier les psaumes. Alors c’est sûr qu’avec les Ecritures comme nourriture principale et « nourriture nourrissante » je ne peux que grandir en sainteté !

3.7 Le don de sagesse 

C’est le dernier don, le plus désirable puisqu’il va harmoniser nos pensées et nos actions avec le Seigneur. Tout est au diapason de Dieu dans notre vie, c’est ce que l’on voit dans la vie des saints qui ont reçu le label d’une sainteté reconnue, mais c’est aussi ce que l’on voit dans la vie de tant de personnes qui nous ont marquées. Ce dernier don est le don le plus désirable parce que, par ce don, L’Esprit-Saint vient totalement me parfaire. Donc, par ce don de sagesse, il fait de nous des saints. 

Conclusion : Les dons et le donateur des dons

Pour devenir des saints, nous avons donc besoin des dons du Saint-Esprit qui vont nous parfaire, nous sanctifier. Mais vous comprendrez facilement que si les dons sont désirables, avoir avec nous le donateur des dons, c’est encore plus désirable ! Pour vous le faire comprendre et ça sera ma conclusion, j’aimerais vous raconter cette histoire pleine d’humour, une histoire inventée mais qui nous permet de bien comprendre cela !

« 3 femmes sont en extase devant la vitrine d’une bijouterie. La 1° dit : si un bon génie venait à moi pour me dire qu’il pourrait réaliser un vœu, je lui demanderai cette rivière de diamants. La 2° dit : et si le bon génie me demandait la même chose, moi je demanderais cette bague avec toutes ces pierres précieuses. Elles se tournent vers la 3° en lui disant : toi, inutile de te demander, vu comme tu aimes les montres, tu demanderais forcément cette montre avec son bracelet si précieux ! Et la 3° leur répond : pas du tout, si le bon génie me demandait un vœu, je lui demanderais de pouvoir épouser le bijoutier ! »

Vous comprenez pourquoi j’ai raconté cette histoire ! Il ne faut pas nous contenter de demander les dons, il faut demander le donateur des dons ! 

Cette publication a un commentaire

  1. Jean Marc Franchellin

    Merci de ce rappel cher Riger à devenir saint. Nous (je) suis en chemin, et sur ce chemin vous êtes un peu mon code de la route !
    En communion de prière avec tous les saints d’hier et d’aujourd’hui.

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