Homélie 4° dimanche Avent 23/12/2018

« Si j’avais été prêtre, j’aurais appris l’hébreu et le grec comme cela j’aurais connu le vrai texte des Écritures dicté par le Saint Esprit. » C’est Thérèse de Lisieux qui a dit cela. Je suis prêtre, hélas, je ne connais pas l’hébreu et très peu le grec, mais suffisamment quand même pour le lire et comprendre à peu près de quoi ça parle. Il m’arrive de temps en temps, quand j’ai un peu plus de temps, de relire l’évangile qui est proposé pour le dimanche dans le texte grec et, ayant repéré un point qui me semble éclairant, d’aller chercher dans mes cours du séminaire pour voir si notre excellent prof d’Écriture Sainte nous en avait parlé. C’est ce que j’ai fait pour cet Évangile si bien connu de la Visitation et c’est une bonne méthode pour nous renouveler, pour ne pas redire toujours la même chose sur ces textes qui reviennent si régulièrement. Je voudrais vous partager deux points de ces découvertes.

1/ C’est l’attitude de Marie qui, nous dit l’Évangile, se met en route « rapidement ». Des choses, moi aussi j’en fais très rapidement, souvent même bien trop rapidement ! C’est bien trop rapidement que je prends des nouvelles de personnes en difficulté ; bien trop rapidement que je salue ceux que je croise ; bien trop rapidement que je lis mon courrier ; et même bien trop rapidement que je prie. Il ne faudrait surtout pas que j’invoque l’attitude de Marie pour me donner bonne conscience car ce n’est pas du tout le sens du mot qui est utilisé dans le texte. Le terme grec « meta spoudès » signifie, certes, rapidement mais dans le sens de « avec ardeur », ou « avec empressement », finalement la meilleure traduction serait peut-être « bien volontiers ». C’est, bien volontiers, que Marie se met en route pour aller visiter sa cousine Elisabeth. Alors, évidemment, ça change complètement.

En ce dernier dimanche de l’Avant, je vous propose que nous demandions, pour chacun d’entre nous, ce cadeau de Noël : la grâce de faire ce que nous avons à faire « meta spoudès » c’est à dire bien volontiers. Comme la vie serait belle, pour nous, mais aussi pour tous ceux qui nous entourent, si nous nous mettions à tout faire « meta spoudès » bien volontiers. Quand, demain, le réveil sonnera, pensez-y ! Levez-vous « meta spoudès » c’est à dire, bien volontiers. Quand le téléphone sonnera, répondez « meta spoudès ». Quand l’heure de la messe approchera, partez « meta spoudès » et peut-être même lorsque votre belle-mère vous sollicitera, répondez « meta spoudès ». Vierge Marie, par ton intercession, nous demandons vraimnt que nous soit fait ce cadeau si merveilleux de pouvoir faire, comme toi, toute chose « meta spoudès ».

Et pour nous aider à y parvenir, je voudrais vous partager un conseil que le cardinal Barbarin aime donner. Il aime parler de la manière dont un chrétien doit commencer sa journée. Au moment où le réveil sonne, il propose évidemment qu’on se lève tout de suite, il ne le dit pas comme ça, mais ça signifie « meta spoudès » et que le premier geste que nous fassions soit un beau signe de croix. Au lieu de râler sur la nuit trop courte, de penser déjà aux problèmes de la journée, habillons-nous immédiatement de l’amour du Seigneur qui nous couvre de haut en bas et de gauche à droite, c’est à dire entièrement. Ce n’est pas compliqué à faire, encore faut-il y penser, mais je suis sûr que si nous démarrons ainsi, nous parviendrons, dans le reste de la journée, à mieux faire les choses « meta spoudès ».

2/ Le 2° point que je voudrais vous partager, il est très beau et plein d’humour. Le texte nous dit que lorsque Marie entre dans la maison de sa cousine, en entendant la salutation qu’elle adresse, Jean-Baptiste, l’enfant qu’elle porte en elle se met à tressaillir. Le verbe grec qui est utilisé ici, je vous le dis car vous le connaissez sûrement, il s’agit du verbe « sirtakô » c’est ce qui a donné le sirtaki, vous savez cette merveilleuse danse grecque. Quand Marie entre dans la maison et se met à parler, Jean-Baptiste, dans le sein d’Élisabeth se met à danser le sirtaki. Qu’est-ce qui provoque ce tressaillement si plein d’allégresse ? Tout simplement le fait que Marie est emplie de la présence de Jésus qui se développe en son sein. Marie s’est laissée visiter par le Saint Esprit, Jésus a pris en corps en elle et du coup, là où elle passe, on se met à tressaillir, à danser de joie. Vous connaissez peut-être cet épisode de l’Ancien Testament (2 S 6) où l’Arche d’Alliance revient à Jérusalem ; l’Arche d’Alliance, pour les juifs, c’était la présence même de Dieu, cette présence qui les avait accompagnés tout au long de leur marche dans le désert. Eh bien, quand l’Arche revient à Jérusalem, David est fou de joie, il se met à danser en étant d’ailleurs peu vêtu. Ce qui mettra sa femme dans une colère terrible, elle trouve que son mari de roi s’est ridiculisé aux yeux de son peuple. Mais, David, homme de foi, ne pouvait faire autrement, c’était plus fort que lui, Dieu revenait habiter au cœur de son peuple, il ne pouvait faire autrement que danser de joie. Marie est souvent appelée la nouvelle Arche d’Alliance, car c’est elle qui porte la présence du Seigneur et du coup, sur son passage, il se passe la même chose que sur le passage de l’Arche, on danse de joie.

Mes amis, nous avons déjà accueilli la présence du Seigneur au milieu de nous dans cette assemblée, Jésus nous dit : quand deux ou trois sont réunis en mon nom, je suis là au milieu d’eux. En écoutant la Parole de Dieu, nous avons encore accueilli une autre manière pour le Seigneur, de se rendre présent. Dans quelques instants, nous allons communier et nous accueillerons la manière la plus accomplie pour le Seigneur de se rendre présent. Mais j’insiste pour dire que, même si nous ne pouvons pas communier, nous aurons quand même accueillis les deux premiers modes de présence du Seigneur. Accueillant cette présence du Seigneur, à la sortie, de cette messe, nous deviendrons, nous aussi, des Arches d’Alliance. Oh certes, pas aussi lumineuses que Marie pouvait l’être car notre péché voile assez vite la présence que nous avons reçue. C’est d’ailleurs pour cela qu’il nous faut revenir à la messe le plus vite possible, pour que cette présence ne finisse pas par être impossible à voir. Devenir des Arches d’Alliance, voilà le moyen le plus sûr, de semer la joie autour de nous. A Noël, nous allons chercher comment faire plaisir à ceux qui nous entourent et, pour cela, nous offrons des cadeaux. Mais nous sentons bien que la joie procurée par le cadeau offert est une joie éphémère. Si nous voulons vraiment semer la joie autour de nous, devenons des Arches d’Alliance et nous serons étonnés de voir que ça danse le sirtaki tout autour de nous, au moins dans les cœurs ! Mais peut-être faut-il d’abord que nous demandions au Seigneur, en cette année de la foi, qu’il nous fasse la grâce de croire en sa présence réelle au cœur de la messe pour que nous soyons les premiers à danser le sirtaki.

Oui, Seigneur, nous te le demandons, fais-nous la grâce de pouvoir faire toutes choses « meta spoudès », fais-nous la grâce de croire en ta présence au cœur de cette messe et d’être porteurs de cette présence, sans trop la voiler, pour que, nous-mêmes, et tous ceux que nous rencontrerons se mettent, au moins dans leur cœur, à danser le sirtaki.

Cet article a 4 commentaires

  1. GRAFF Pierre

    Felicitations !

  2. Patrick

    C’est « meta spoudès » que je reviendrai sur le blog même si la réception de l’homélie par mail était un rappel salutaire. Belles fêtes de Noël.
    D’un inconnu, du moins inconnu de moi  » Que ce chemin vers Noël soit l’attente impatiente d’un événement inouï: la naissance de Jésus en nous! » Bon sirtaki

  3. SC

    Bonjour Père Roger
    bravo pour cette belle initiative.
    Cela nous permettra de nous nourrir davantage.
    Je vous souhaite un joyeux Noël.

    Cordialement

  4. Teti Rachel

    Merci Père Roger pour avoir ressorti la source du tressaillement: le sirtaki.
    « Sois bénis Seigneur pour les dons que tu donnes à chacun. Je te rends grâce pour la danse prière qui m’habite et pour la nouvelle confirmation que tu me donnes par la prédication du Père Roger.
    Bénis-le Seigneur dans son ministère, qui parle à tout notre Être, Amen

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