10 février : samedi 5° semaine temps ordinaire : le veau d’or est de retour ! La compassion de Jésus

Cette 1° lecture fait suite à celle que nous avons entendue hier, je fais un bref rappel : un prophète venu de Silo a annoncé à Jéroboam qu’il allait succéder à Salomon mais qu’il ne règnerait plus sur le pays entier puisqu’il y aurait une division de ce pays : 10 tribus au Nord et une autre au Sud avec, en plus la tribu de Lévi qui continuerait son service au Temple et c’est sur le Nord que Jéroboam devra régner. Cette annonce aurait dû plonger Jéroboam dans une profonde tristesse : comment accueillir sereinement cette nouvelle d’une partition du pays que David avait eu tant de mal à unifier ? Mais au lieu de pleurer et de supplier le Seigneur que tout cela n’arrive pas, Jéroboam va commencer à réfléchir à la stratégie de gouvernement qu’il développera, une fois parvenu sur le trône. Et la question qui le hantait était la suivante : les gens du Nord du pays ne vont-ils pas être tentés de se tourner encore vers Jérusalem et son Temple ? Et, ça Jéroboam ne le veut pas, il y a réfléchi, ce scénario risquerait, à terme, de lui faire perdre le pouvoir. Il faut donc que son Royaume puisse se montrer, du point de vue de la religion, auto-suffisant. C’est ainsi qu’il a élaboré cette stratégie qu’on peut littéralement qualifier de diabolique : il va installer un nouveau culte pour son Royaume, tellement attirant que plus personne n’aura l’envie d’aller à Jérusalem.

Vous comprenez facilement pourquoi j’ai qualifié de diabolique le scénario qu’il a élaboré et dont l’accomplissement nous a été raconté dans la 1° lecture. C’est diabolique parce que c’est le retour au fameux et terrible veau d’or et c’est même pire puisqu’il n’y en aura pas un seul veau d’or mais autant qu’il en fallait pour que chaque sanctuaire du pays soit bien pourvu ! Et, pour les faire fonctionner, Jéroboam va instituer un nouveau clergé composé de personnes n’appartenant pas à la tribu de Lévi qui avait été choisie pour remplir cette mission et ces nouveaux prêtres seront choisis sans discernement, la lecture disait qu’il choisissait n’importe qui ! On pressent bien que c’est un très mauvais départ qui est pris pour ce Royaume du Nord. Après ce petit cours d’histoire, revenons à l’épisode du veau d’or parce qu’il est riche d’enseignements pour nous.

Le veau d’or, nous savons qu’il avait déjà fait une apparition, si j’ose cette expression, au moment où Moïse était sur le Sinaï en train de s’entretenir avec Dieu qui lui donnait les 10 Paroles de vie. La Bible nous dit que, comme Moïse tardait à descendre, le peuple, sous l’impulsion d’Aaron, s’était fabriqué ce veau en or avec tous les bijoux que chacun avait pu déposer pour les fondre. Cette représentation, elle est à pleurer ! Un veau d’or pour représenter Dieu, oui, c’est à pleurer parce qu’on choisit un veau et que, en plus, il est en or. Je développe chaque élément.

  • Depuis l’Exode, dans nos Bibles, on a pris l’habitude de parler de veau, mais le terme hébreu évoque plutôt un taurillon. Voilà la terrible image que le peuple des hébreux, de manière assez spontanée, se fait de de son Dieu ! C’était l’image au moment de l’Exode et c’est l’image qui revient des siècles après. Mais c’est terrible car la caractéristique du taurillon, c’est sa puissance, mais une puissance dévastatrice. Lâcher un jeune taureau sur un marché et vous allez voir les dégâts ! Eh bien, le peuple a conscience de la puissance de Dieu, mais, pour eux, cette puissance se manifeste de manière arbitraire et destructrice. Alors, ils se font, à nouveau une statue d’un taurillon pour chercher à amadouer Dieu pour que sa puissance soit bénéfique pour eux et dévastatrice pour les autres. Il faudra du temps, il faudra que Jésus vienne pour révéler que cette toute-puissance est une toute-puissance d’amour ! Dieu n’est pas un taurillon fou mais un Père qui aime comme une mère !
  • Et, en plus, si cette représentation est faite en or, ce n’est pas pour dire que la présence de Dieu à leurs côtés serait précieuse ! Non, posséder de l’or, c’est le privilège de certains riches. Voilà comment ils voient Dieu, ils le voient riche, ils voudraient le posséder ! Là encore, il faudra du temps pour comprendre que Dieu veut se faire pauvre pour mieux aimer les pauvres et que nul ne pourra jamais mettre la main sur lui.

On comprend pourquoi, dans l’une des 10 Paroles de vie, le Seigneur va interdire aux hommes de se faire des images qui le représentent, elles seraient tellement loin de la réalité et même parfois contraire à la réalité de ce qu’il est. Pour avoir une représentation ajustée de Dieu, il faudra attendre Jésus qui sera la parfaite Image du Père et qui pourra donc dire : Qui me voit, voit le Père. Jn14,9.

La conclusion de l’épisode est terrible, voilà ce que disait le texte : Tout cela fit tomber dans le péché la maison de Jéroboam, entraîna sa ruine et provoqua sa disparition de la surface de la terre. De fait, 200 ans après, ce Royaume sera rayé de la carte, englouti par l’Assyrie, grande puissance de l’époque. Hélas, le Royaume du Sud ne saura pas en tirer les leçons qui s’imposaient puisque moins de 200 ans après la chute du Royaume du Nord, il tombera, lui aussi. Toute cette histoire illustre magnifiquement le grand principe énoncé par Dieu dans le livre d’Isaïe : Si vous ne tenez pas à moi, vous ne tiendrez pas ! Is 7,9 Voilà qui doit nous faire réfléchir, nous aussi, non plus tellement pour le gouvernement de nos pays laïcs mais pour le gouvernement de nos propres vies, nous sommes prévenus : Si vous ne tenez pas à moi, dit le Seigneur, vous ne tiendrez pas !

Quant à l’Evangile, il nous montre, une nouvelle fois, Jésus envahi de compassion. Ayant bien commenté la 1° lecture, je ne ferai que 2 remarques sur cet Evangile.

  • 1° remarque, comme toujours, c’est son regard, son attention qui provoquent en Jésus la compassion. J’ai de la compassion pour cette foule, car depuis trois jours déjà ils restent auprès de moi, et n’ont rien à manger. Sommes-nous suffisamment attentifs aux autres pour entrer dans la compassion ? Notre regard ne provoque-t-il pas plus souvent des jugements que de la compassion ?
  • 2° remarque, on voit l’écart qu’il peut y avoir entre le cœur de Jésus et celui des disciples. Jésus leur pose une question, comme pour vérifier si, eux aussi, sont entrés dans la compassion. Je ne pense pas que Jésus les mette à l’épreuve en leur demandant de trouver une solution, il veut juste les entendre dire que, eux aussi, s’inquiètent pour ces gens. Or ce n’est pas ce qu’ils disent, ils disent juste que, pour eux, il n’y a pas de solution alors que la solution est à côté d’eux, c’est Jésus !

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons la grâce d’avoir un regard et un cœur ajusté au regard et au cœur de Jésus pour être toujours dans la compassion. Demandons-lui aussi la grâce de pouvoir tenir au Seigneur car, lui seul, peut nous faire tenir. Qu’elle nous aide donc à lâcher ce à quoi nous tenons trop et qui ne nous fait pas tenir !

Laisser un commentaire