2 mars : jeudi 1° semaine de carême. Demandez et on vous donnera … ça reste à voir !

« Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira ! » Il en a de bonnes Jésus ! Tous ceux qui font de l’écoute dans les retraites savent que l’une des grandes douleurs dans la vie de foi, l’un des éléments qui vient le plus attaquer la foi, ce sont précisément toutes les prières qui n’ont pas été exaucées. Et même ceux qui ne font pas d’écoute le savent parce que parmi les membres de leurs familles, de leurs amis certains leur ont crié leur souffrance : pourquoi Dieu n’a-t-il pas répondu à mes prières ?

Bien sûr, je ne parle pas de ces prières qu’on peut faire pour obtenir du beau temps le jour d’un mariage, certes, c’est légitime, mais le Bon Dieu refuse de se laisser enfermer dans le poste de pilotage d’une station météo céleste parce qu’il a mieux à faire. Mais alors, justement, s’il a mieux à faire, pourquoi n’a-t-il pas guéri cette maman atteinte d’un cancer pour laquelle une chaine de prière s’était constituée et qui a fini par mourir, laissant toute une famille dans un profond désarroi. Je ne veux pas passer en revue toutes les prières non-exaucées et qui demandaient pourtant des biens très importants. Il y a 25 ans paraissait, sur ce sujet, un livre au titre évocateur : Dieu mis en examen ! Je ne l’ai pas lu, mais le titre m’avait frappé parce que l’un des obstacles majeurs à la foi, c’est bien la question du mal et de manière conséquente toutes les prières non-exaucées demandant au Seigneur de nous épargner ou d’épargner ceux que nous aimons d’un mal destructeur. Puisqu’il est le Dieu de la vie, il devrait s’en occuper !

Peut-être qu’une des explications sur ce malentendu vient du fait que nous avons une écoute brouillée de ce texte d’Evangile que je viens de lire. Souvent, quand nous entendons : « demandez, on vous donnera » nous, nous entendons et on vous donnera ce que vous avez demandé ! Quand nous entendons : « cherchez, vous trouverez » nous, nous entendons et vous trouverez ce que vous cherchiez ! Quand nous entendons : « frappez, on vous ouvrira » nous, nous entendons et la porte à laquelle vous aviez frappé s’ouvrira ! Ce n’est pas ce que l’Evangile dit. Et Jésus avait bien imaginé que nous risquions de mal comprendre puisqu’il répète deux fois : « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira ! »

Ce que Jésus affirme, c’est qu’il n’y a pas de prière qui se perdra dans le néant. Maintenant, la manière dont la prière sera exaucée, ça nous dépasse complètement. Pour autant, je n’aime pas dire que Dieu sait mieux que nous ce qui est bon parce que si une maman ou un papa ou encore pire un enfant meure alors qu’on a prié pour leur guérison, ça ne veut pas dire que, pour Dieu, leur mort serait préférable ! Affirmer cela c’est éloigner un peu plus de la foi ceux qui n’arrivent déjà pas à croire ou semer le doute dans le cœur de ceux qui croient déjà. Il y a des moments où nous devons avoir le courage de dire que nous ne comprenons pas mais que dans un acte de foi volontaire, nous voulons rester dans la confiance et croire que Dieu, parce qu’il est Dieu, ne peut pas se désintéresser de nous dans le drame que nous vivons. Nous voulons croire qu’il saura trouver les chemins par lesquels il nous visitera et nous restaurera.

Revenons aux paroles de Jésus. « Demandez, on vous donnera ; cherchez, vous trouverez ; frappez, on vous ouvrira. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira ! » La traduction n’est pas excellente et la formulation non plus ! Il aurait été plus juste et plus élégant de dire : « Demandez, il vous sera donné ; cherchez, vous trouverez ; frappez, il vous sera ouvert. En effet, quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; à qui frappe, on ouvrira ! » Vous avez remarqué que ma reformulation supprime ces « on » qui ne sont pas très élégants. Ma mère, quand nous étions enfants et qu’elle corrigeait nos rédactions ne laissait passer aucun « on » avec une formule bien à elle que je n’ose citer dans cette chapelle ! Mais il nous fallait transformer la phrase pour supprimer les « on ».

C’est ce que j’ai fait dans ma reformulation en mémoire de ma chère maman et j’ai donc mis un passif qui, en plus, est plus ajusté au sens biblique. Dans la Bible, quand il y a un verbe au passif et qu’il n’y a pas de complément d’agent, on appelle cette tournure « un passif divin » cela signifie que c’est Dieu qui est l’acteur principal, même s’il n’est pas nommé. Alors, maintenant que nous avons compris que c’est Dieu qui ouvre et que, surtout, c’est Dieu qui donne, cherchons à comprendre ce que Dieu peut donner à tout coup à ceux qui se tournent vers lui pour lui crier leur détresse ? Qu’est-ce qu’ils vont pouvoir trouver ceux qui cherchent avec détermination ? Quelle porte s’ouvrira pour ceux qui frappent sans se lasser ? 

Eh bien, Dieu ne pourra pas faire plus, mais il ne veut pas, non plus, faire moins que de se donner lui-même et totalement à ceux qui crient vers lui. Ceux qui cherchent, c’est le cœur de Dieu qu’ils trouveront, et donc, pour ceux qui frappent, c’est la porte du cœur de Dieu qui s’ouvrira. Je ne sais pas, je ne comprends pas, et il faut oser le dire, pourquoi, alors que nous avons tant prié, tant fait prier pour la guérison d’un enfant, il meurt quand même. Je ne sais pas, je ne comprends pas, mais je sais, pour autant, que Dieu n’est pas resté sourd à la prière. 

Quand le pape François était allé aux Philippines, il a visité l’œuvre d’un jeune prêtre que j’avais connu quand il était en formation au séminaire d’Ars, le père Matthieu Dauchez qui recueille, à Manille, des enfants de la rue. On peut voir sur internet la vidéo de cette visite du pape, et le moment le plus émouvant, c’est quand 2 enfants demandent au Pape, avec des larmes dans la voix : pourquoi tant d’enfants doivent-ils supporter tant de souffrances ? Le pape a merveilleusement répondu, lui aussi, avec beaucoup d’émotion dans la voix : vous avez posé la seule question pour laquelle il n’y a pas de réponse ! Mais il ne s’est pas contenté de dire cela, il est allé vers eux et il a pris ces enfants dans ses bras et les a étreints longuement.

Cette attitude du pape, la vie donnée du père Matthieu Dauchez et de tant d’autres témoins, nous permet de comprendre que c’est bien vrai : à ceux qui crient vers lui, Dieu répond en se donnant lui-même. Ceux qui cherchent, c’est le cœur de Dieu qu’ils trouveront, et donc, pour ceux qui frappent, c’est la porte du cœur de Dieu qui s’ouvrira. Si personne ne rejoignait ces enfants et, de manière plus large, ceux qui souffrent, ils pourraient légitimement penser que Dieu ne répond pas. Mais ces enfants de Manille, par exemple, voient un prêtre qui a tout quitté pour eux, pour les aimer. Il avait pourtant tout pour être tranquille, il venait de Versailles, un diocèse où on ne manque de rien, ni de vocations, ni de chrétiens, ni d’argent, eh bien, il a tout quitté pour les rejoindre. A travers la vie donnée du père Matthieu, c’est Dieu qui se donne à ces enfants de la rue qui crient vers lui, c’est la porte du cœur de Dieu qui s’ouvre pour ceux qui ont été abandonnés, rejetés.

Comme il est bon d’avoir des figures si lumineuses dans notre Eglise, elles encouragent tous ceux qui se donnent avec une grande générosité pour que ceux qui traversent des épreuves sans nom ne puissent jamais douter de la bonté de Dieu. Et nous en croisons tous et, tous, parce que nous ne savons pas quoi dire, nous connaissons la tentation de fuir. Mais, c’est par notre attitude, que Dieu pourra se donner aujourd’hui à eux, il n’a pas d’autre moyen de les rejoindre que de passer par nous, en avons-nous assez conscience ? Quel visage offrons-nous à ces personnes en souffrance ? Est-ce vraiment un visage dans lequel, ils peuvent lire la bonté de Dieu à livre ouvert ? Vous connaissez sans doute la petite maxime qui dit qu’on n’est pas responsable de la tête qu’on a mais qu’on est responsable de la tête qu’on fait ! Par notre visage empreint d’empathie, par notre disponibilité pour les accompagner, par notre qualité de présence, même dans le silence, permettons-leur de croire que la porte du cœur de Dieu est déjà ouverte pour eux.  Voilà un très bel effort de carême !

Cette publication a un commentaire

  1. wilhelm richard

    N’est-il pas Just de dire que la Fontaine du Père Éternel n’a qu’un but : déposer dans nos filets des ball’ON (ça, votre maman ne va pas aimer ! ) d’eau vive.
    Notons par ailleurs que nos ball’ON d’or sont actuellement sanctionnés de cartons rouges depuis la nouvelle année liturgique :
    Pour NÔEL, Pelé ;
    Pour CARÊME, Fontaine !!!
    Et un, et deux et trois (?) zéro !!!!! (message codé et opaque)

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