Vraiment on peut dire que la lettre de St Jacques ne fait pas partie de ces belles histoires qu’on pourrait lire le soir aux enfants que nous sommes appelés à redevenir pour nous endormir ! Aujourd’hui encore, il y a une parole cinglante qui doit nous faire réfléchir : « Être en mesure de faire le bien et ne pas le faire, c’est un péché. » Oui, vraiment, ceux qui sont en mal d’inspiration quand ils vont se confesser peuvent méditer la lettre de St Jacques, un chapitre à chaque confession et ils auront largement de quoi faire !
Revenons quelques instants sur la parole de ce jour : « Être en mesure de faire le bien et ne pas le faire, c’est un péché. » C’est le fameux péché par omission que nous évoquons à chaque fois que nous prenons la prière du « je confesse à Dieu », prière qui nous fait demander pardon pour nos péchés en pensée, en parole, par action et par omission. Avant de développer un peu le sens de ce péché par omission, permettez-moi de revenir sur les 3 autres types de péché que nous confessons dans cette prière. Ça pourra déjà vous aider à préparer le moment où vous irez vivre le sacrement de la réconciliation.
- En parole, nous voyons très bien ce que ça peut recouvrir. C’est justement ce type de péché que débusque le chapitre 3 de la lettre de St Jacques. Vous connaissez ce bel adage qui dit que si Dieu nous a fait une seule langue et deux oreilles, c’est pour que nous écoutions deux fois plus que nous ne parlons. On peut donc bénir le Seigneur de ne pas avoir fait l’inverse : une oreille et deux langues. C’est vrai qu’au plan esthétique, ça ne serait pas génial, mais pour les péchés, ça serait carrément dramatique.
- En actions. Ce sont les péchés que nous confessons la plupart du temps, c’est le mal que nous commettons, mais souvent, là n’est pas le plus grand mal !
- En pensée. J’aimerais m’arrêter quelques instants sur ce mal commis en pensées parce qu’il faut bien comprendre ce que l’Eglise veut dire quand elle nous demande de confesser le mal que nous pouvons commettre en pensées.
D’abord, heureusement que notre cerveau n’est pas relié à des haut-parleurs qui amplifieraient toutes nos pensées les rendant audibles pour ceux qui nous entourent ; ni d’ailleurs à une caméra qui projetterait en grand nos pensées !
Mais il ne faudrait surtout pas croire que toutes nos pensées mauvaises sont des péchés parce qu’il y aurait de quoi déprimer en nous considérant comme des monstres de méchanceté, de perversité. Non, dans ce domaine, il y en a un qui s’y entend pour nous perturber, c’est l’esprit du mal, le tentateur qui va souvent attaquer nos pensées. Comme il n’a pas libre accès à notre âme, siège de notre volonté, il se défoule en polluant notre imagination. C’est ainsi qu’il va nous bombarder avec des suggestions pour nous donner envie de faire le mal en tant et tant de domaines.
N’allons donc pas nous confesser d’avoir des tentations. Jésus en a eu, son ministère public a commencé comme ça ! Ce qui va devenir péché, c’est quand j’entretiens ces suggestions du tentateur parce que, tôt ou tard, elles me feront passer à l’action.
Et dans ce domaine, il faut toujours se rappeler du proverbe africain qui dit qu’il est plus facile d’arracher un brin d’herbe que de déraciner un baobab ! La tentation, en pensée, si je la combats quand le tentateur commence à mettre mon cinéma intérieur en marche, je vais vite en devenir maître. Mais si je la laisse grandir, je suis foutu. Voilà pourquoi on confesse les péchés en pensées, ce sont les pensées mauvaises que nous avons entretenues.
- Venons-en maintenant au péché par omission puisque c’est celui-là que visait le passage de la lettre de St Jacques aujourd’hui : « Être en mesure de faire le bien et ne pas le faire, c’est un péché. »
Ce péché par omission, il pourrait être symbolisé par ces 3 singes de la sagesse orientale que vous avez sans doute déjà vus : Le premier se voile les yeux avec ses mains, le deuxième se bouche les oreilles et le troisième met sa main sur la bouche. La sagesse orientale donne une interprétation positive à l’attitude de ces 3 singes : si tu veux être un sage, ne regarde pas le Mal, n’écoute pas le Mal, ne dis pas de Mal !
C’est très beau ! Mais, hélas, l’Occident égoïste a repris cette représentation en la commentant de cette manière : Si tu veux être heureux, occupe-toi de toi et ne regarde pas ce qui se passe autour de toi ! N’écoute pas ce qui se dit autour de toi et ne parle pas à ceux qui vivent autour de toi !
Et vous savez que ces 3 singes, désormais, sont remplacés par une personne qui a son smartphone car avec cet outil certains ne regarde plus ce qui se passe autour d’eux, n’écoute plus ce qui se dit autour d’eux et ne parle plus à ceux qui vivent autour d’eux ! Et voilà comment on sombre dans ce que le pape appelle l’auto-référencement qu’il ne cesse de dénoncer. Le monde ne tourne plus qu’autour de nous !
« Être en mesure de faire le bien et ne pas le faire, c’est un péché. » C’est sûr que si nous confessions plus nos péchés par omission, notre liste s’allongerait considérablement. Alors, bien sûr, il ne s’agit pas de se confesser de n’avoir rien fait pour empêcher le conflit en Ukraine. Regardons le bien que nous n’avons pas fait, de manière volontaire, autour de nous alors que nous aurions pu le faire. Et j’insiste pour dire que je parle de ce bien que, délibérément, je n’ai pas fait alors que ma conscience me suggérait de le faire.
Venons-en à l’Evangile, voilà encore une scène qui a dû consterner Jésus. On a l’habitude de souligner les faiblesses de Pierre, mais Jean avait aussi les siennes, c’est lui, en effet, qui vient trouver Jésus pour lui dire : « Maître, nous avons vu quelqu’un expulser les démons en ton nom ; nous l’en avons empêché, car il n’est pas de ceux qui nous suivent. » Oui, c’est consternant et, une nouvelle fois, nous pouvons admirer l’attitude de Jésus qui ne manifeste aucune colère devant une réflexion aussi mesquine. Parce que, évidemment, Jean aurait dû exulter de joie en constatant que, désormais, il y avait de plus en plus de bien qui se faisait « au nom de Jésus » et que ce bien était accompli par des hommes qui n’avaient pas la proximité avec Jésus que les apôtres pouvaient avoir. Mais au lieu de se réjouir, comme un enfant jaloux, il dénonce ceux qui osent faire du bien sans être du groupe apostolique. La réponse de Jésus l’obligera, lui et les autres apôtres avec lui, à élargir considérablement leurs horizons : « celui qui n’est pas contre nous est pour nous ! »
Oui, sois béni Seigneur pour ton Esprit qui souffle sans limite et qui inspire à tant de personnes de faire du bien. Plutôt que de les jalouser, donne-nous de les rejoindre en arrêtant d’imiter les 3 singes qui refusent de voir, d’écouter et de parler !