31 mars : Fête de Pâques : Quand l’absence réelle devient aussi parlante que la présence réelle !

Tous ceux qui vont en Terre Sainte rêvent de pouvoir entrer dans le tombeau du Christ. Certains font la queue pendant des heures pour y parvenir et voilà qu’au bout de quelques secondes seulement, ils doivent en sortir, plus qu’encouragés par un pope orthodoxe à qui il vaut mieux obéir ! Personnellement, j’ai eu beaucoup de chance de pouvoir y rester pas mal de temps. Pendant mon année sabbatique, j’ai eu la grâce de passer un mois en Terre Sainte et, au cours de mon séjour à Jérusalem, j’ai profité de la possibilité qui est offerte, chaque nuit, de se faire enfermer dans la basilique du St Sépulcre. Les places sont extrêmement limitées : 15 catholiques et 15 orthodoxes. La nuit que j’avais choisie, il n’y avait pas 15 orthodoxes, nous étions donc seulement une vingtaine au total et nous avions toute la basilique St Sépulcre rien que pour nous, toute la nuit ! J’ai attendu mon tour pour entrer dans le tombeau et, par deux fois, j’ai pu y rester plus d’une ½ heure pour prier sans être dérangé !

Pourtant, quand on y réfléchit bien, cette démarche est complètement folle. Comment est-ce possible que les gens fassent la queue pendant des heures pour entrer dans un lieu où il n’y a rien ? C’est fou ! Ceux qui n’ont pas la patience d’attendre passent devant le tombeau et font une génuflexion en se signant … comme on le fait en passant devant un tabernacle. Mais devant un tabernacle, on comprend ce geste de vénération parce qu’il contient la présence réelle de Jésus, mais le tombeau, lui, il est vide ! La rédactrice de Terre Sainte Magasine que j’avais pu rencontrer aime utiliser cette expression « d’absence réelle » pour parler du Tombeau vide. Je trouve cette expression magnifique et tellement juste. Le tombeau vide est le signe de l’absence réelle de Jésus qui devient tout aussi parlant que le signe de la présence réelle dans le Tabernacle. Et c’est pour cela qu’on fait la queue devant ce tombeau vide, c’est pour se laisser saisir par l’absence réelle.

C’est bien parce qu’il a vu cette « absence réelle » que l’Evangile d’aujourd’hui note, à propos de St Jean : « Il vit et il crut. » S’il y a un lieu devant lequel on ne peut pas dire :  circulez, il n’y a rien à voir, c’est bien devant le tombeau vide ! Parce que, justement, c’est ce « rien » qu’il faut voir, c’est ce « rien » qui vient nous percuter ! Les esprits chagrins pourraient rétorquer que le tombeau vide ne prouve rien, sinon que Jésus n’est plus dans le tombeau, mais il ne prouve pas sa résurrection. Oui, c’est vrai ! D’ailleurs, les responsables religieux juifs ne se sont pas privés de se servir de cet argument pour, comme le raconte l’évangile de Matthieu, expliquer que les disciples sont venus, de nuit, enlever le corps de Jésus pour faire croire qu’il était ressuscité. Il faut bien l’admettre : en soi, le tombeau vide ne prouve rien.

Mais voilà, nous les chrétiens, nous croyons au témoignage de ces tout premiers témoins oculaires que furent Pierre et Jean, et surtout Jean qui a justement tenu à mettre par écrit ce qu’il avait vu dans ce moment si particulier. Car, figurez-vous, que le tombeau n’était pas tout à fait vide ! Dans les évangiles synoptiques, les femmes sont les premières à avoir vu et elles, elles sont extrêmement marquées par la présence d’ange(s) … on peut les comprendre, ce n’est pas tous les matins qu’on en croise, en chair et en os, si j’ose m’exprimer ainsi en parlant des anges ! Du coup, elles ne parlent que de cette présence angélique. Mais Pierre et Jean, eux, ils n’ont pas eu droit aux anges, pourtant ce qu’ils ont vu a suffi à susciter ou même carrément re-susciter leur foi. 

En effet, comme je le disais, le tombeau n’était pas tout à fait vide puisque l’évangile nous dit qu’il y avait : « les linges, posés à plat, ainsi que le suaire qui avait entouré la tête de Jésus, non pas posé avec les linges, mais roulé à part à sa place. » Pourquoi tous ces détails ? On trouve, sur internet de très bons articles sur le sujet qui expliquent bien le sens de ces détails. J’en indique un sur mon blog !

 https://www.laresurrectionduchrist.com/les-linges-dans-le-tombeau

Dans cet article, il y a même une bande dessinée pour bien visualiser cela. Je ne veux pas m’étendre sur la question des différents types de linges qui étaient utilisés, mais ce qui est très intéressant ce sont les deux détails précisant la position de ces linges. Ils étaient « posés à plat », quant au linge qui a entouré la tête, il était « roulé à part, à sa place. »

Les spécialistes du grec comprennent que ces deux mentions ont un but bien précis, c’est de nous dire explicitement que tout était encore en place comme au moment où le corps de Jésus avait été déposé, oui, mais maintenant, il n’y avait plus le corps et pourtant les linges étaient là, comme si le corps s’était dégonflé de l’intérieur ! 

Ce que suggèrent ces détails de l’Evangile, c’est assez difficile à expliquer, mais ceux qui ont vu le film « La Passion » de Mel Gibson, comprennent parce que c’est très bien rendu dans le film ! Ainsi donc, tout est exactement en place, mais il n’y a plus de corps. Et si on avait volé le corps, on n’aurait pas pu obtenir un tel résultat ! Il fallait vraiment que le corps disparaisse de l’intérieur des linges pour obtenir ce résultat. 

Du coup, on comprend mieux pourquoi il est dit, à propos de St Jean : « Il vit et il crut. » Ce « rien » ce « vide » qu’il a vu était tellement explicite, tellement éloquent qu’il a cru immédiatement. Pour Pierre, ça a été un peu plus laborieux, mais, reconnaissons-le, Pierre, il a des circonstances atténuantes ! Le pauvre Pierre était encore plongé dans la culpabilité de son reniement, son péché l’aveuglait, il avait donc du mal à voir et donc à croire. Pour le faire sortir de cet enfermement paralysant de sa culpabilité, il faudra la rencontre du pardon avec ce dialogue de la miséricorde sur la plage du lac. C’est seulement à partir de là que sa foi pourra s’épanouir et donner tant de beaux fruits pour la vie et la croissance de l’Eglise.

Revenons à notre texte, à l’événement de la Résurrection, à ce que Jean a vu. Oui, bien sûr, pour nous qui avons déjà la foi, ce que je viens d’expliquer peut se révéler très parlant, mais c’est sûr que ça ne parlera pas à ceux qui n’arrivent pas à croire. Que peut-on leur dire à eux ? D’abord, il faut accepter qu’il n’y ait pas de preuves de la résurrection, c’est dans la logique de l’amour de Dieu que de ne pas s’imposer. De même que Jésus a refusé d’utiliser sa puissance pour descendre de la croix et convaincre tout le monde de sa divinité, le Père, pour ressusciter son Fils, a aussi refusé de le faire en plein jour après avoir convoqué une foule, il a préféré la discrétion de la nuit . C’est vrai, ça ne nous facilite pas le travail d’évangélisation, mais c’est tellement plus respectueux de la liberté des hommes et conforme à la manière si délicate de notre Dieu de toujours se proposer sans jamais s’imposer.

Pour autant, nous ne sommes pas totalement démunis. Rappelons-nous ce que Paul disait : « si les morts ne ressuscitent point, Christ non plus n’est pas ressuscité. » 1 Co 15,16. Pour lui, inversant le raisonnement habituel, il affirme que la preuve que le Christ est ressuscité, c’est que les morts ressuscitent. Alors, j’espère que vous avez déjà vu des morts ressusciter ! Moi, je ne peux plus les compter ! Oui, j’ai vu l’intervention de Dieu pour ramener à la vie ceux qui avaient déjà un pied dans la mort. Evidemment, je ne parle pas de résurrections corporelles, mais de résurrections spirituelles. Ici, au sanctuaire, nous sommes, quotidiennement, les témoins de ces résurrections spirituelles. 

C’est sans doute l’une des missions les plus urgentes et les plus décisives que le Christ confie à son Eglise aujourd’hui : proposer des lieux où tous les morts-vivants pourront reprendre vie, sortir de leurs tombeaux et être déliés de tout ce qui les empêche de vivre. 

Par l’intercession de Notre Dame de Laghet, demandons pour tous ceux qui en ont besoin cette grâce d’une résurrection spirituelle.

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