24 juillet : mercredi 16° semaine ordinaire : Le Saint patron des rouspéteurs qui veulent rester fidèles

Les 1° lectures de ces dernières semaines nous donnent à méditer les écrits de quelques prophètes, Amos, Osée, Isaïe, Michée et aujourd’hui, pour une quinzaine de jours, nous commençons la lecture de quelques passages du livre de Jérémie. Puisqu’il va nous accompagner aussi longtemps, il n’est sans doute pas inutile de connaître quelques éléments clés de la vie de Jérémie qui nous permettront de mieux accueillir le message qu’il veut nous transmettre de la part du Seigneur. 

Si vous avez un peu de culture biblique et qu’on vous demande de donner un verbe que vous pourriez associer, de manière assez spontanée à Jérémie, il y a bien des chances que vous disiez : « rouspéter. » C’est d’ailleurs passé dans le langage courant, les jérémiades ce sont des « rouspétances » ! Et c’est vrai que Jérémie rouspétait souvent. Alors, si vous êtes une rouspéteuse ou un rouspéteur invétéré, vous savez désormais quel saint patron vous pourrez invoquer ! Mais attention, Jérémie ne sera jamais le saint patron de ceux qui rouspètent sans arrêt et sans véritables bonnes raisons parce que Jérémie, lui, il avait de bonnes raisons de rouspéter.

D’abord le Seigneur est venu le chercher alors qu’il n’avait rien demandé et que rien, mais alors vraiment rien ne le prédisposait à remplir cette mission. Il n’était pas comme Isaïe, un homme bien né, habitué à fréquenter les grands de ce monde. C’est ce qu’il fait remarquer au Seigneur dans le texte d’aujourd’hui qui nous donne le récit de sa vocation. D’abord, il est assez jeune, en tout cas trop jeune à son goût pour remplir la mission de prophète, alors pour que ce soit clair et que Dieu comprenne bien, il dit qu’il n’est qu’un enfant ! En plus, il semble au minimum très timide, mais peut-être aussi affublé d’une difficulté à parler : « Je ne sais pas parler, je suis un enfant ! » Mais il en faut bien plus pour décourager le Seigneur qui confirme son choix : « Ne dis pas : “Je suis un enfant !” Tu iras vers tous ceux à qui je t’enverrai ; tout ce que je t’ordonnerai, tu le diras. » Et la suite nous laisse tout de suite entrevoir que la mission qu’il va recevoir ne sera pas de tout repos : « Ne les crains pas, car je suis avec toi pour te délivrer » Alors pourquoi ça ne va pas être simple ?

Eh bien, le ministère de Jérémie ne sera pas simple parce qu’il va prophétiser à un moment bien troublé de l’histoire du Peuple choisi par Dieu. Il semble que son ministère ait duré une quarantaine d’années, ce qui laisse supposer que, s’il a beaucoup rouspété, il est resté fidèle dans l’adversité. Il aurait commencé à prophétiser vers 627 et finira vers 587, cette date terrible qui marque la prise de Jérusalem et la déportation à Babylone. Pourtant tout avait assez bien commencé pour lui. En effet, le roi de l’époque était le roi Josias, un roi tellement bon qu’on s’est demandé s’il ne serait pas le Messie promis. Josias avait ordonné des travaux dans le Temple et, à l’occasion de ces travaux, un rouleau de la Loi avait été retrouvé. Il semblait bien que la Loi, dans ces derniers temps, on s’arrangeait avec elle, le peuple et ses dirigeants prenaient ce qui les arrangeait et laissaient ce qui les dérangeait ! La découverte de ce rouleau de la Loi, qui est lu publiquement, donne au roi Josias le désir d’impulser une grande réforme pour redonner à tous la possibilité de retrouver une vie plus conforme à la Loi. Tout cela convient parfaitement à Jérémie qui va accompagner avec enthousiasme, par son ministère, cette réforme.

Seulement voilà, hier, comme aujourd’hui, les réformes ne font jamais plaisir à tout le monde, notamment à ceux qui perdent leurs avantages acquis. C’est le cas des gens d’Anathoth, le village de Jérémie. Il y avait là-bas un petit sanctuaire qui marchait pas mal, qui attirait du monde et ça faisait bien les affaires du gens du village. Or voilà, que dans sa réforme, le roi Josias décrète la fin de tous ces sanctuaires qui pullulaient au profit du Temple de Jérusalem. La religion s’était dévoyée, dans beaucoup de ces petits sanctuaires, on avait des cultes qui ressemblaient aux cultes païens, le roi décide donc d’utiliser les grands moyens : il supprime les sanctuaires et Jérémie soutient totalement cette décision. On imagine assez facilement que les gens de son village vont lui en vouloir assez longtemps et seront mêlés aux complots visant à le supprimer. Jérémie aura donc de bonnes raisons de rouspéter : c’est la fidélité à la mission qui lui vaut ces déboires, du coup, à la manière du petit Gibus, il se plaindra souvent en disant : « si j’aurais su, j’aurais pas venu ! »

Mais bon, s’appuyant sur la fidélité du Seigneur, Jérémie tiendra. Le Seigneur avait dit par la bouche d’Isaïe : « Si vous ne tenez pas à moi, vous ne tiendrez pas ! » Jérémie en fera comme sa devise. Seulement voilà, un événement dramatique remet tout en cause, le roi Josias va mourir bêtement au combat. On se doute que certains attendaient ce moment pour prendre leur revanche et retrouver leurs privilèges perdus. Ces événements vont singulièrement compliquer le ministère de Jérémie et lui donner tant d’occasions de rouspéter. Vous l’aurez compris, en fait, Jérémie n’est pas le saint patron des rouspéteurs, mais le saint patron de ceux qui veulent rester fidèles à leur mission, quelle que soit cette mission, qu’il s’agisse de celle d’époux, de parents, de consacrés, d’étudiants, de prêtres et même d’évêque et qui veulent rester fidèles même et surtout dans l’adversité. Si vous en êtes, vous apprendrez auprès de Jérémie la liberté de vous tenir devant Dieu sans jamais rien lui cacher de vos états d’âme, de vos déceptions, de vos colères. Vous apprendrez auprès de Jérémie la liberté d’interpeler Dieu et de le laisser vous interpeler, vous bousculer mais aussi vous restaurer. Vous apprendrez surtout auprès de Jérémie à vous appuyer sur Dieu qui ne lâche jamais ceux qu’il a appelés, aucune de nos épreuves, aucune de nos infidélités n’éloignera le Seigneur. C’est ce que je nous souhaite de découvrir tout au long des 1° lectures de ces jours.

Pour ne pas trop allonger, je vous laisserai méditer cet Evangile que nous connaissons bien et qui nous invite à transformer nos cœurs pour qu’ils deviennent une bonne terre qui permettra à la Parole du Seigneur de porter de beaux fruits. C’est la grâce que nous demandons par l’intercession de Notre Dame de Laghet ainsi que la grâce de la fidélité dans l’adversité.

Laisser un commentaire