1° avril : ne cherchez pas, il n’y a pas de poisson !

Qu’est-ce qu’ils voulaient dire Sidrac, Misac et Abdénago quand ils disaient à Nabuchodonosor : « Si notre Dieu, que nous servons, peut nous délivrer, il nous délivrera de la fournaise de feu ardent et de ta main, ô roi ! » Il est bien possible qu’ils imaginaient que Dieu ne permettrait pas qu’ils soient mis dans cette fournaise. Ils avaient tellement la foi qu’ils étaient persuadés que Dieu, parce qu’il est juste, ne permettrait pas que, eux, puisqu’ils se comportaient comme des justes, soient injustement traités. Et ils sont admirables dans leur confiance, car ils vont jusqu’à dire : « Et même s’il ne le fait pas, sois-en bien sûr, ô roi : nous ne servirons pas tes dieux, nous n’adorerons pas la statue d’or que tu as érigée. » C’est magnifique ! Si je résume : scénario A : Dieu, le juste, interviendra pour épargner l’épreuve de la fournaise aux justes. Scélario B : s’il ne le fait pas, nous resterons forts. 

Mais voilà, ça ne sera ni le scénario A, ni le scénario B, Dieu va écrire le scénario C et il ne faut pas en vouloir aux 3 jeunes hommes de ne pas l’avoir envisagé parce que personne ne pouvait l’imaginer, en dehors de Dieu, bien sûr !

Dieu n’a pas accepté le scénario A qui est le scénario dont rêvent tous les croyants, qui est le scénario pour lequel prient tous les croyants : Seigneur, empêche le mal ! Pour expliquer pourquoi Dieu ne retient pas ce scénario A, je vous renvoie à ce que je disais hier, le mal, ce sont les hommes qui le décident et le mettent en œuvre. Mettre en œuvre le scénario A reviendrait, pour Dieu, à décider de faire mourir le méchant et ça, Dieu ne le veut pas, même si nous, nous en rêvons souvent ! Mais, il faut bien reconnaître que nous en rêvons avec une forte dose d’inconscience parce que nous ne réalisons pas que nous sommes souvent des méchants ! Certes, parce que nous n’arrivons pas à la cheville d’Hitler, le mal que nous faisons ou le bien que nous ne faisons pas n’a pas des répercussions nationales ou internationales, mais il peut quand même rendre la vie infernale à certaines personnes ! Donc Dieu ne peut pas accepter le scénario A parce qu’il présuppose la mort du méchant ce qui aboutirait à l’anéantissement du genre humain ! Or Dieu ne veut pas détruire ceux qu’il a créés par amour.

Le scénario B serait indigne de Dieu : ne rien faire et se contenter de regarder le spectacle pour voir s’il peut compter sur la bravoure des justes en espérant qu’ils ne seront pas entrainés dans la spirale du mal. Non, ça, on peut en être sûr, ça ne ressemble vraiment pas à notre Dieu !

Alors quel est-il ce scénario C auquel les 3 jeunes hommes ne pouvaient pas penser un seul instant ? Eh bien ce scénario C, sa trame nous est suggérée par ce que dit le roi, très étonné d’entendre chanter dans la fournaise, il va voir et, là, stupeur, alors qu’il a fait mettre 3 jeunes hommes dans la fournaise, il se rend compte qu’ils sont 4 ! Vous avez entendu la question du roi : « Nous avons bien jeté trois hommes, ligotés, au milieu du feu ? » Les serviteurs lui répondent : « Assurément, ô roi. » Alors, le roi fait part de sa stupéfaction : « Eh bien moi, je vois quatre hommes qui se promènent librement au milieu du feu, ils sont parfaitement indemnes, et le quatrième ressemble à un être divin. » Voilà le scénario C, et c’est celui que Dieu ne cesse d’écrire : il va rejoindre ceux qui sont dans la souffrance.

Vous avez bien entendu, il va rejoindre ceux qui sont dans la souffrance, il ne leur dit pas : je vous soutiendrai de loin ! Je vais prier pour vous ! Ce que nous disons souvent généreusement. J’ai déjà évoqué cette chronique dans la Croix de Jean-Baptiste de Fombelle qui a un de ses fils à St Bonnet et qui raconte qu’un soir, au moment, où ils allaient faire la prière familiale, le petit dernier qui n’a pas eu envie de rester parce qu’il voulait aller jouer avec ses playmobiles leur a dit en quittant le coin prière : ze suis en communion de prière ! Ce n’est pas ce que Dieu a dit à Sidrac, Misac et Abdénago ! Non, il est allé les rejoindre.

Je me rappelle cette carmélite à qui des jeunes demandaient de raconter sa vocation. Elle a expliqué que, lorsqu’elle était étudiante, une de ses amies qui savait qu’elle était chrétienne, lui avait confié de gros soucis et elle s’était entendue lui répondre : je vais prier pour toi. En rentrant chez elle, sa réponse tournait et retournait dans sa tête. Et elle s’est dit, mais je ne peux pas être vraie si je fais juste une prière comme ça, même si je la reprends chaque jour … mon amie a besoin de plus ! Et peu à peu, elle a compris, parce qu’elle était éprise de vérité, que la réponse la plus vraie serait de donner sa vie à la prière pour porter cette amie et tous ceux qui, tel le paralytique de l’Evangile, avaient besoin d’être portés devant le Seigneur. Comme le disait Jésus dans l’Evangile : elle a connu la vérité et elle s’est engagée totalement pour être vraie et la liberté l’a rendue libre.

A toutes ces demandes qui nous sont faites, la seule réponse qui puisse être vraie, c’est la mise en œuvre du scénario C : par notre vie donnée, à la suite de celle de Jésus et dans la grâce qu’il nous accorde, de rejoindre tous ceux qui souffrent, avec les moyens qui sont les nôtres, c’est-à-dire notre vie donnée. Demandons-lui qu’il nous fasse la grâce de ne pas reprendre d’une main ce que nous lui donnons de l’autre. J’aime tellement cette parole du père Christian de Chergé qui disait : « En général, nous pouvons dire que nous avons donné notre vie à Dieu, mais comme il nous en coûte quand il nous la demande dans le détail ! » Nous entrons dans les jours où il va nous être donné de contempler jusqu’où Jésus va aller pour se donner totalement, que cette contemplation nous encourage à ne pas nous arrêter en chemin.

Et, à ce sujet, permettez-moi une interpellation fraternelle concernant la prière communautaire : quand je ne viens pas, ai-je vraiment une bonne raison de ne pas le faire ? Bien sûr, je peux toujours prier ailleurs, mais, en ces temps de confinement, il est bon de nous rappeler qu’il y en a qui comptent sur notre prière et que nous ne pouvons pas nous défiler en nous contenant de dire : ze suis en communion de prière ! Il est bon aussi de nous rappeler qu’il y en a qui paieraient très cher pour avoir la grâce de pouvoir prier en communauté et qui n’en peuvent plus de prier seuls dans leur confinement. Que l’Esprit-Saint nous éclaire pour que nous puissions, concrètement, accepter de ne pas être de simples figurants dans le scénario C !

Cet article a 2 commentaires

  1. wilhelm richard

    cher père, je reste sans voix !
    la première lecture ne fait-elle pas allusion aux trois mousquetaires qui étaient quatre ?
    À tout prix, ils étaient tout feu tout flamme, et tous unis contre toute vie perdue !

    1. Père Roger Hébert

      Merci Richard de ce commentaire pétillant !
      Merci pour le mot et le livre ! Le livre, je l’ai remis dans ma manette car je l’ai déjà !
      Bravo pour le c commentaire enflammé du match !

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