13 février : 6° dimanche temps ordinaire. Ne vous trompez surtout pas de file dans le choix du buffet !

Imaginez un instant, vous êtes invités à un repas type buffet où il faut aller se servir. On vous annonce qu’il y a le choix entre deux buffets, vous cherchez à en savoir plus, mais on vous répond que vous verrez bien quand vous serez face aux deux grandes tables de service. Ce qui vous étonne, c’est qu’il y a une longue file pour accéder à l’une des tables et pas grand monde sur l’autre file. Alors, fort logiquement, vous vous dites, même si c’est un peu moins bon, je choisis d’aller là où il y a moins de monde, je pourrai me servir plus vite … et peut-être restera-t-il encore quelque chose du bon buffet quand j’aurai fini et que je pourrai goûter quand tout le monde sera servi ! Vous entrez et là, vous avez beaucoup de mal à comprendre ce qui se passe. La table vers laquelle vous vous dirigez, là où il y a le moins de monde est remplie des mets les plus succulents et les mieux apprêtés alors que sur l’autre table, ce qui s’y trouve n’est vraiment pas attirant et dégage, en plus, une odeur pestilentielle ! Vous vous dites qu’il y a quelque chose qui ne marche pas : pourquoi tant de monde fait la queue pour ce qui est si désagréable et si peu de monde vient là où tout est savoureux ?

Eh bien, figurez-vous que c’est exactement ce que demande le Bon Dieu et c’est son questionnement, son étonnement qui nous est partagé dans les lectures de ce jour, au moins dans la 1° lecture et l’Evangile qui, comme chaque dimanche, se répondent et sont à écouter comme en stéréo. 

Commençons par l’Evangile, sur le bon buffet, il y a d’abord le royaume de Dieu qui est servi, pas moins que ça ! Ensuite, tout ce qui peut rassasier, c’est-à-dire que ce n’est pas un buffet nouvelle cuisine avec juste de quoi vous mettre l’eau à la bouche, mais rien qui tienne au ventre ! Après, il y a les rires parce que le meilleur des repas pris dans la tristesse n’a guère d’intérêt. Et enfin il y a un truc d’une valeur inestimable puisqu’il s’agit d’une récompense éternelle. C’est-à-dire un coffret-cadeau qui vous dit que ce dont vous venez de vous rassasier, vous y aurez droit jusqu’à la fin de l’éternité. Pas mal, parce que jusqu’à la fin de l’éternité, ça laisse le temps d’en profiter ! Et, donc, pour cette table du buffet, il n’y a presque personne qui fait la queue. Comment peut-on comprendre ça !

Pour l’autre table, la file ne fait que s’allonger, alors que ce qui est servi est absolument minable. En premier, il y a l’arrêt définitif de toute consolation, donc des larmes et du cafard, en permanence. Le plat suivant, c’est un plat vide avec la certitude de rester dans une faim de loup permanente. Et en dessert, le deuil et les pleurs, bref, le malheur. Enfin, il n’y a pas photo entre les deux buffets ! Parfois, il faut être extrêmement fine gueule pour voir les nuances de goût entre deux plats qui se ressemblent. Mais, là, ce n’est pas le cas. Eh bien, Dieu n’en revient pas de voir à quel point le discernement des hommes est faussé puisqu’ils délaissent le buffet qui est le banquet de la vie pour se précipiter en si grand nombre vers ce buffet qu’on pourrait qualifier de buffet de la mort. 

Pourtant, il en a passé du temps, et il a mis toute sa passion à mitonner ses meilleurs plats. Mais, rien n’y fait, personne ou presque n’y va alors que tout est frais, appétissant, abondant. Par contre, de l’autre côté, là où tout est minable, les amateurs sont de plus en plus nombreux à se précipiter vers cette table qu’il a laissée préparer aux diablotins en leur disant, faites ce que vous voulez, mais inutile de vous forcer car personne ne viendra. Eh bien, contre toute attente, c’est l’inverse qui se passe et Dieu, est plongé dans un profond chagrin, il ne comprend pas ce qui se passe, il ne comprend plus les hommes !

En fait, il y a une explication, les diablotins, eux, ils ont su préparer leur table. Dieu, lui il faisait tellement confiance à ses produits frais et succulents qu’il n’a pas cherché à faire une préparation spéciale qui attire spécialement l’œil. Des plats qui rassasient, des rires et la récompense éternelle. C’est suffisamment alléchant, normalement, il n’y pas besoin de leur mettre des petites fioritures pour attirer ou de les servir sur des plans en argent massif. Les diablotins, eux qui sont fourbes, par nature, ils ont bien compris qu’ils n’allaient pas attirer par le contenu de leurs plats, des larmes, du cafard, une faim de loup permanente, le deuil et le malheur, c’est sûr que ce n’est pas très attirant. Alors, comme ils en sont les spécialistes, ils ont fait une présentation d’enfer ! Tous les emballages sont faits dans les meilleurs matériaux du bling-bling qui peuvent attirer. Les larmes et le cafard sont emballés dans de la richesse. La faim de loup permanente est emballée dans une surabondance trompeuse. Le deuil dans des rires factices et enregistrés. Le malheur dans des compliments hypocrites. Ah, c’est sûr que l’emballage à de quoi attirer. On se dit que, forcément, ce qui est dedans doit être à la hauteur de l’emballage. Eh bien, non, parce que les diablotins sont les spécialistes de l’escroquerie. Ils vous présentent le péché sous des abords tellement attirants et prometteurs, que vous ne pouvez pas résister, vous croquez et c’est seulement quand vous avez croqué que vous découvrez que le produit était non seulement décevant mais en plus empoisonné.

Alors, Dieu n’en pouvait plus de voir que les hommes se laissaient avoir à ce point. Il a décidé de leur envoyer des prophètes avec la mission de leur ouvrir les yeux, d’attirer leur attention pour qu’ils ne se laissent plus avoir. Ces prophètes ont crié bien fort, ils avaient un discours béton : Béni soit l’homme qui met sa foi dans le Seigneur, il sera comme un arbre, planté près des eaux. Il ne craint pas quand vient la chaleur : son feuillage reste vert. L’année de la sécheresse, il est sans inquiétude : il ne manque pas de porter du fruit. Et pour que ce soit bien clair, les prophètes ont rajouté : Qu’il est malheureux l’homme qui se détourne du Seigneur pour s’attacher aux apparences trompeuses, il sera comme un buisson sur une terre désolée, il ne verra jamais venir le bonheur. Il aura pour demeure les lieux arides du désert, une terre salée, inhabitable. Ils ont crié les prophètes, mais rien n’a changé, la file pour le buffet préparé par les diablotins ne diminuait pas !

Alors Dieu a envoyé son Fils Jésus qui a parlé, lui aussi. Un jour, profitant que la foule le suivait, il a embouché la même trompette que les prophètes et il a dit de manière on ne peut plus clair que, dans la vie, il fallait faire des choix et que tous nos choix avaient des conséquences : soit ils nous permettaient d’avancer sur le chemin de la vie et du Bonheur, soit ils nous enfermaient dans le malheur. Jésus a été clair, il n’y a pas de 3° voie possible. Mais ça n’a rien changé. Alors, constatant qu’il y en avait toujours plus qui se faisaient avoir en continuant de choisir les apparences trompeuses et faciles, Jésus s’est mis à pleurer. Parce que, en cette fête de la St Valentin, autant le dire, s’il y en a un qui est amoureux, c’est bien lui ! C’est ce qui nous est dit dans l’Evangile avec ce petit mot « malheureux » qui évidemment n’est pas une condamnation. Ce petit mot, c’était celui qui était utilisé par les pleureuses quand elles allaient pleurer un mort. Oui, devant les choix tordus de ses contemporains, Jésus a pleuré, entonné une lamentation parce que, lui, il les aimait. 

Allons-nous encore longtemps le faire pleurer en nous précipitant au buffet des diablotins ? Quand cesserons-nous d’être attirés par des emballages en bling-bling ? Arriverons-nous à faire confiance, les yeux fermés, à notre Dieu, pour croire que ce qu’il a préparé, lui, c’est forcément une nourriture de vie ? Tout à l’heure, quand nous viendrons communier, ça sera merveilleux, parce que, là, nous aurons choisir la bonne file, pour le bon buffet. Que la saveur de ce pain de vie nous reste longtemps en bouche et nous détourne de la table des diablotins. C’est ainsi que nous parviendrons à la vraie vie, celle qui ne finit pas, celle que le Christ a inauguré par sa resurrection et dont Paul parlait dans la 2° lecture.

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