Ce texte qu’il nous a été donné d’entendre en 1° lecture, c’est comme un monument historique ! Il faut l’écouter avec un infini respect parce qu’il nous livre la plus ancienne prophétie annonçant la venue d’un envoyé de Dieu. Mais Balaam, quand il donne cette prophétie dit qu’il ne sait pas quand tout cela va se réaliser, il sait juste que ce n’est pas pour tout de suite. « Ce héros, je le vois – mais pas pour maintenant – je l’aperçois – mais pas de près. »Et il a bien raison de dire qu’il n’est encore pas encore près d’arriver car la prophétie trouvera son accomplissement plus de 1200 ans plus tard !
Il nous faut faire un peu d’histoire si nous voulons goûter cette histoire vraiment savoureuse ! Nous sommes dans le livre des Nombres qui raconte les 40 ans de traversée du désert après que Moïse ait libéré le peuple des hébreux de la servitude d’Egypte … donc vous voyez que nous sommes bien loin de la naissance de Jésus, je l’ai dit, c’est environ 1200 ans plus tard que Jésus viendra. Les prophéties d’Isaïe que nous avons entendues tous ces derniers jours, elles étaient beaucoup plus récentes puisqu’elles dataient environ de 700 ans avant Jésus-Christ. Dans ce texte, très ancien, du Livre des Rois, nous avons donc la toute première prophétie annonçant que Dieu allait envoyer un héros qui serait comme un astre, une grande lumière, c’est donc un texte extrêmement précieux, c’est pourquoi je parlais de monument historique.
Mais, dans ce texte, ce qui est le plus étonnant, ce n’est pas cette première annonce qui date d’aussi longtemps, le plus étonnant c’est de voir par qui elle a été transmise. Parce que ce Balaam était un personnage bien curieux. Puisqu’il prophétise, on pourrait penser qu’il est le tout premier des prophètes, eh bien, pas du tout ! Balaam, c’était un païen, un devin, un magicien qui vivait dans la région de Moab. La région de Moab, elle se trouve de l’autre côté de la Mer Morte, c’est la Jordanie actuelle, ce sont donc des territoires païens. Je vais vous raconter cette histoire, elle est un peu longue, mais tellement belle !
C’est le roi de Moab qui va faire appel à Balaam, parce qu’il connait ses dons, il va lui confier une mission particulière. Le peuple des hébreux est sorti d’Egypte, il arrive aux portes de la Terre Promise, mais il y a encore ce territoire de Moab à traverser. Et c’est là que le roi de Moab fait appel à Balaam, ce magicien qui devait ressembler à vos anciens sorciers, pour qu’il maudisse ce peuple et que sa malédiction les bloque dans leur avancée. Pourquoi le roi demande-t-il cela ? Tout simplement parce qu’il a entendu que ce peuple qui avance vers lui est très nombreux, il a donc peur que son pays soit envahi. Et. Il a d’autant plus peur qu’il a entendu dire que ce peuple avait un Dieu puissant qui combattait à ses côtés. Le roi compte donc sur les pouvoirs de Balaam pour bloquer l’avancée des hébreux en neutralisant les pouvoirs de leur Dieu et il va bien le payer pour qu’il fasse ce travail.
Mais Balaam se dit que si le Dieu des hébreux est si puissant, mieux vaut essayer d’entrer en contact avec lui pour savoir ce qu’il pense de cette mission. Inutile de se lancer tête baissée si la mission est d’avance vouée à l’échec ! Bien sûr, Dieu va demander à Balaam de refuser cette mission que le roi Balak veut lui faire accomplir. Dieu fait tout pour permettre à son peuple de continuer son avancée pour qu’il puisse, un jour, s’installer sur cette terre qu’il veut lui donner. Balaam annonce aux envoyés du roi qu’il refuse, mais le roi Balak ne lâche pas le morceau comme ça ! Il avait fait apporter pas mal de cadeaux pour accompagner sa première demande, il en promet bien plus si Balaam finit par accepter. Balaam refuse toujours ! C’est alors que Dieu lui apparait pour lui demander de partir avec les émissaires sans doute pour essayer de convaincre le roi de renoncer à son projet et Dieu lui promet d’être avec lui.
Mais au lieu de partir voir le roi, Balaam part avec les émissaires pour se rendre sur le lieu où on lui demandait de maudire le peuple des hébreux. Il a sans doute changé d’avis à cause des grosses sommes d’argent qui lui étaient promises ! Evidemment, Dieu n’est pas content et il ne veut pas que cet homme jette un sort sur son peuple, alors il envoie un ange barrer la route. Balaam ne voit pas l’ange, mais, chose étonnante, l’ânesse qui le porte, voit très bien cet ange qui lui barre la route, elle refuse donc d’avancer. Balaam la frappe pour la forcer à avancer, il doit aller maudire ce peuple. Mais, de manière très tonnante, malgré les coups, l’ânesse refuse toujours d’avancer ! C’est là qu’il se produit un miracle peu fréquent : Dieu va donner la parole à cette ânesse pour qu’elle puisse expliquer à Balaam que si elle n’avance pas, c’est pour une raison bien précise et qu’il ferait bien de s’interroger sur cette raison. Balaam comprend que ses ennuis viennent du fait qu’il n’a pas obéi à Dieu, ses yeux s’ouvre, il voit l’ange qui barre la route et prend la résolution d’obéir désormais à Dieu et à Dieu seul.
Du coup, l’Ange lui dit : c’est bon, tu vas pouvoir avancer, mais puisque tu décides d’obéir à Dieu, tu ne feras pas ce que le roi de Moab t’a demandé de faire et de dire contre le peuple des hébreux qui est le peuple de Dieu. Et donc, au lieu de maudire, Balam va bénir ce peuple et prononcer ces prophéties que nous avons entendues dans la 1° lecture et qui sont donc les plus anciennes prophéties annonçant la venue d’un héros à la royauté puissante qui va se lever sur son peuple comme se lève un astre. Merveilleuse histoire ! La Bible en contient comme ça, quelques unes, qui sont très savoureuses, mais pour les goûter, il faut connaître un peu le contexte et lire entre les lignes, c’est pour cela que j’ai voulu prendre le temps de vous la raconter ! Comme vous pouvez le constater ce n’est pas La Fontaine en écrivant ses fables qui a eu le premier l’idée de faire parler des animaux pour donner des leçons aux hommes, c’est la Bible !
Puisque cette histoire nous est donnée dans cette messe qui nous fait entrer en retraite, nous pouvons l’accueillir comme une invitation à la docilité. Nous avons vu que Balaam avait de la bonne volonté, il ne voulait pas désobéir à Dieu, mais il s’est repris, sans doute attiré par la richesse et a fini par faire l’inverse de ce que Dieu lui demandait. Ça a beaucoup contrarié Dieu qui a dû utiliser les grands moyens pour le rendre docile à sa volonté en faisant parler cette ânesse. Ne contrarions pas Dieu, ne nous laissons pas attirer par ce qui brille, rendons-nous dociles à la volonté de Dieu. N’obligeons pas Dieu à prendre les grands moyens pour que nous acceptions de nous convertir, pour que nous nous rendions enfin dociles à sa volonté.
Et je trouve que Dieu a de l’humour, ce sont les paroles d’une ânesse qui vont aider Balaam à ne plus se rebeller contre la volonté de Dieu. Le prédicateur que Dieu vous envoie pour vous aider à vous rendre dociles et qui, lui aussi, a besoin de le devenir toujours plus, ce prédicateur, il est devenu prêtre grâce à un âne, je vous ai raconté mon histoire et je vous ai expliqué comment c’était la présence d’un âne qui m’avait poussé à accepter d’aller dans cette école qui a tant compté dans mon cheminement. Béni soit Dieu qui fait parler les ânes, ceux d’hier et ceux d’aujourd’hui !
De L’Evangile, je ne dis que ce mot : Jésus est très fort et nous devrions nous inspirer de sa technique pour ne pas entrer dans des polémiques sans fin avec ceux qui refusent délibérément d’entendre raison ! Mais de polémiques, il n’y en aura pas entre nous cette semaine puisque nous serons dans le silence et je vous rappelle cette belle parole de Marthe : votre retraite vaudra ce que vaudra votre silence. Le moment venu, que le Seigneur nous aide à entrer dans ce silence pour mieux l’écouter en sachant qu’il peut parler de tellement de manières différentes et étonnantes, lui qui est capable de faire parler même les ânes !
Tous les ânes cependant n’ont pas de bonnes choses à dire… 😉 😉 😉
Evidemment, un âne qui ne parle que de lui-même reste un âne !
Balaam a dit à Dieu : » ânon, pas cela ! »
Alors Dieu répliqua avec beaucoup d’humour : si ce n’est pas mon fils, tu verras ma mère.
Anne, est-ce (avez-vous compris cette finesse ?) toi ?
Mais où vas-tu chercher tout ça ?!!!