15 mai : 5° dimanche de Pâques Seul l’amour peut donner à nos vies un poids d’éternité.

Peut-être que vous, vous n’en rêvez pas, encore que je n’en sache rien, mais il y a quand même pas mal de monde qui rêve de gloire. Il y a ceux qui rêvent d’une gloire personnelle, de pouvoir briller sous le feu des projecteurs et des caméras et qui sont prêts à tout pour y parvenir, que ce soit dans le sport, le show-bizness, la politique ou même dans le monde professionnel. Le pape François, avec la malice qu’on lui connait, a même osé dire que cette recherche de gloire personnelle pouvait être une maladie qui gangrenait la curie et tant d’autres instances d’Eglise. Pour d’autres, cette recherche de gloire semble moins suspecte, puisqu’ils ne recherchent pas une gloire personnelle, mais la gloire pour leur famille, leur entreprise, leur paroisse, leur communauté. Oui, mais voilà, la gloire, qu’elle soit recherchée à titre personnel ou à titre communautaire, risque toujours de conduire à des comportements, des attitudes pas toujours très nettes. Certains n’hésitent pas à prendre comme devise, le célèbre principe de Machiavel : la fin justifie les moyens. Ce principe si souvent invoqué dans l’histoire par des dirigeants cyniques a conduit à tellement d’horreurs et continue de faire tellement de victimes innocentes par exemple en Ukraine que nous ne pouvons que le condamner et donc mettre en garde tous ceux qui n’ont qu’un objectif dans leur vie, parvenir à la gloire, qu’il s’agisse d’une gloire personnelle ou de la gloire de leur groupe.

Jésus aimait parler de gloire, cet Evangile le prouve bien puisqu’en 2 versets le mot revient 5 fois ! Mais, lui, quand il en parlait, il n’était pas suspect de dérapage. Il ne vous aura pas échappé que ce qui déclenche ces considérations de Jésus sur la Gloire, c’est le fait que Judas vienne de quitter le dernier repas : « Quand Judas fut sorti du cénacle, Jésus déclara : Maintenant le Fils de l’homme est glorifié ! » La gloire que Jésus recherche n’est donc pas une gloire faite de paillettes, une gloire qui gonfle d’orgueil et qui, pour se nourrir, exige toujours plus de succès tape à l’œil, quel que soit le prix à payer. En hébreu, c’est très beau, le mot gloire est de la même famille sémantique que le mot « poids ». En demandant à Dieu de le glorifier, ce que Jésus cherchait, ce n’était donc pas un succès superficiel, forcément éphémère. Il demandait à Dieu de donner du poids à sa vie, il n’y a que ça qui l’intéressait !

Cette demande de Jésus est tellement juste que Dieu va répondre d’une manière absolument inouïe, oui, la vie de Jésus aura tellement de poids qu’elle va comme faire basculer l’histoire. On va se mettre à compter les années avant Jésus et après Jésus parce que la vie de Jésus deviendra pour tout homme, qu’il soit chrétien ou non, un repère incontournable. Tous ceux qui, pour des raisons idéologiques, ont essayé de supprimer ce repère se sont cassé les dents. Ce qui a vraiment du poids, vous ne le déboulonnez pas comme ça ! Tous ceux, qui se sont fait ériger des statues pour célébrer la vaine gloire qu’ils ont cherché et obtenu en appliquant sans sourcilier le terrible principe de Machiavel, voient, un jour ou l’autre, leurs statues déboulonnées. Celle de Jésus n’a jamais été déboulonnée ! Et on peut légitimement penser que, si un jour, une conspiration mondialement organisée, parvenait à le faire, la fin de l’histoire serait proche. Affirmer cela ce n’est pas de la prétention de la part des chrétiens, c’est juste reconnaître que ce que Jésus a dit et surtout vécu, c’est cela qui donne son assise au monde et à l’histoire. Dès lors, il n’est pas difficile de comprendre qu’ébranler ces assises provoquerait un effondrement général.

Il vaut donc la peine de s’interroger quelques instants sur ce que Jésus a dit et vécu de si fondamental pour que tout repose sur lui. 

C’est la 2° partie de l’Evangile qui nous permet de le comprendre. « Je vous donne un commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres. À ceci, tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres. » Pour que nous puissions accueillir ces paroles de Jésus avec toute la force qu’elles recèlent, il va apporter deux précisions qui nous obligent à les écouter très sérieusement. D’abord, il précise : « c’est pour peu de temps encore que je suis avec vous. » Ces paroles sont donc comme son testament, quand on aime quelqu’un ses dernières paroles, on veut les recueillir avec un infini respect pour les graver définitivement dans notre cœur. Et comme si ce n’était pas suffisant, il rajoute que ce qu’il va dire revêt un caractère de nouveauté absolue : « ce que je vous donne, c’est un commandement radicalement nouveau. »

Nous l’aurons donc compris à travers ces paroles, ce qui donne son assise au monde et à l’histoire, c’est l’amour. Et finalement, ce n’est pas très compliqué à comprendre. Quand les hommes vivent dans la haine, l’avenir est toujours compromis. Nous le voyons bien actuellement avec la guerre en Ukraine et les menaces autour de l’utilisation de l’arme atomique, mais aussi dans le dérèglement économique mondial qu’elle provoque, et encore l’annonce d’une famine redoutable qui risque de faire encore plus de mort que la guerre chez les plus pauvres. Voilà ce que produit la haine. Rêvons un seul instant à ce que pourrait, à l’inverse, produire l’amour. Je dis bien l’amour et pas seulement le respect parce que le respect, on le connait en dehors des temps de guerre et il ne suffit pas. Les hommes veulent se respecter mais en cherchant tous à obtenir, quand même, le maximum pour eux et leurs proches. Non, c’est l’amour qui sauvera le monde ! Quand nous aurons tous compris, comme le dit le pape François dans l’encyclique Laudato Si, que tout est lié et que, donc, nous sommes tous liés, le monde ira beaucoup mieux parce que nous arrêterons d’être des concurrents, de vouloir tirer notre épingle du jeu sans nous préoccuper du sort de nos voisins.

Cet appel à l’amour que lance Jésus, pour lui ce ne sont pas des paroles de prêchi-prêcha ! Il a été jusqu’au bout de ce qu’elles signifient en donnant sa vie pour sauver tous les hommes, y compris, ceux qui étaient en train de le faire mourir : Père pardonne-leur, ils ne savent pas ce qu’ils font ! Et c’est en cela que ce commandement de Jésus est nouveau. Il n’était évidemment pas le premier à parler d’amour, à appeler les hommes à vivre d’amour, le Premier Testament n’ignorait pas ces appels, d’autres religions les connaissaient aussi. Mais ce qui est nouveau, c’est que Jésus a ouvert une voie nouvelle pour parvenir à cet amour : il a donné sa vie. Et désormais, tous ceux qui veulent faire triompher l’amour savent qu’ils peuvent s’appuyer sur lui, recueillir les fruits de son sacrifice pour devenir capables, à leur tour, d’aller jusqu’au bout. 

Le témoignage de tant de martyrs est de ce point de vue éloquent, notamment celui de Charles de Foucauld canonisé aujourd’hui qui a été tué par l’un de ceux pour qui il avait tout abandonné pour se livrer totalement à l’amour dans le dénuement le plus absolu. Frère Charles après une vie bien tourmentée a su renoncer à la Gloire éphémère qu’il avait pourtant recherchée, et c’est son désir d’aller jusqu’au bout dans l’imitation de Jésus-Christ pauvre et aimant qui va donner à sa vie tellement de poids que, désormais, dans le monde entier, il sera invoqué, prié par tous les chrétiens désireux, à leur tour, d’aller jusqu’au bout. Qu’il intercède particulièrement pour nous en ce jour pour que l’amour donne à nos vies un poids d’éternité.

Cette publication a un commentaire

  1. wilhelm richard

    c’est du lourd, votre homélie de ce jour.
    France Gall le confirmerait, elle qui chantait : ça balance pas mal aujourd’hui, ça balance pas mal !!!
    Et c’est dans la continuité de Dimanche dernier (8 mai, jour de naissance du curé d’Ars par ailleurs) avec le bon Berger …. comme notre regretté Michel.

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