15 octobre : samedi 28° semaine ordinaire Réveiller l’amour qui s’éteint !

Puisque cette semaine, nous avons accueilli des prêtres et que nous en recevrons d’autres la semaine prochaine, je nous invite à relire cette lecture en priant pour eux, en demandant pour eux l’esprit apostolique. C’était la prière constante de Monsieur Ollier, le fondateur de l’école française, qui a tant fait pour la formation des prêtres et qui continue de le faire à travers la compagnie de Saint Sulpice. Personnellement, j’ai bénéficié de leur formation au séminaire de Lyon. Monsieur Ollier puisque c’était ainsi qu’on appelait les prêtres, à l’époque, demandait qu’on prie pour lui afin qu’il obtienne toujours plus l’esprit apostolique, et vous pouvez aussi l’écrire avec un E majuscule car il ne demandait rien de moins que l’Esprit qui animait les apôtres. Eh bien, dans cette lecture, nous avons une merveilleuse illustration de ce qu’est l’Esprit apostolique. Paul nous ouvre son cœur de pasteur en nous faisant précisément partager sa prière de pasteur. Puisque nous voulons demander l’esprit apostolique pour tous ces prêtres qui sont accueillis ici et plus largement, que la prière de Paul puisse venir nourrir la nôtre.

Qu’il est bon d’entendre Paul dire : je ne cesse pas de rendre grâce, quand je fais mémoire de vous dans mes prières. On reconnait bien là le vrai pasteur, le pape François aime rappeler aux prêtres et aux évêques que le vrai pasteur, c’est celui qui « garde sur lui l’odeur des brebis. » C’est-à-dire celui dont le cœur est toujours plein de ce que vivent ses brebis. Ce sont les premiers mots de la constitution Gaudium et spes du concile qui disent : Les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des hommes de ce temps, des pauvres surtout et de tous ceux qui souffrent, sont aussi les joies et les espoirs, les tristesses et les angoisses des disciples du Christ, et il n’est rien de vraiment humain qui ne trouve écho dans leur cœur. Voilà ce que signifie garder l’odeur des brebis sur soi ! Et voilà ce qui définit l’esprit apostolique. Le pape ne cesse de mettre en garde les prêtres pour que jamais il ne se laisse envahir par l’esprit du monde qui est précisément à l’opposé de l’esprit apostolique car cet esprit conduit à accomplir les tâches du ministère en bons fonctionnaires, oui bons fonctionnaires, ouvrant leur bureau de telle heure à telle heure et revendiquant ensuite la liberté pour mener leur vie comme ils l’entendent. L’Esprit apostolique, il prend tout entier, ce qui ne veut pas dire qu’il ne faudra pas s’accorder du repos, de la détente, mais quoique nous fassions, nous garderons sur nous l’odeur des brebis, c’est bien ce qui transparait dans la déclaration de Paul : Je ne cesse pas de rendre grâce, quand je fais mémoire de vous dans mes prières.

Paul poursuit en formulant sa prière à l’égard de ces chrétiens d’Ephèse : que le Dieu de notre Seigneur Jésus Christ, le Père dans sa gloire, vous donne un esprit de sagesse qui vous le révèle et vous le fasse vraiment connaître. La théologie de Paul est bien au point parce que, de fait, parmi les 7 dons que donne l’Esprit-Saint, le don de sagesse est le plus désirable, c’est celui qu’on place au sommet de l’échelle puisque c’est lui qui harmonise nos vies pour qu’elles soient au diapason de Dieu. En demandant un esprit de sagesse pour les Ephésiens, Paul, en bon pasteur, demande vraiment le meilleur pour eux.

Qu’il ouvre à sa lumière les yeux de votre cœur, pour que vous sachiez quelle espérance vous ouvre son appel, la gloire sans prix de l’héritage que vous partagez avec les fidèles. Là encore, elle est belle cette prière parce que l’espérance ne nait pas de ce que nous voyons avec nos yeux de chair. Parfois, avec ce que nous voyons ou avec ce que nous apprenons, c’est plutôt le désespoir qui pourrait naître en nous. C’est bien pour cela que Paul précise que l’espérance ne pourra nous habiter que si nous apprenons à regarder avec les yeux de notre cœur, c’est-à-dire avec un regard de foi porté sur les événements et sur les personnes. Parce que Paul veut que les choses soient claires : il nous a appelés pour que nous vivions dans l’espérance. Je relis sa formulation : pour que vous sachiez quelle espérance vous ouvre son appel. Il nous appelle pour que nous nous tenions dans l’espérance.

Je l’ai suggéré en faisant la différence entre espoir et espérance, Paul n’invite pas les chrétiens à l’optimisme. L’optimisme, c’est une affaire de tempérament, l’espoir c’est le résultat d’une analyse lucide de la situation qui constate que le plus l’emporte sur le moins. L’espérance, c’est bien autre chose, c’est une vertu théologale, c’est-à-dire qu’elle est donnée par Dieu. L’espérance, comme le disait Péguy, c’est la petite sœur de la foi et de la charité. Il ne peut y avoir d’espérance sans foi parce que l’espérance, ce n’est pas chanter : ça ira mieux demain ! Non ! L’espérance, c’est croire qu’au bout du compte l’amour l’emportera quand Dieu sera tout en tous. 

La suite de la prière, je ne veux pas trop la commenter à nouveau puisque je l’ai déjà fait, comme par anticipation, dans mon homélie de mardi. Je rappelle juste la reformulation que j’avais proposée en changeant l’ordre des groupes de mots pour que nous réalisions mieux la puissance des paroles de Paul : « l’énergie, la force, la vigueur qu’il a mise en œuvre dans le Christ quand il l’a ressuscité d’entre les morts, cette puissance incomparable il la déploie pour nous, les croyants ! » On imagine la puissance qu’il a fallu pour faire revenir à la vie le cadavre de Jésus, eh bien, cette puissance que le Père a utilisée, il la met à notre disposition. Paul précise quand même : c’est à la disposition des croyants qu’il la met, oui parce qu’il faut une sacrée dose de foi pour croire que cette puissance est à notre disposition et oser s’en servir. Je ne vais pas vous refaire le coup, mais c’est la bonne question du père jésuite : alors est-ce que vous croyez ou est-ce que vous croyez que vous croyez ?

Enfin Paul invite les chrétiens d’Ephèse à cette magnifique contemplation de ce qu’on pourrait nommer la Seigneurie du Christ. Nous aurions grand avantage à laisser cette contemplation de Paul nourrir notre prière aujourd’hui en la ruminant patiemment. 

Oui, Seigneur, nous te le demandons, donne à tous tes prêtres cet esprit apostolique qui animait Paul et dont on entend l’expression dans les mots de sa prière. En ce 15 octobre, où nous faisons mémoire de l’acte d’abandon de Marthe, nous voulons demander cette grande effusion du Saint-Esprit sur l’Eglise pour que, prêtres et pasteurs unis, deviennent ces infatigables disciples-missionnaires capables de ranimer dans ce monde l’amour qui s’éteint.

Quelques mots sur l’Evangile. Il est bien possible que les paroles de Jésus, entendues aujourd’hui, soient revenues à l’esprit de Pierre quand il était à Gethsémani et qu’il voyait Jésus en fâcheuse posture, livré aux mains de ceux qui étaient venus l’arrêter. Pierre avait été lâche en dormant alors que Jésus lui avait signifié qu’il avait besoin de sa présence priante, il repense à ces paroles entendues jadis et se dit que c’est le moment de se racheter. Courageusement, il va tirer son épée, un geste qui aurait pu le conduire à la mort, tous les soldats auraient pu tomber sur lui. Mais il n’écoute plus sa peur, il se rappelle uniquement les paroles de Jésus : Quiconque se sera déclaré pour moi devant les hommes, le Fils de l’homme aussi se déclarera pour lui devant les anges de Dieu.

On connait la suite ! Au lieu d’obtenir les félicitations attendues, Pierre est vertement remis en place devant tout le monde. Il reçoit, ce jour-là, la plus grande claque de sa carrière apostolique qui a dû le plonger dans un océan de perplexité. Mais quel était donc le sens des paroles de Jésus ? Que signifie : se déclarer en faveur de Jésus ? Par quelles attitudes concrètes ça passe ? Il me semble que la leçon de Jésus est assez claire : nous ne nous prononcerons jamais en sa faveur en prenant la vie des autres mais, c’est en donnant notre propre vie à sa suite que nous lui rendrons le plus beau, le plus grand des témoignages. Que Ste Thérèse d’Avila que nous fêtons aujourd’hui intercède pour nous afin que nos vies données puissent vraiment témoigner que « solo Dios basta » !

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