18 janvier : les choix de Jésus parfaitement déconcertants !

Hier, nous l’avons entendu, Dieu n’était pas très chaud pour répondre à la demande du peuple qui voulait un roi et quand je dis qu’il n’était pas très chaud, c’est un doux euphémisme ! Nous voyons aujourd’hui comment le premier roi a été recruté et la Bible ne manque pas d’humour … parce que si on devait donner un titre à ce texte, on aurait pu dire : ils étaient partis chercher des ânes et ils reviennent avec un roi !

Vous savez que la devise que le pape avait choisie quand il est devenu évêque, et qu’il a gardée comme pape, est tirée d’un commentaire d’un Père de l’Église, Bède le Vénérable, sur cet évangile de l’appel de St Matthieu. Elle dit en latin : Miserando atque eligendo et c’est assez difficile à traduire, mais on pourrait dire : appelé parce que miséricordié. En effet, l’appel de Matthieu est invraisemblable d’ailleurs si vous avez déjà vu le magnifique tableau du peintre, Le Caravage, représentant cette scène, on voit bien que Matthieu n’arrive pas à croire que Jésus l’appelle, lui, le collecteur d’impôts. On voit sur ce tableau Matthieu qui est assis à sa table avec des piles de pièces de monnaie et Jésus qui le désigne du doigt pour lui montrer qu’il l’appelle et Matthieu avec un air tout étonné se désigne comme pour attendre une confirmation de Jésus, parce que ce n’est pas pensable qu’il soit appelé, lui qui était un pécheur public.

Et le pape a choisi ce commentaire de l’appel de Matthieu comme devise parce qu’il raconte que sa vocation remonte à un jour où il était allé se confesser. C’est à la sortie du confessionnal qu’il a eu la certitude que le Seigneur l’appelait. Il était appelé parce que miséricordié, en effet, il venait juste de recevoir la miséricorde … et s’il venait de recevoir la miséricorde, c’est parce qu’il était pécheur ! 

Ce jour-là, le jeune Jose Bergoglio a compris que le Seigneur aimait les pécheurs et qu’il leur faisait confiance alors qu’il savait très bien ce qu’ils valaient. Il faut être Dieu ou son Fils pour oser faire de tels choix ! Alors, on imagine la joie de Matthieu et de tous les pécheurs, à sa suite, qui voient le regard de Jésus se poser sur eux. Ils comprennent qu’ils ne vivront pas éternellement avec cette étiquette de « pécheur public » collée au front. Du coup, Matthieu est tellement content qu’il fait une grande fête en invitant tous ses amis … mais ses amis appartenaient au même monde que lui, un monde pas très fréquentable. Et voilà Jésus qui se retrouve au milieu de tout ce beau monde, enfin beau monde, vous voyez ce que je veux dire ! 

         Evidemment, ça n’a pas plu à tout le monde, l’évangile nous rapporte les reproches que font les scribes. Et, je ne sais pas si vous avez remarqué, mais le texte dit que les scribes ne font pas ces reproches directement à Jésus mais aux disciples. Pourquoi ne font-ils pas ces reproches directement à Jésus ? Parce qu’ils ne sont pas courageux, parce qu’ils n’osent pas lui dire en face ce qu’ils pensent ? Non ! Il y a tant d’autres endroits où ils vont l’affronter directement sans le ménager. S’ils vont le dire aux disciples, c’est pour semer le doute dans le cœur des disciples, en effet, ils savent qu’ils vont trouver auprès des disciples une oreille attentive. Quand on veut dire du mal de quelqu’un on cherche toujours à le dire à une personne qui a des problèmes avec celle qu’on a envie de critiquer ! 

Mais vous allez me dire que les apôtres, eux, ils n’avaient rien contre Jésus … oui, bien sûr, mais il est bien possible, que, dans ce moment précis, ils ne comprennent pas, eux non plus, le choix de Jésus. Qu’est-ce qui lui a pris ? Pourquoi Jésus appelle-t-il cet homme si peu fréquentable à faire partie du groupe apostolique. 

Parce qu’en l’ayant appelé, les apôtres réalisent qu’ils vont devoir vivre avec Matthieu qui était peut-être l’ennemi juré de certains d’entre eux ! Cela je l’ai découvert en regardant le film Jésus de Nazareth de Zeffirelli qui a eu des trouvailles magnifiques.

         Je ne peux pas tout raconter, vous irez revoir le film ! Zeffirelli situe l’appel de Matthieu juste après la pêche miraculeuse. On voit les apôtres, tout contents, qui ramènent les filets pleins de poissons, ils se frottent les mains, c’est une bonne journée, ils vont faire de bonnes affaires en vendant cette pêche exceptionnelle. Matthieu dont le bureau de publicain est installé tout près de là entend qu’il y a eu une pêche miraculeuse et que ça concerne Simon-Pierre. Immédiatement, il se rappelle que ce Simon, il a un arriéré d’impôts, immédiatement, il le fait appeler pour qu’il vienne payer ses dettes ! Et, alors, on assiste à la colère de Pierre qui le traite de sangsue et qui l’égorgerait si on ne le retenait pas ! Et c’est précisément là qu’arrive Jésus et qu’il appelle Matthieu ! Alors vous imaginez le dépit de Pierre : comment c’est possible ? Non, vraiment, ce choix de Jésus reste en travers de la gorge de Pierre. Et c’est là que, dans la suite du film, il y a un petit bijou, mais je n’ai pas le temps de le raconter !

         Evidemment, c’est une mise en scène, ce n’est pas directement l’évangile mais cette mise en scène aide à comprendre l’évangile. Du coup, on comprend mieux pourquoi les scribes vont voir les apôtres pour dire leur incompréhension devant l’attitude de Jésus. Ils vont rencontrer des hommes qui sont dans la même incompréhension qu’eux. « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » Lorsque Jésus affirme cela, il ne le fait pas que pour les scribes, c’est aussi pour les apôtres qui ne comprennent pas le choix de Jésus et qui ne comprennent pas non plus la portée de cette parole.

C’est bien plus tard que Pierre comprendra la portée de cette déclaration de Jésus, c’est à la sortie du palais du grand-prêtre, après son reniement. J’aime penser que, lorsque le regard de Jésus s’est posé sur lui, à ce moment-là, cette parole va remonter dans son cœur : « Ce ne sont pas les gens bien portants qui ont besoin du médecin, mais les malades. Je ne suis pas venu appeler des justes, mais des pécheurs. » Et les larmes de Pierre ont dû couler abondamment parce qu’il mesure son péché et la puissance de la miséricorde de Jésus, mais aussi parce qu’il prend conscience du nombre de fois où il a jugé les autres en imaginant que, lui, il était quelqu’un de bien !

Appelé parce que miséricordié et miséricordié parce que pécheur, ça pourrait être notre devise à chacune et chacun, une devise qui pourrait nous aider à être infiniment reconnaissant à l’égard du Seigneur qui a osé poser son regard sur nous et nous faire confiance … une devise qui pourrait nous aider à devenir plus miséricordieux les uns à l’égard des autres.

Cet article a 2 commentaires

  1. Wilhelm richard

    Si j’ai bien compris, Matthieu était sangsue et Pierre sans-sous ?
    J’espère ne pas faire un faux-jugement.

    1. Père Roger Hébert

      Très bon jeun de mots, bravo Richard !

Laisser un commentaire